Partie 22 - Le couronnement.

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« Guillaume, non... Je t'en supplie... »

Il arrêta son geste en entendant Aurélien dans son dos lui dire ça d'une voix suppliante. Il tenait en joue les derniers révolutionnaires, ceux-ci ayant été désarmés et lui et quelques autres hommes ayant pris leurs armes après les avoir encerclés. Il se força à ne pas se retourner pour regarder Aurélien, sachant pertinemment bien qu'il ne pourrait pas aller contre sa volonté s'il croisait son regard larmoyant. Un peu plus tôt, quand il avait vu ce révolutionnaire entraîner de force Aurélien avec lui jusqu'à l'estrade sur laquelle se trouvait la guillotine, il avait perdu tout contact avec la réalité. La douleur dans son épaule s'était tue afin de lui permettre de se focaliser uniquement sur le plus jeune et il s'était rué vers lui pour le sauver des griffes de son agresseur. Il avait réussi à atteindre le révolutionnaire juste au moment où ce dernier allait lâcher la corde reliée à la lame de la guillotine et quand il l'avait poussé et lui avait planté son épée dans le ventre pour le forcer à lâcher le jeune roi, il avait attrapé ce dernier par le tissu de son vêtement en entendant la lame descendre à toute allure en direction de sa nuque. Il avait eu tellement peur, et quand Aurélien lui était tombé dessus, il avait vu une de ses mèches de cheveux voler dans les airs, coupée par la machine. Ça aurait pu être sa tête, voilà ce qu'il s'était dit alors qu'il l'avait serré de toutes ses forces contre lui, le cœur battant la chamade dans sa poitrine à sortir de cette dernière. Aurélien avait éclaté en sanglots, terrorisé par ce qu'il venait de se passer, et il avait senti son cœur battre à toute allure contre le sien. Aurélien avait failli mourir. Parce qu'il n'avait pas fait attention. Parce qu'il n'avait pas été assez bon. C'était impardonnable.

« Je suis désolé, mon roi, dit-il lentement, se forçant littéralement à ne pas se tourner vers lui. Vous êtes trop bon. Si on laisse ces monstres en vie, demain ils fomenteront un autre plan pour vous donner la mort et renverser le royaume. Cette idée m'est insupportable. Je ne peux décemment pas les laisser en vie. Pas après tout ce qu'ils nous ont fait vivre ces dernières années... Peut-être me détesterez-vous pour cela. Je préfère cela à vous savoir en potentiel danger de nouveau. »

Il murmura ensuite feu et les révolutionnaires encerclés tombèrent morts à ses pieds. Dans son dos, il entendit Aurélien faire un pas en arrière de surprise, et il baissa la tête tristement. Il allait le détester maintenant. Mais il n'avait pas le choix. Il entendit la voix d'Elisabeth s'adresser à son frère, lui parlant du couronnement, et il jeta un regard discret par-dessus son épaule en relevant légèrement la tête. Aurélien avait les larmes aux yeux, ceux-ci rivés sur lui, et il vit sa sœur devoir littéralement le tirer par la main pour qu'il accepte de s'éloigner enfin. Aurélien...

***

« Guillaume ? entendit-il près d'une heure plus tard une voix féminine l'appeler alors qu'il tendait difficilement à ses blessures assis sur les marches menant au château de nouveau occupé par la famille royale et quand il releva la tête, il fut étonné de voir la sœur d'Aurélien.

— Elisabeth ? Qu'est-ce qu'il y a ?

— Tu te doutes de ce qu'il y a, non ? répondit cette dernière en lui souriant doucement. Il veut te voir.

— Aurélien ? Vraiment ?

— Oui. Il a dit qu'il voulait que ça soit toi qui le couronne. Il a même rajouté qu'il laisserait personne d'autre que toi approcher ses mains de sa tête, rit la jeune femme. Alors vas-y, dépêche-toi. Le roi n'attend pas. Ni le peuple. Ou le destin. »

Il hocha la tête lentement, encore un peu confus, et se leva des marches pour se diriger vers l'intérieur du château. Avant de se retourner vers Elisabeth, un petit regard hésitant sur le visage :

« O-Où c'est qu'il...?

— Le balcon de sa chambre. Allez, fais vite. Tout le monde t'attend. »

Il acquiesça et se mit en marche vers la chambre du plus jeune qu'il savait être à l'étage. Alors qu'il se dirigeait vers cette dernière, il se souvint de cette nuit-là où il s'était immiscé dans le château en compagnie de son frère et de ses amis afin de kidnapper la famille royale. Jamais il n'aurait dû se laisser embarquer dans ce plan horrible. Et en même temps... s'il ne l'avait pas fait, qui sait si Aurélien serait toujours en vie aujourd'hui. Juste quand il pensa à lui, il passa le pas de la porte fenêtre qui menait au balcon de la chambre du jeune roi et il fut littéralement ébloui par lui. Aurélien était habillé tel un véritable roi, tout de bleu et d'or vêtu, les lys dorés semblant danser sur le bleu de sa tunique et tenant des fleurs blanches dans ses mains jointes. Sa mèche blanche était rassemblée en une petite tresse serrée dans ses cheveux noir ébène et il sentit sa respiration se couper devant sa beauté quand Aurélien se tourna vers lui, un petit sourire hésitant sur les lèvres :

« Tu es magnifique, Aurél... » laissa-t-il échapper dans un souffle et celui-ci exhala un petit rire discret en fermant les yeux avant de faire un signe de tête pour lui montrer quelque chose derrière lui, un sourire gêné sur les lèvres.

Il se tourna et aperçut alors le prêtre qui semblait n'attendre plus que lui et il s'excusa prestement avant de prendre la couronne dorée que celui-ci portait sur un petit coussin blanc. Le prêtre acquiesça alors et tous trois s'approchèrent du bord du balcon afin que le peuple puisse voir la cérémonie du couronnement. Aurélien s'agenouilla alors devant lui sur le cousin que plaça le prêtre au sol à ses pieds et il se perdit dans sa contemplation alors que le prêtre commençait à réciter quelque chose en latin. Aurélien lui sourit doucement avant de fermer les yeux et il balaya son visage vierge de toute impureté du regard. Caché ainsi sous ses cheveux longs, personne ne pouvait apercevoir son arcade blessée, comme sa taille sous sa tunique royale. Quand le prêtre s'arrêta de parler, il prit une profonde inspiration et porta la couronne aux cheveux ébène du plus jeune, qu'il sentit d'ailleurs trembler à son approche.

« Le roi est mort... vive le roi. » murmura-t-il dans un souffle à l'intention seule d'Aurélien et celui-ci rouvrit les yeux pour l'observer, des larmes coincées au coin de ceux-ci.

Soudain, une clameur s'éleva de la foule en contrebas et il fut surpris d'entendre après plusieurs secondes des gens s'écrier la même phrase que lui.

Le roi est mort ! Vive le roi !

Il aida alors Aurélien à se relever en lui présentant sa main et il l'attira à lui afin qu'il puisse voir son peuple hurler leur joie. Ce dernier les observa longuement sans rien dire avant de se tourner vers lui, un doux sourire sur les lèvres malgré les larmes qu'il avait au bord des yeux :

« Merci, Guillaume... Merci pour tout. »

Il se demanda ce que ce remerciement signifiait réellement, mais n'eut pas le temps de le lui demander, Aurélien s'étant déjà retourné vers la foule en contrebas pour la saluer. Aurélien... était à présent couronné. Il était le roi légitime de France, cette notion admise par tous. Il avait réussi.

Fiction OrelxGringe - Royauté. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant