3.IV

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"Then the world came crashing down"

NAËL

- On a récupéré les caméras qu'il y avait autour du lieu où a eu lieu l'accident. On ne pouvait pas voir correctement le chauffeur. Dit-il en montrant des photos qu'il sortit de son sac.

Naël les prit dans ses mains, il y avait une voiture grise, c'était celle qui avait foncé sur Farah, il s'en souvenait.
La voiture avait été zoomée sur de nombreuses photos et il était vrai qu'il était difficile de voir le chauffeur, peu importe les angles.

- Mais on a eu quelque chose de plus intéressant. Ajouta Ishem. C'est la plaque d'immatriculation. Si tu regardes bien, elle est bien visible et on peut la lire.

Il regarda attentivement les photos, il vit la plaque en question : FA-344-FB.

- On a trouvé le modèle et la marque du véhicule, son année de mise en service, le nom, prénom, l'adresse et date de naissance du propriétaire du véhicule. Annonça Ishem.

Sans même s'en rendre compte, Naël s'essuyait nerveusement les mains sur ses cuisses après avoir posé les photos sur la table basse face à lui.

- C'est une Renault Clio, achetée en 2018 par Monsieur Durand Caleb, née le 18 Octobre 1997. Dit Ishem.

"Caleb" ce prénom lui disait quelque chose, il espérait que ce ne soit pas le Caleb qu'il connaissait.
Il priait pour que ce ne soit pas le petit-ami de Joy le responsable de la mort de son premier amour.

Ishem glissa une photo de l'homme en question sur la table, Naël reconnaîtrait ce visage entre mille.
C'était celui qui avait osé venir mettre les pieds chez sa mère avec Joy, c'était celui qui piétinait les sentiments de Joy, celui qui était la source de tous ses problèmes.

Il transpirait, trouvant qu'il faisait une chaleur étouffante dans la pièce.

- Khelti, je peux ouvrir la fenêtre s'il te plait ? Demanda-t-il.

Il suffoquait comme s'il était dans un sauna.
Elle hocha positivement la tête, il se leva à pas lent pour ouvrir en grand la fenêtre et l'air frais le gifla soudainement, encore plus fort que ce qu'il venait d'apprendre.

Il était complètement déboussolé.
Comment se faisait-il que la raison pour laquelle il était devenu une sorte de mort-vivant faisait en quelque sorte encore partie de sa vie ?

Il ne parlait pas à Caleb, ne le voyait jamais mais le fait qu'il soit aussi souvent avec Joy faisait qu'ils avaient une sorte de lien, quelque chose en commun et cette idée lui donnait la nausée.
Il voulait vomir jusqu'à ce que son ventre soit vide, il avait l'impression que son repas qu'il avait mangé plus tôt avec Joy était une sorte de trahison envers Farah.

Elle aurait voulu qu'il soit heureux, il en était sûr, mais avec la fille qui sortait avec son tueur ? Ça il en doutait.

- Il vit au 16 Rue du Général Leclerc, dans le 94, proche de Kremlin-Bicêtre. Ajouta le cousin.

Il le savait déjà.
Il connaissait bien cette adresse aussi, il l'avait enregistré sur Google Maps en tant que "le château" parce qu'il considérait Joy comme sa princesse.

Dans les contes, c'était le prince qui venait délivrer la princesse retenue en captivité mais il avait toujours pensé que c'était l'inverse avec Joy, c'était elle qui l'avait sauvé, à de nombreuses reprises.

- Il vit avec Madame André Joy depuis un an.

Il voulait dire "je sais très bien avec qui il vit" mais comment aurait-il pu expliquer après qu'il aimait cette jeune femme ?

Même s'il pensait que c'était impossible, Naël sentit son coeur se briser à nouveau.
Comme si la perte de Farah n'était pas assez, il fallait que ce fils de chien qu'est le mec pathétique de Joy se la ramène.

Il le détestait du plus profond de son être.
Mais surtout, il se détestait encore plus parce que maintenant qu'il savait qui c'était, il ne pourrait jamais assouvir ses désirs de vengeance parce qu'il s'était toujours dit mieux que lui.
Il était meilleur que lui alors il ne s'abaisserait jamais à son niveau, c'était ce qu'il s'était toujours dit.

Il avait toujours aussi chaud malgré le fait qu'il soit devant la fenêtre.

- Comme je l'ai dit, il y a de grandes chances que ce soit lui le coupable puisque c'est sa voiture mais il y a autre chose. Déclara-t-il.

Naël releva la tête pour regarder Ishem. Il voulait que l'on arrête de lui parler, il voulait que tout le monde se taise, disparaisse plutôt.

- On a trouvé une demande pour ajouter le nom de Madame André sur la carte grise. Avoua Ishem. Et il est impossible de savoir qui est au volant en visionnant les images, alors il est possible que ce soit elle qui conduisait.

Si seulement le monde s'était arrêté de tourner lors de leur dernière nuit ensemble.
Si seulement il pouvait retourner s'allonger dans ces draps imprégnés de l'odeur de Joy.

Il suppliait qu'on lui rende ce bonheur éphémère, mais si doux, qu'on lui avait offert.

Il avait tellement mal qu'il avait l'impression que dans les secondes qui viendraient, il perdrait connaissance.

- La police a demandé un mandat d'arrêt contre les deux pour qu'on puisse les interroger. Annonça-t-il. Nous l'obtiendrons dans 3 jours si tout se passe bien.

Il avait 3 jours pour s'assurer que Joy n'avait pas conduit cette maudite voiture.
Il se souvenait qu'elle avait mentionné une voiture un jour, il espérait que ce n'était pas celle qui avait tué Farah, il voulait croire que tout ça n'était qu'un cauchemar.

Il ne supportait plus ce qu'il ressentait, il voulait juste que son corps arrête de fonctionner et que son coeur ne sente plus jamais rien.

Sans même s'en rendre compte, il se précipita dans les toilettes pour vomir.
Il avait rejeté tout ce qu'il pouvait expulser de son corps, il ne s'était jamais senti aussi faible de toute sa vie.

Il ne savait pas combien de temps il était resté accroupi sur le sol des toilettes à vomir tout ce qu'il pouvait, quitte à y laisser ses tripes mais il avait entendu la porte d'entrée s'ouvrir puis se refermer, signe que quelqu'un était parti et peu de temps après, la mère de Farah vint.

Naël ne savait plus ce qu'il se passait autour de lui, ne voyait plus et n'entendait plus le monde extérieur.
La seule chose qu'il sentait pendant que Jamila essayait tant bien que mal de déplacer son corps jusque dans la salle de bain c'était la douleur du choc, comme si l'on venait de le frapper brutalement et qu'il n'arrivait plus à se relever.

Naël ne sentait pas son téléphone vibrer dans sa poche parce que Joy l'appelait.

Naël ne sentait pas non plus que la mère de Farah l'avait emmené dans la salle de bain avant de ramener des vêtements propres.

Il ne réalisa pas qu'il avait ôté ses vêtements pour prendre sa douche et qu'il avait pleuré comme il ne l'avait jamais fait depuis longtemps sous cet eau froide.

à nos âmes ébranléesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant