XXIV - Camille

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Aéroport international John F. Kennedy, New York
Mercredi, aux alentours de 22 heures


L'agent français, fraîchement réveillé par le tumultueux atterrissage qui nous a été gracieusement offert par l'équipe de pilotage, mène le cortège jusqu'aux bureaux de la douane américaine le plus naturellement du monde. Accoutumée aux opérations sur le terrain, je perçois la prudence dont fait preuve notre bon Thésée, scrutant discrètement le moindre voyageur de l'aéroport.

Second membre de la cohorte, le professeur Velázquez marche d'un pas rigide, militaire ; la main crispée sur la poignée de son bagage, il regarde droit devant lui, les yeux dans le vague. Je lui intime l'ordre de se calmer.

– Professeur, détendez-vous. Les faux passeports sont de bonne qualité, on va pas finir en taule pour la nuit.

L'officier traitant, semblable à un quelconque autre businessman du terminal John Fitzgerald Kennedy avec son costume anthracite, se retourne avec un grand sourire.

– Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ! Souriez avant que les douaniers vous prennent pour un passeur de drogue. Vous êtes tout crispé.

Peu convaincu, il répond à son sourire, comme s'ils étaient en pleine discussion sur la famille, les femmes et les enfants. Nous avançons d'un bloc vers le poste-frontière situé quelques dizaines de mètres plus loin dans le hall aux lignes blanches, modernes et épurées. Les austères fonctionnaires, aussi accueillants que des chiens de garde, nous posent les questions habituelles dans un anglais sévère, tout en inspectant longuement nos sésames. Alors qu'une douanière s'approche des bagages, je décoche mon plus grand sourire et, avec aplomb, parle en français.

– Passeports diplomatiques.

Sorry, Madam ?

Face à la mine froissée de l'Américaine, je déclare dans un parfait et méprisant franglais digne des plus grands et des plus arrogants émissaires de notre beau pays :

Diplomatic passport. Same chose, enfin. Faites un effort.

Something to hide, Madam ?

Avant que le professeur Velázquez ne rétorque une ânerie sous le coup du stress, Thésée vient à mon secours. Il se lance, échauffé, dans une grande discussion sur les conventions de Vienne et l'immunité diplomatique qui dissuade la douanière de pousser plus loin le vice de ses investigations.

Obligée, elle s'excuse à contre-cœur et nous indique le couloir formel de sortie directe pour les diplomates et hauts fonctionnaires. L'Espagnol s'arrête net à mi-chemin. Le Français s'emporte.

– Qu'est-ce qui vous prend, encore ?

Il ne lui fournit aucune explication, concentré sur un point lointain à l'horizon, par-delà la vitre du couloir d'affaires, parmi le ballet de passagers qui s'engouffre hors de l'aéroport. L'espion le secoue vivement.

– Continuez comme ça, ils vont forcer les valises. Vous êtes défoncé ou quoi, Nicolás ?

– J'ai cru voir Bolkonsky.

Mon sang ne fait qu'un tour.

– LE Bolkonsky ? Le commandant snob du FSB ?

Ses yeux persistent encore un peu, puis ses traits se décrispent. Hagard, il bredouille un élément de réponse.

– Oh. Euh, non, ce... ce n'est pas lui. C'était un Russe qui lui ressemblait.

– Vous êtes sûr ?

L'Énigme Millénaire - Roman (en cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant