Toi aussi ?

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Un matin de pluie, l'échec est cuisant. Le feu monte dans mon cœur et mes larmes coulent du malheur. Quel est donc l'intérêt de continuer à rire quand l'air manque aux poumons, que les mots manquent à ma voix et que toi, si loin, je ne te vois ? Une image devient vite floue dès qu'on l'oublie pour un instant. Les traits d'un siècle enneigé se perdent au loin comme la vulgaire fumée des fourneaux de l'espoir. Ma peau brûle, mon coeur souffre, mes mains tremblent.

Voyez-vous le mal à travers ce masque d'argent ? Percez-vous cette douleur qui me porte et qui flotte sur mon âme ? N'est-ce pas trop facile de croire en moi juste par mon rire et ma bonne humeur ?

Tout n'est qu'aspect. La peau d'une tortue est fine et lisse, douce et nette car sa carapace est poignardée, griffée et porte les traces de vie de l'animal.

Je les déteste à croire que tout va bien. Je les déteste à croire que je ne pourrais pas comprendre.

« Tu ne pourrais pas comprendre, toi. T'as jamais rien connu comme malheur dans ta vie. On aurait dit qu'elle est parfaite. »

« Si y'en a bien un qui peut se plaindre ici, c'est moi. J'ai vécu le pire. D'ailleurs, ceux qui se plaignent à côté de moi m'irritent car ils connaissent pas mon passé. »

Toi non plus, imbécile, tu ne te remettras pas en question. Le niveau d'empathie des gens est parfois si bas qu'il est à peine distinguable si je plisse des yeux.

L'imbécile a oublié les autres. Il ne pense qu'à lui. Les malheurs tournent autour de lui. Pourtant on en a tous. On ne les hurle pas sous tous les toits car il est plus dur d'en parler que de les garder cachés dans un tiroir de notre mémoire.

Moi aussi, je souffre. Écoutez-moi, s'il-vous-plaît. Intéressez-vous à mes problèmes comme je m'intéresse aux vôtres, comme je soigne vos blessures. Ne suis-je qu'une éponge à saleté ? Ne suis-je qu'un objet sans valeur sur lequel on déverse son malheur ?

Comment est-ce possible d'oublier que les autres aussi ont des problèmes ?

Comment est-ce possible d'en oublier soi-même ? de taire les pensées douloureuses parce que « d'autres ont toujours pire que soi » ?

Chaque problème est important. Qu'importe son échelle. Chaque problème est vécu individuellement, et nécessite qu'on y tende l'oreille.

3 septembre 2022, 22:28

Mes pensées ne s'éteignent jamaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant