Leur Regard | Hyunsung

Chapitre XXI

Aujourd'hui, Jisung a manqué les cours et Hyunjin sait pertinemment que c'est de sa faute. Il sait que c'est de sa faute et pourtant, il n'ira pas s'excuser. Il s'en veut mais n'essaiera pas de se rattraper. Il regrette mais ne fera rien pour changer cela.

Il sait que Jisung lui en veut, et pas uniquement parce qu'il a renversé la carafe dans son plateau. Il a mal agis et il se doutait que le châtain n'allait pas apprécier son comportement. Il ne compte pourtant pas le changer. Il a été clair, il refuse que quiconque sache qu'ils s'aiment. Ses réactions sont peut-être insensés : il s'en fiche.

Il s'en fiche car il a trop peur pour y faire attention. Il est terrorisé à l'idée que l'on découvre son penchant pour les garçons. La peur, elle est au centre de tout. La peur, elle dirige le monde. La peur, elle écrase l'amour. La peur, elle est en train de le détruire.

Dans sa tête, ce sont des images flous qui reviennent. Elles sont effrayantes, ces images. Il y a aussi des sons qui viennent assaillir son esprit. Eux aussi, ils sont effrayants. Les images et les sons se bousculent dans sa tête. Il ne veut pas y penser.

Il se lève et va chercher sa console : s'il joue, ça disparaîtra. Il joue. Ca ne disparaît pas.

Il essaie d'ignorer, peut-être même d'oublier. Il ne peut pas oublier ; malgré les années, il n'a jamais oublié. Ces sons résonnent toujours dans un coin de sa tête. Les images aussi. Ils ne sont jamais partis, il les a dissimulés.

Une nouvelle partie. Un nouvel échec. Game over.

Il réessaie, encore et encore. Il perd à chaque fois. C'est frustrant. Il a envie de jeter sa manette, de quitter la partie. C'est trop énervant de toujours perdre : à quoi bon jouer ?

Il éteint la console. Un long soupir franchit la barrière de ses lèvres tandis qu'il se laisse tomber sur son lit. Les sons. Les images. C'est comme un film. Ce n'est pas une fiction.

Il y a des enfants. Il y a des rires. Il y a de la peur. Les rires sont ceux des enfants, la peur est la sienne.

C'était il y a combien de temps ? Il ne sait plus. La dernière fois qu'il y a pensé, c'était hier.

Il sort ses cahiers. Réviser occupe ses pensées. Ses pensées sont déjà tourné vers autre chose : réviser ne sert à rien.

Pourquoi ces enfants riaient ? Il ne sait plus. Lui, ça ne l'amusait pas.

Il ouvre la fenêtre. Respirer de l'air frais lui fera du bien. Il n'arrive pas à respirer : il suffoque.

Il fait un pas en arrière et s'effondre. Ses yeux sont embués de larmes. Les rires résonnent dans sa chambre. Les enfants sont devant lui, le pointant du doigt.

Il y est : dans ce cauchemar qui fut un jour réalité.

C'était il y a cinq ans. Frêle, pleurnichard, orphelin de mère : personne n'aimait Hyunjin. On l'évitait. Il les évitait aussi. Il ne leur parlait pas. Sauf à lui. Ce garçon toujours souriant qui lui parlait parfois. Ils s'asseyaient sur le banc, à côté du lilas et ils discutaient. Au début, le blond était froid. A la fin, il était trop chaleureux. 

Il y a eu un "je t'aime" et beaucoup de dégout. Le garçon a arrêté de sourire et Hyunjin était seul à côté du lilas. 

L'histoire aurait pu s'arrêter là. Elle aurait dû. Elle ne le fit pas.

Le garçon était bavard et les autres enfants trop curieux. Celui que l'on évitait devint celui que l'on regarde. On le regarde dans les couloirs. On le regarde dans la cours. On le regarde dans la classe.

Sur toutes les lèvres, le nom de celui qui jamais ne parlait.

C'était il y a cinq ans. Il était recroquevillé sur le sol, ils étaient debout à le fixer. Leurs rires étaient malsains, leur regard pourri. Hyunjin ne faisait que trembler, les larmes dévalant ses joues.

Après ce jour, plus personne ne vint s'asseoir sur le banc à côté du lilas.

~•••~

Je pense que c'est mon chapitre préféré ! J'ai adoré l'écrire et je trouve qu'il apporte beaucoup tout en restant assez flou. J'espère qu'il vous a autant plus qu'à moi.

Aussi, je ne vais pas poster la semaine prochaine. J'ai quelques difficultés à écrire en ce moment et je veux reprendre un peu d'avance.

A dans deux semaines ! 👋