Partie 9 - Le linge.

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Quand il revint à la geôle, les amis de Julien étaient encore attablés en train de jouer aux cartes. Il leur sourit d'un air forcé et ceux-ci le saluèrent comme à leur habitude, lui indiquant qu'ils n'avaient pas dû parler à son frère depuis qu'ils s'étaient engueulés chez eux. Ceux-ci se replongèrent aussitôt dans leur partie de carte et il balaya la geôle du regard jusqu'à ce qu'il trouve Aurélien. Le plus petit était allongé à même le sol, dans un coin un peu plus reculé de la cellule, dans les bras de sa sœur. Celle-ci le serrait fortement à elle et il pouvait voir son lapin en peluche écrasé ainsi contre leurs deux corps. Cette fois-ci, il n'eut pas envie de rire à la vision du doudou. Aurélien avait l'air de beaucoup y tenir. Il se força à détourner le regard quand il entendit Victor l'appeler :

« Oh, Guillaume.

— Mm... Qu'est-ce qu'il y a ?

— Une petite partie ?

— D'accord, pourquoi pas. Mais après je retourne à mon livre. »

Victor et Thomas rirent de sa réponse et il haussa les épaules, se moquant de la vision qu'ils pouvaient avoir de lui. Soudainement, il n'y avait qu'une seule personne à qui il voulait paraître bien. Qu'il voulait impressionner. Et ce n'était certainement pas eux.

***

Il se réveilla plusieurs heures plus tard, la tête dans ses bras croisés, et il fut surpris de voir qu'il s'était endormi. Il ne s'en rappelait pas. Il se tourna vers les amis de son frère en entendant des ronflements et il vit que ceux-ci avaient disparu. Il se tourna alors brusquement vers la geôle de peur de voir que le roi et la princesse avaient disparu de même mais il les trouva aussitôt du regard. Bien réveillés d'ailleurs. Aurélien lui tournait le dos et en se tournant vers sa sœur, il vit que celle-ci lui montrait comment faire un noeud entre deux bouts de tissus blancs.

« Comme ça, oui... Mais serre plus, il ne faudrait pas que ça lâche pendant qu'on est dessus.

— Qu'est-ce que vous faites ? » ne put-il alors s'empêcher de leur demander et il vit le plus jeune se tendre avant de se tourner vers lui.

Aurélien lui lança un regard effrayé de derrière sa frange noire et il se leva alors pour voir ce qu'ils faisaient de plus près.

« Non, on ne fait rien du tout ! s'exclama Elisabeth en se levant à son tour pour venir à sa rencontre et il vit le jeune roi lancer un regard hésitant à sa sœur avant de l'empêcher de s'approcher plus de lui.

— C'est faux. Et il le sait, ça ne sert à rien de mentir, Elisabeth... »

Il le vit se lever à son tour avant de se mettre à marcher dans sa direction alors que sa sœur le regardait d'un air inquiet et cherchait maintenant a son tour à le retenir près d'elle :

« Aurélien... Qu'est-ce que tu fais...?

— Non, s'il veut savoir, je vais lui dire, répondit ce dernier en se dégageant de son emprise et il le vit marcher jusqu'à lui, un bout de tissu dans les mains. Tu vois... Guillaume, c'est bien ça ? lui demanda Aurélien dans un petit sourire et il hocha la tête alors qu'il sentait son cœur rater un battement en l'entendant l'appeler par son prénom. Et bien, Guillaume, tu vois on ne compte pas rester sagement assis ici, à pourrir dans cette cellule, jusqu'à ce que vous décidiez qu'aujourd'hui, c'est le bon jour pour nous tuer. Vous avez tué mon père, votre Roi, vous avez tué ma mère, votre Reine, alors je suppose que c'est pas la mort d'un prince ou d'une princesse de plus qui vous dérangera. Alors on a décidé de tenter le tout pour le tout pour s'échapper de cette prison.

— Et par s'échapper, je suppose que tu parles de passer par cette fenêtre ? Avec du linge ? dit-il en haussant les sourcils en remarquant enfin que les bouts de tissu que Aurélien tenait dans ses mains étaient en réalité leurs deux chemises de nuit. Ça ne suffira jamais vu la hauteur de la fenêtre. Et en bas, vous avez les douves. Vous risquez de vous noyer. Si vous ne vous tuez pas avant. »

Aurélien jeta un regard hésitant en direction de la fenêtre avant de se tourner de nouveau vers lui :

« Tu as une meilleure solution ? Parce que je n'attendrai pas que tes amis nous tuent. S'il faut prendre le risque, je le prendrai. C'est ce que je pense être le mieux. »

Il hocha la tête et réfléchit un instant. Il s'était dit qu'il voulait agir pour ne pas avoir plus de sang sur les mains qu'il n'en avait déjà. C'était le moment apparemment.

« Je comprends. Et ce ne sont pas mes amis. Seulement ceux de mon frère... crut-il bon de préciser sans trop savoir pourquoi. Je crois avoir une idée. Je vais vous aider en allant chercher des vêtements chez moi qu'on peut utiliser. Il faut que cette... corde de linge soit la plus grande et la plus résistante possible pour ne pas craquer sous votre poids et vous permettre d'atteindre la terre ferme. Mais je ne pourrais pas faire plus. Si mon frère apprends que je vous ai aidés, c'est moi qu'il fera guillotiner. Il m'a déjà prévenu.

— D'accord... Je ne t'en demandais pas tant.

— Je sais. Mais ça me tient à cœur de vous aider à sortir d'ici. Car c'est en partie de ma faute si vous êtes prisonniers ici depuis des jours déjà. Surtout toi, dit-il en plongeant dans les yeux sombres du plus jeune avant de se reprendre. Enfin... vous, mon roi. »

Aurélien sembla surpris de l'entendre dire ça et il n'attendit pas sa réponse avant de tourner les talons. Il fallait qu'il se dépêche avant que son frère et ses amis reviennent. Allez savoir combien de temps ils avaient encore.

Fiction OrelxGringe - Royauté. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant