Chapitre 19: Comme les cinq doigts de la main (Tom, Nicolas et la bande du 36)

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La première chose que fait Tom en sortant de ce maudit endroit qu'il veut bannir à tout jamais de son esprit, c'est s'allumer une cigarette, plusieurs semaines sans sa dose de nicotine, ça fait des dégâts. C'est primordial vu comment il est remonté comme une pendule, s'emportant pour un rien et pour n'importe quoi, ça ne lui fait pas plaisir d'être comme ça, aussi pourri de l'intérieur, ça lui rend la vie difficile par rapport à ce qu'on peut penser, c'est de l'auto-souffrance en réalité mais il n'a pas d'autre choix, c'est pour se protéger qu'il cache aussi bien son jeu, d'ailleurs comme Nicolas qui n'est pas mieux à ce sujet. Visiblement pour être flic, il faut être bon comédien dans le contrat.

Tom finit par se poser contre un mur, la cigarette dans la bouche, le regard absent. Nicolas se pose à côté de lui, les yeux dans le vide. Il se dit qu'il aurait sûrement dit la fermer au lieu de la ramener mais son cœur avait pris le dessus sur la raison. Il avait l'impression que Tom n'accordait pas autant d'importance à leur relation, qu'il ne devait pas compter tant que ça dans sa vie, qu'il ne lui apportait que des problèmes, si bien qu'il en était arrivé à utiliser un taser sur lui, chouette l'ami. Cependant, Tom ne pense évidemment à rien de tout ça, au contraire...

« -Tu te souviens quand on s'est rencontré ? demande Tom.

-Oui bien sûr... et toi ?

-Évidemment, comment oublier ? Je m'en souviens comme si c'était hier, chaque détail. Je me souviens de l'ambiance, de la date, de mon état d'esprit, du temps qu'il faisait, de toi... de tout Nicolas... »

Nicolas parait surpris de sa réponse, lui qui pensait qu'il ne se souvenait plus de ce fameux jour si important pour lui parce que ce soir-là, Tom l'avait sauvé de la mort certaine, il était arrivé au bon moment comme un héros sauvant tout, un héros au manteau noir, un corbeau héroïque qui agit dans la pénombre, en toute discrétion, loin des feux des projecteurs. Tom considérait ce jour tout aussi important pour lui dans sa vie.

« -Si tu savais... si tu savais comment tu comptes pour moi Nicolas, mais je ne te le dis jamais. C'est compliqué de parler de ce qu'on ressent, de laisser parler notre cœur, ça brise, ça fait mal. Mais parfois c'est nécessaire... parce que je m'en rends compte que tu doutes de moi, je dois vraiment mal agir avec toi et j'en suis désolé, tellement désolé...

-Tom... je... je ne t'ai jamais dit ça, je veux dire, c'est juste que je me posais des questions parce qu'en ce moment je suis perdu et moins bien mais ça va mieux quand tu es là, nettement mieux... j'ai compris que je me trompais totalement. »

Tom comme Nicolas n'ose pas regarder l'autre, chacun fuit l'autre mais chacun tente de discuter, de lâcher ce qu'il a sur le cœur, c'est difficile de s'exprimer quand on n'a pas l'habitude, quand on a l'habitude de tout mettre sur l'humour ou bien de se cacher derrière un caractère froid. L'inspecteur tire une taffe, soupirant longuement.

« -Tu es arrivé au bon moment dans ma vie, au moment où j'étais au plus bas, où je ne vivais plus, ma vie n'était qu'une illusion. Depuis que j'avais perdu... ma femme et ma fille je veux dire. Je n'avais plus personne, j'étais paumé, anéanti, je voulais en finir, ma vie n'avait plus de sens jusqu'à ce que je te croise ce fameux soir. Tu me fais rire, tu me donnes du courage, tu ne me juges pas, tu m'écoutes, tu es toujours là pour moi, c'est ça un ami, un ami en or. En fait non, on n'est même pas amis, à ce stade-là, c'est être frères. Tu es ma seule famille Nicolas... »

Nicolas relève les yeux aux derniers mots de Tom, sous le choc, plutôt ému d'ailleurs, il ravale ses larmes, trop de fierté, mais presque en train de fondre devant lui. Parce qu'il ne pensait jamais entendre ça de sa part, il se prend la vérité en pleine face. Oui, il est utile à Tom et lui apporte de la joie de vivre, quelque chose de positif.

Un village trop tranquilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant