Chapitre 11

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L'affluence dans l'immense établissement médical n'avait pas baissé le lendemain de l'attentat. Les médecins étaient toujours aussi actifs et les patients toujours aussi nombreux, parfois entassés à quatre dans une chambre qui n'en supportait que deux. Les proches des blessés engorgeaient les couloirs et sollicitaient incessamment les bureaux d'accueil ou les infirmières de passage. Les escaliers et les ascenseurs ne connaissaient aucun répit.

Les deux derniers étages étaient plus tranquilles. Dans sa chambre, Miwa venait de passer sa première nuit dans le coma. Son état ne s'était pas amélioré, mais il ne s'était pas non plus empiré. Daisuke l'observa pendant une bonne partie de la nuit, bien installé sur l'un des fauteuils dans un coin de la chambre. A ses côtés, son grand-père occupait le canapé et s'était recouvert d'un léger drap. Lui non plus ne put trouver le sommeil. Les deux hommes discutèrent longuement de ce qu'ils avaient pu vivre ces dernières heures : les souvenirs de la seconde guerre mondiale, le drame de Saya, l'existence d'Harumi et son père adoptif Akiro, et l'attentat du Shibuya.

Le réveil au petit matin fut douloureux. Ce n'était pas une sonnerie de téléphone portable mais les premiers rayons du soleil qui les firent émerger. Les aveuglants rayons venaient frapper leurs yeux clos à travers les baies vitrées qui ne possédaient ni rideaux ni volets. Paradoxalement, cela leur faisait du bien. Ils purent se réchauffer de leur froide nuit. Mais la fatigue se faisait ressentir.

Le docteur Sakamoto toqua légèrement puis entra.

« Bonjour messieurs, avez-vous bien dormi ? leur dit-il le nez dans des feuilles.

- Pas vraiment, répondit Daisuke, les yeux froncés, passant sa main dans ses cheveux sculptés par le sommeil. Où sont les toilettes ?

- A gauche, quelques mètres plus loin, vous verrez, c'est indiqué. »

Daisuke prit sa trousse et s'y rendit pour se débarbouiller, alors que Kazuki ne parvenait pas à se relever pour l'imiter. Il le fit remarquer à Sakamoto, qui s'attardait sur les résultats cardiaques et cérébraux de Miwa enregistrés pendant la nuit.

« Regardez, je n'ai pas l'énergie suffisante pour me redresser, lui montra-t-il en essayant de s'appuyer sur ses bras.

- Restez allongé, je vais faire un rapide diagnostic de votre état de santé. »

Le docteur prit le matériel adéquat et ausculta le vieillard.

« Combien d'heures estimez-vous avoir dormi cette nuit ? lui demanda-t-il.

- Je ne sais pas... marmonna Kazuki. Moins de quatre heures je dirais.

- Bien, c'est ce que j'imaginais. Votre tension est basse et vous n'avez pas assez récupéré. Vous avez besoin de vous reposer et de vous alimenter. Je vais vous hospitaliser pour que vous puissez retrouver une excellente forme.

- Je suis passé par toutes les émotions hier, et notre voyage en train m'a épuisé, soupira le vieillard, voilà ce que ça me coûte. Combien de temps cela durera-t-il ?

- Deux, voir trois jours maximum » rassura le docteur.

Daisuke était de retour. Il apprit par lui-même l'hospitalisation de son grand-père en les entendant depuis le couloir. Il n'en fut pas surpris. Il l'avait senti vidé de son énergie, et son âge très avancé ne pardonnait aucun écart.

Gentiment, Kazuki fit une requête à Sakamoto, assis à ses côtés.

« Mettez-moi dans cette chambre, face à Miwa.

- Bien sûr, je vais chercher un lit dans une chambre voisine », lui dit-il.

Daisuke attendit la sortie du docteur pour chuchoter à son grand-père.

Souvenirs d'HiroshimaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant