Epilogue

77 1 0
                                    

  Nous sommes jeudi matin et c'est aujourd'hui que la cérémonie pour nos amis disparus va être célébrée. Le ciel nuageux que j'aperçois à ma fenêtre, accompagne mon esprit embrouillé.

   Aucun bruit ne résonne dans le manoir. Rien ne me rattache à cette réalité que je tente de fuir. Depuis le jour de leur mort, je fais tout pour les écarter de mes pensées, tout pour refouler ces sentiments.

   La douleur, celle qui vous arrache le cœur, déchirant vos entrailles et ne laissant qu'à la fin une coquille vide, sans vie. La tristesse qui vous tord l'estomac, vous réduisant au silence. Et cette colère, qui brûle à l'intérieur de vous, annihilant toute autre émotion. Vous permettant ainsi de tenir le coup, encore un jour.

   Tout nous ramène à un état sauvage, primitif, où les émotions sont synonymes de mort. Ces moments dans ma vie me rappellent la raison de ma présence, et mon rôle à tenir. Ils me disculpent de mes torts passés, en justifiant ma volonté à maintenir une frontière entre le monde et moi.

   On peut mourir à n'importe quel instant, et cette vérité est encore plus réelle dans notre vie. Alors, pour m'épargner des souffrances inutiles, j'ai depuis longtemps laissé les émotions aux oubliettes. Cloisonnant mon esprit et mon cœur à l'essentiel pour survivre, l'instinct de survie, et la faim.

   Je m'habille d'une longue robe noire en dentelles dont les manches opaques ne laissent pas apercevoir mes bandages. Attachant un collier en or à mon cou, je m'observe dans le miroir. Sous mes yeux bleu glacier sont apparus des cernes au cours des derniers jours.

   Le bronzage de l'été a disparu, laissant un teint pâle et meurtri par quelques cicatrices. Malgré mon état de fatigue discernable à l'œil nu, aucune marque de chagrin n'est visible.

   J'enfile des gants noirs identiques à ma robe et rejoins nos amis dans le salon. Tous apprêtés de noir, puisqu'une autre couleur aurait été déplacée aujourd'hui. On peut facilement remarquer les personnes qui contiennent difficilement leur douleur. Que ce soient les lunettes de soleil, les regards absents ou même les mouchoirs dans les vestes, chaque personne a un signe distinctif lorsqu'il souffre.

   Je m'approche de mes bras droits, ce sont bien les seuls à afficher un visage froid et neutre dans le salon avant mon arrivée.

   L'ambiance lourde et triste me pèse sur le cœur. Je n'ai qu'un souhait à cet instant, sortir prendre l'air et échapper à cette sensation désagréable de tristesse générale. Je prends les mains de mes bras droits et les regarde.

   Tous deux habillés de costard entièrement noir, ils me fixent de leurs yeux bruns et me montrent dans un infime moment leurs souffrances. Je serre leurs mains pour montrer mon soutien et esquisse un sourire d'encouragement.

   Aujourd'hui plus que jamais, c'est sur moi et ma famille que comptent toutes les personnes dans cette salle. Lorsque notre clan est en danger, ou qu'il souffre, c'est notre devoir de faire en sorte que tout aille pour le mieux. De rassurer, ceux qui remettent leurs vies entre nos mains.

   J'aperçois dans un coin Frank avec Gustave, ils sont eux aussi en costumes comme toutes les personnes dans cette salle. Ils me saluent d'un bref hochement de tête lorsqu'ils croisent mon regard. Lauren est avec son père et ils se chuchotent des mots qu'ils me sont impossibles d'entendre d'ici, mais que je suppose être d'encouragement.

   Dans notre grand salon, se forment plusieurs groupes de personnes, tous ont délaissé leur travail et nous ont rejoints spécialement pour ce jour.

   Dans un cortège silencieux, nous rejoignons la plus grande pièce du manoir. Cette salle a vu de nombreuses personnes et de cérémonies être célébrée. Que ce soient les naissances, les mariages, les anniversaires, ou les décès.

Mafia la Rose des VentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant