Chapitre 14

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Quelques minutes passèrent dans la plus grande excitation. Miwa était désormais sortie de son lit. Tous les outils médicaux qui lui permettaient de rester en vie avaient été débranchés et retirés de la chambre par deux infirmières. Elle se tenait debout et remerciait Sakamoto pour le travail et les gardes effectués. Le docteur, déboussolé, cachait sa grande satisfaction de la voir en bonne santé et préféra rapidement s'éclipser. Il ne souhaitait pas participer à la fête. Jamais, depuis le début de sa carrière, il n'avait vu de guérison aussi soudaine et aussi complète. La médecine n'avait dans ces cas-là plus aucun rôle, plus aucune crédibilité.

C'était effectivement un miracle, comme se plaisait à dire Daisuke, qui se tenait droit aux côtés de sa cousine, pendant que les deux vieillards les observaient, des étoiles dans les yeux. Les deux parties de la famille Saito, séparées quelques mois après le bombardement atomique de 1945, et qui ne s'étaient jamais rencontrés, étaient désormais réunies. Il manquait une génération à ces retrouvailles, celle des jumeaux Kenjiro et Harumi, mais leur père ne rata pas la belle occasion de les joindre aux retrouvailles.

« J'aimerai avoir une pensée pour mes deux enfants qui ne sont plus parmi nous, mais qui, je suis sûr, nous regardent en compagnie de Saya. Pensons fort à eux. »

Tout le monde se tut. Kazuki prit Miwa dans ses bras et l'embrassa sur le front. Daisuke les rejoignit. Akiro hésita un instant mais fut invité par le vieillard. Les quatre s'enlaçaient et se faisaient des baisers. Kazuki marmonna doucement une prière. Akiro la trouvait déplacée mais respectait les croyances de son vieil ami. Ce n'était surtout pas le moment de se fâcher. C'était un moment d'union. Il le serra plus fort.

Daisuke sortit son smartphone et fit quelques pas de recul.

« Mettez-vous tous les trois, oui, comme ça, alignés, je vais vous prendre en photo et l'envoyer à Yuji et Megumi.

« Mais, tu ne seras pas avec nous dessus, répondit Akiro.

- Ce n'est pas grave, ils me connaissent déjà assez, rigola-t-il fortement. Allez, faites un grand sourire ! »

Un petit flash sortit du smartphone. Daisuke prit une seconde photo, au cas où la première était ratée.

« A ton tour Daisuke, je vais te prendre en photo avec eux, proposa Miwa.

- Bon, d'accord » souriait-il, ne se faisant pas prier.

Sa joie se lisait sur son visage. C'était le plus heureux. Il se positionna entre les deux vieillards, mit ses bras sur leurs épaules et sortit son plus grand sourire. Un flash les éblouit.

« Je dois vite me remettre au lit, calma Kazuki. Je suis exténué. Continuons la fête demain matin, je suis vieux maintenant. Je ne tiens pas très longtemps le soir.

- C'est vrai, ajouta Akiro. Je vais aller me recoucher aussi. Mais je ne sais pas si je retrouverai le sommeil rapidement. Quel bonheur de te revoir, ma belle Miwa, lui dit-il en lui caressant sa joue.

- Impossible d'aller me coucher, s'exclamait Daisuke.

- Moi non plus, je pense avoir suffisamment dormi ! rigolait-elle.

- D'ailleurs, Miwa, j'ai une question à te poser avant que je ne l'oublie, répliqua Kazuki, montant péniblement dans son lit.

- Oui, dis-moi.

- J'aimerai savoir... Comment as-tu trouvé la vie de ta grand-mère biologique pendant toutes ces heures de coma ? Je suis sûr qu'elle t'a raconté de belles choses. »

Les trois hommes ne remarquèrent pas que Miwa n'avait pas été mis au courant de leurs liens de parenté et avaient fêté les retrouvailles comme si de rien n'était, emportés par l'excitation. La dernière fois qu'elle avait parlé à l'un d'eux, c'était avant l'attentat. Mais pendant son coma, on lui avait parlé de sa vraie famille, en plus de la vie de sa grand-mère biologique. Elle non plus n'avait pas remarqué qu'il manquait une étape entre son réveil et les accolades qui suivirent. C'était donc naturellement que les évènements s'enchaînèrent.

Souvenirs d'HiroshimaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant