L'université des délires

🔦🔦 Chapitre 23

Macky éprouve de la peine pour comprendre l'enfant. Son monologue est fuligineux et alambiqué. Il parvient à le convaincre de monter dans sa voiture.

Le ventre creux du gamin ne rime pas avec un interrogatoire. Macky conduit sa voiture jusqu'au fast-food le plus proche. Il commande deux hamburgers et deux canettes.

Il le laisse manger. L'énergie que le talibé y met justifie sa faim. Après avoir mangé, Macky peut naturellement lui poser ses questions.

- Comment t'appelles-tu ?

- Je m'appelle Hamady.

- Yaw sa tour bi dafa nekh sakh... Man Macky la toudou... Je ne vais pas te faire du mal. N'aie pas peur. 

Macky sourit pour que le garçon lui fasse confiance. Il a échangé avec lui sur plein de sujets.

- Tous les jours, je dois donner deux cents cinquante francs à mon marabout. Sinon, il va me frapper.

- Que fais-tu alors si tu ne trouves pas l'argent ?

- Il m'est déjà arrivé de voler au marché.  Parfois aussi, je passe la nuit à la belle étoile. Et quand je rentre, le marabout s'en prend à moi.

- Je suis désolé Hamady. J'ai même le cœur meurtri. C'est vraiment dur.

- Mes parents sont les principaux responsables de ce qui m'arrive. Ils n'ont pas fait les efforts nécessaires pour me garder près d'eux. Tu sais Macky, j'ai une colère noire à chaque fois que je pense à eux. Je les déteste du plus profond de mon âme.

« Plus j'écoute Hamady, plus j'ai les larmes qui me demandent l'autorisation de sortir. Je fais état de toutes mes forces pour ne pas les laisser déborder. Il a beau être un enfant, ce qu'il dit est tout à fait vrai. Nombreux sont ces parents qui sous le coup des faix et fardeaux de la vie se déresponsabilisent. Ce n'est pas normal car dit-on souvent que l'enfant est un cadeau du ciel. Il mérite d'être protégé, aimé et éduqué. »

- Macky, je sais que tu penses à ce que je t'ai dit. Mais ce n'est pas grave car j'ai appris du Coran que « Rien ne nous atteindra, en dehors de ce que Dieu a prescrit pour nous. Il est notre Protecteur. C'est en Dieu que les croyants doivent mettre leur confiance. »

- Tout ça est vrai mais tes parents restent tes géniteurs quoi qu'il arrive. Tu ne dois pas les détester. Tu dois les comprendre. Peut-être qu'ils savent pourquoi ils t'ont confié à ce marabout. Certes c'est difficile mais si tu vois bien les choses de plus prêt, tu te rendras compte que tu es très chanceux. Tu apprends le Coran contrairement à d'autres qui n'ont pas eu cette chance.

- Ça va te surprendre peut-être mais moi je suis un autodidacte. Mon marabout ne m'a rien enseigné. J'ai maîtrisé beaucoup de choses par moi-même.

Macky observe avec minutie cet enfant. Il est éberlué et stupéfait. Ses pensées lui disent que cet enfant est venu pour lui montrer la bonne voie.

- Tu vois ce que je te dis. Moi qui te parle, je n'ai pas eu cette chance. Je ne maîtrise pas beaucoup de versets du Coran.

- Il n'est jamais trop tard d'apprendre. Si tu veux, je peux t'aider. Le Coran est le meilleur des remèdes. Il m'apporte de la lumière. Quand je suis triste ou seul, le Livre Saint m'éclaire les zones d'ombres.

- D'accord. Je suis totalement d'accord. J'ai toujours entendu parler des mérites du Coran.

- Je vais t'en donner quelques-un même.

L’Homme ne peut acquérir de noblesse qu’en ce qu’il a mémorisé et compris. C’est pour cela que les détenteurs du Coran sont les Notables de la communauté, les Hommes de l’excellence.