14. Rechute 🌺

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Le week-end a commencé il y a précisément 12 heures et 31 minutes. Je le sais car quand je regarde ma montre elle affiche 12:31. Il est 12:31, un samedi, et je suis en cours avec ma classe. Du moins, avec ceux qui ont bien voulu se pointer. J'avoue que dans une autre vie j'aurais bien fait comme eux. Mais pour l'instant je me contente de fixer monsieur mon prof pour rester éveiller face à son speech sur l'exercice de construction-méca.

A gauche de moi, Jonh ne se gêne pas de dormir, face contre le table-banc, prenant appuie sur son bras. Il a pu résister environ une heure, ce qui en soi est déjà admirable de sa part. Fort heureusement, le prof sait ce qu'inspire son cours à la plupart des élèves, il se contente alors simplement d'étaler ses explications, assez claires au passage, et de nous rattraper délicieusement aux évaluations.

Moi cependant, je pense à beaucoup de choses. Si mes yeux somnolent et bataillent pour tenir le coup, mes pensées elles sont très éveillées. Je ne suis clairement pas avec monsieur Mhovo, et à la longue j'aurais mieux fait de sécher pour cette fois. Je pense à beaucoup de choses, à beaucoup de gens. À la période d'examen de fin d'année. À mes prochaines évaluations. À Lyan à deux banc de moi, focalisé sur le grand tableau blanc. À Harlick. À Harlick. Pourquoi à Harlick ? Pourqu...

— Mademoiselle Mbouama... ah, ma fille rêve là ! Les devoirs de la semaine prochaines seront sucrés, ricane t-il en me perturbant subitement. Si même vous vous êtes à l'ouest, je ne donne pas cher de monsieur Moulecka, s'amuse t-il une fois de plus.

En entendant son nom, Jonh se réveille en sursaut et fait automatiquement éclater la classe. Quant à moi je me lève, pour proposer une réponse à l'exercice.

En 28 minute de plus, le cours prend fin. On peut reprocher à monsieur Mhovo tout de sa façon d'enseigner (quoique en fait pas) mais jamais sa ponctualité. Un quadragénaire très à l'heure, même quand on y attends pas, contrairement à presque tout nos autres profs.  On reste quelques temps à peaufiner les réponses du fameux exercice et à mieux les comprendre, puis on se décide à sortir pour rentrer enfin. Le week-end ne commence que très tard plur nous, malheureusement comme toujours.

Avant de sortir de l'établissement, je croise Androine qui sort de son bâtiment. Vous savez, l'ami de Karl, de la section électronique. On se salue brièvement et bien qu'il veuille faire la conversation j'écourte, peut-être involontairement, nos échanges. Je suis plus sympa d'habitude, mais aujourd'hui est un jour spécial. Comme j'en ai beaucoup ces temps-ci. Des jours où ma tête me torture comme s'il ne faisait pas partie de moi. Des jours où mes pensées se dirigent trop souvent vers le négatif que j'inspire.

Je fais la route avec Mhérienne, Jonh et Aymhar, puis avec Aymhar seul, et je rentre.

J'ote ma tenue scolaire, me réhabille, et me pose sur la chaise dégarnie de ma chambre, en lançant une musique au volume provoquant. Ma joie s'étiole au fil des jours, je n'ai aucun contrôle là dessus, c'est tellement frustrant. Je ne veux pas changer la gaieté que je m'étais donné d'inspirer. Je ne veux pas sombrer dans une autre facette de moi, mais j'ai l'impression de ne rien pouvoir faire pour empêcher ça. De n'avoir aucun pouvoir.

Être faible, c'est lassant. Plus que ce que je ne pensais.

Je ferme les yeux, histoire de ressentir les notes en moi. Histoire de faire comme si je n'allais pas si mal que ça mentalement. Histoire de me noyer un peu, comme je ne pourrais jamais le faire physiquement. Un cahier de maths ouvert sur la table devant moi m'attends, pour quand ma transe sera finie. J'ai plein de chose à réviser, mine de rien. Mais la musique d'abord.

Sur un passage relativement entraînant, je déchaine ma voix dans l'aigu de la chanteuse, au rythme du son. Mais un maudit message me casse l'ambiance de mon accapella, et je grogne aussitôt d'irritation. Quelle erreur de débutant ! Ne pas mettre son téléphone sous silencieux avant de profiter d'une séance musicale. 

A tous ceux qui, un jour, m'ont aiméOù les histoires vivent. Découvrez maintenant