Thomas ferma les paupières, soufflant d'un désespoir agaçant. Il répéta encore devant son reflet : « Newton, je t'aime. » Un grognement lui échappa.
« Non ! Trop direct ! »
Ses poumons s'emplirent d'air.
« Voilà Newton, on se connaît depuis pas mal de temps et je sais que ça risque d'être super, super, méga gênant pour toi, mais je devais absolument te dire que... que je suis amoureux de toi. »
Sa main frappa son front.
« Non ! Trop long ! »
Il fixa ses iris.
« Est-ce que t'es gay ? Non mais parce que je crois que je... souffla-t-il. Putain ! Merde ! Merde et merde ! »
Ses poings s'échouèrent sur la commode.
« J'y arriverai jamais !
— De quoi ? »
Thomas sursauta. Il croisa le visage neutre de sa sœur aînée dans son miroir.
« À déclarer ma flamme à Newton...
— Newton. Ton supposé meilleur ami ?
— Dans le mille... J'en peux plus ! Pourquoi c'est aussi dur ? Pourquoi ça ne pourrait pas simplement se dire sans paroles ?
— Parce qu'autrement, ce n'est pas une déclaration. »
Le cadet se tourna en pinçant ses lèvres.
« Que suis-je censé faire, alors ? Ne rien dire ?
— Tu souhaites garder ce secret plus longtemps ?
— Oula, non !
— Dis-lui ce matin.
— C'est ce que je comptais faire, mais je ne suis même pas prêt ! Je ne comprends pas comment je suis supposé lui avouer une chose pareille !
— Ne révise pas. Improvise en face de lui.
— Im... proviser ? Ça va pas ?
— C'est la meilleure façon de donner une voix à ton cœur. »
Le garçon fit la moue.
« Et s'il me recale ?
— Tu auras essayé. »
Un soupir lui répondit.
« Bon, dans ce cas... va pour l'improvisation. »
Lorsqu'il ouvrit la porte d'entrée, sa sœur lui souhaita de sa voix calme :« Bonne chance. »
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« Hey ! Tommy ! »
Le surnommé retint son souffle. Arrêté par le bras de son camarade, il se figea dans les couloirs de son lycée alors que le jeune homme blond arborait son sourire radieux : « Hey ! T'as l'air bien pressé ! Tu vas où ?
— Euh... en cours ?
— Sérieux ? Je voulais dire, en quelle salle es-tu ? rit-il.
— Ah, um... Je suis en C 14... Et... Et toi ?
— En D 28. Dis, t'es libre, cet après-midi ?
— Non, non, désolé, je... j'ai classe jusqu'à dix-huit heures.
— Parfait ! Je veux dire... tu comprendras pourquoi ! »
Ses doigts s'aventurèrent dans les poches de sa veste.
« Newton, je voulais te dire quelque chose, um... »
La main du blond lui tendit un papier plié.
« Cadeau, Tommy. »
Ce dernier l'attrapa d'un air hésitant. Curieux, il était sur le point d'ouvrir la lettre lorsque Newton rougit jusqu'aux oreilles.
« Non ! s'exclama-t-il. Tu, enfin... J'aimerais que tu la lises plus tard.
— Plus tard ? Mais... on ne se voit plus aujourd'hui, si ?
— Justement ! »
Réajustant son sac, il s'enfuit parmi la foule d'élèves.
« Newt ! Attends ! C'est... Qu'est-ce que c'est ? »
Le garçon ne l'entendit pas. Lors de sa pause, Thomas s'assit dans le hall menant jusqu'aux toilettes. Son dos glissait contre un mur tandis que ses doigts cherchaient prestement le bout de papier. Ses yeux avides de réponses s'empressèrent de déchiffrer l'écriture noire et soignée.
« Cher Tommy,
Je suis bien trop craintif pour te transmettre directement ces paroles. Quoi de mieux que les étaler à l'encre sur un vulgaire papier ? Sache que je n'attends aucune réponse positive de ta part. J'ai simplement le besoin ardent de t'avouer les sentiments que j'éprouve à ton égard. Je t'aime tellement. Voire trop... Je crois bien que je suis amoureux de toi, Tommy. En réalité, j'en suis plutôt certain. Merci d'être mon ami, Tommy.
Encore navré si ces mots t'embarrassent.Newton. »
Un sourire inévitable s'empara des lèvres de Thomas. Une fois le texte imprimé dans son esprit, il se réjouit :« J'aurais échappé à cette étape. »