à nos âmes ébranlées

3.IX

"je crache ma haine sur toutes ces putains"

CALEB

     La première fois qu'il avait vu Joy, c'était dans ce café parisien, un après-midi pluvieux.
Elle était entrée avec Mina, elles avaient toutes les deux le pantalon mouillé, les cheveux trempés et les vêtements collés à leur corps comme s'ils faisaient partis d'elles.

Elles s'installèrent dans un coin assez éloigné des autres tables, elles commandèrent, le sourire aux lèvres.
Pour être honnête, depuis qu'elles étaient entrées, elles avaient le visage qui illuminait la pièce en ce jour si triste.

Le ciel était gris, si monotone au point où l'on voudrait en crever mais elles avaient la joie de vivre, en particulier Joy.

Joy avait ce sourire allègre, il voulait en savoir plus.
Elle souriait comme une fille n'ayant jamais rien vécu, n'ayant pas eu à affronter la difficulté et l'horreur dont le monde regorgeait.
Il aimait ça, il avait une soudaine obsession pour ça.

Il voulait voir ce qu'il se cachait sous ce visage de porcelaine, si fragile, parce qu'il en était sûr que ce sourire ne durerait jamais bien longtemps.

Alors lorsque Mina se leva pour aller aux toilettes, il avait saisi sa chance.
Comme un loup s'approchant de sa proie, il avait virevolté dans le café pour la rejoindre et lui susurrer des mots doux.

Bien sûr, elle n'était pas facile et il aimait ça. Elle l'avait rembarré violemment, disant qu'elle connaissait bien les hommes comme lui et qu'elle n'en voulait pas.
Mais il était déterminé.
Il était prêt à tout pour l'avoir.

C'était le nouvel objet de sa convoitise, son nouveau caprice après avoir passé tant d'années à vivre sans aucune volonté.
Il avait trouvé une raison de se battre.

Il était revenu la semaine suivante dans ce café et les autres aussi, mais elle n'avait jamais daigné franchir le pas de l'établissement.
Jusqu'à cette nuit d'hiver.

Il était sur le point de s'en aller, ne l'ayant pas vu de toute l'après-midi quand elle entra en trombe dans le café.

Elle était seule cette fois-ci.
Elle ne souriait pas, elle semblait à fleur de peau et il aimait ça.

Il aimait la Joy affaiblie qu'il voyait face à lui puisque c'était sa vraie nature.
Il en était sûr.

Elle s'était assise à la même table que la première fois, avait commandé la même chose, excepté qu'elle n'avait pas pris de pain au chocolat.
Alors il appela un serveur et il commanda la petite sucrerie pour elle.

Lorsque le serveur le lui apporta, elle fit une drôle de tête, surprise jusqu'à ce que le serveur lui pointe du doigt Caleb et qu'il lui offre un sourire éclatant.

Elle avait fini par l'inviter à sa table, plus par politesse que pour autre chose mais ça lui suffisait.

C'était comme ça que tout avait commencé.
Cette nuit d'hiver ils étaient resté assis durant des heures, à discuter.
Et puis comme un évènement en entraîne un autre, la suite logique était qu'ils s'étaient échangé leur numéros avant qu'elle ne rentre.

Caleb en avait des frissons.
Il palpitait à l'idée de pouvoir obtenir cette jeune femme parfaitement innocente.
S'il lui restait une quelconque once de sainité dans le corps, tout c'était évaporé à la seconde où Joy l'avait laissé entrer dans sa vie.
Il était complètement névrosé.

La suite n'avait pas été bien compliqué. Il l'avait invité à sortir, elle avait d'abord dit non, ajoutant qu'elle était trop occupé.
Mais il avait réussi à se montrer convaincant, elle avait fini par accepter.