3 - Faiblesse

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Je passe une de mes mains sur le drap immaculé, les yeux clos. Je sens le souffle tortueux du vent caresser ma nuque et cette sensation me fait brusquement virer mon regard vers la photo, au fond de la cellule, accroché au mur. Je ne veux pas y repenser, repenser à cette histoire et à tout ce qui m'a en réalité menée ici. 

Claire. Mon souffle se bloque dans ma gorge alors que je serre mes poings sur mes cuisses, grattant la peau, la fêlant de mes ongles. Mon dos, collé au mur, s'en arrache pour le frapper durement. Les pensées, que je ne peux plus stopper à présent, dansent au creux de mon crâne, ivre de mélancolie et de regrets. 

Cette scène à commencé en 2006. J'avais quatorze ans, à ce moment-là. J'étais sûrement trop ignorante, mais je ne pensais pas l'être. J'étais une enfant qui aimait la solitude, jamais, la proximité des autres ne m'avait paru appréciable. Mes parents m'avaient mise en internat pour vivre leurs vies, pleines d'aventures, j'imagine, je ne les ai pas réellement revus, depuis. J'avais un groupe d'amis, mais ne les voyais quasiment pas. J'étais bonne au collège et j'allais obtenir mon brevet avec une mention très bien : c'était tout ce qui m'importait. 

Et un jour de février, il y a eu Claire. Une tornade, un torrent, remuant, déchirant la moindre particule de mon corps déjà meurtrie. Elle a été mise dans la même chambre que moi, à l'internat. J'avais était surprise, mais m'était finalement faire à cette idée, au moment où j'avais compris qu'elle n'était pas du genre à y rester ; dans cette chambre. 

Mais elle avait été interdite de sortie au bout de quelque temps seulement. C'est à ce moment que j'ai commencé à m'inquiéter. J'étais instable et une personne comme elle n'allait pas arranger ma situation. A l'époque, je pensais la détester pour ses attitudes, à présent, je sais que je l'enviais, d'une façon plutôt abstraite. Nous ne nous étions jamais parlées, à part les formalités, et un jour, soudainement, sournoisement, elle s'est glissée dans ma vie. Elle m'a dit que je l'intriguais et je ne lui ai pas réellement répondu. Ou peut-être un « oh », soufflé, puis rapidement perdu. Et, ensuite, elle avait déclaré « tu sais, tu ne me fais de peine à rester seule de cette façon, mais j'aimerais te faire vivre. Tu vois ? Nous n'avons sûrement pas la même définition de vivre, mais faire ce que tu fais, ne correspond à aucune des possibilités. On pourrait être amie ? » 

Cela m'avait remué au plus profond de moi-même. Parce qu'elle avait volontairement voulu être mon amie, chose que jamais moi ou quelqu'un d'autre n'avait même envisagé comme possible. J'avais accepté, naïvement. Je ne savais simplement pas ce qui m'attendait, de l'autre côté de cette colline nommé Claire. Avec le temps, je ne pense pas regretter, j'aurais simplement aimé prendre ses paroles sous un autre angle, enfin, sous leur réel angle. 

Et nous avions mordu la vie à pleines dents, férocement, parce que c'est ce qu'elle disait le mieux, pour nous deux. Je l'ai crue, même si c'était une mauvaise idée. J'exécutais le moindre de ses ordres comme une simple esclave, sous le pouvoir de cette fille attirante. Plusieurs fois, l'internat avait menacé de me virer. Elle leur riait au nez, et je riais avec elle, ne me préoccupant pas des conséquences. En réalité, je n'en avais rien à faire, des conséquences. Je n'imaginais même pas qu'il puisse en avoir. 

C'est l'année d'après, que tout à commencé à basculer. Lentement, délicatement, pour ne pas que je ne puisse pas le voir venir. Claire et moi, nous enchaînions les soirées et fêtes, avec des « amis avec elle ». Je lui en découvrais tellement, qu'après un moment, je finis par abandonner mon envie de tous les rencontrer. Je rencontrais ses amis et plus cela arrivait, plus je me sentais inconfortable avec cela. Elle m'imposait un rythme de vie insupportable : assister aux cours, danser, boire, puis se coucher pour deux heures, avant de reprendre, sonné par ce réveil insupportable qui réveillait mes migraines brûlantes. 

ClaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant