La première chose que Leo entendit en rentrant chez lui ne fut pas rassurante : rien. Un silence lourd et pesant semblait régner, alors que tous les signes pointaient vers le contraire. La voiture de son père était garée dehors et sa mère ne lui avait pas dit qu'elle allait sortir, alors pourquoi n'entendait-il rien ? Pourquoi la télévision était-elle éteinte alors que lorsqu'il rentrait, elle avait tendance à être allumée ? Ses parents dormaient-ils ?
Puis il entendit la voix de sa mère provenir de la salle à manger, faible et... Triste ? « Leo ? »
Quelque chose n'allait vraiment pas. Il se dépêcha d'enlever ses chaussures et marcha d'un pas rapide vers la pièce, où il vit sa mère en larmes et son père cachant son visage. Il resta figé dans l'encadrement de la porte, ne sachant quoi dire. « On est mal... Très ma... » Elsa craqua.
Leo se précipita vers la table pour s'asseoir sur la chaise la plus proche de sa mère, s'assit et posa son bras maladroitement sur ses épaules. De l'autre, il tenta d'atteindre son père, qui ne bougea pas d'un pouce. Son visage était toujours dissimulé par ses mains.
Au bout d'une trentaine de secondes qui paraissaient bien plus longues, Hugh se redressa, puis expira longuement. Ses yeux étaient rouges, signe qu'il avait pleuré devant sa femme, mais le fait qu'il s'était ressaisi et qu'il réussit à parler calmement montrait à Leo qu'il n'avait pas l'intention de lui révéler ses faiblesses. Les Davis étaient des hommes fiers et rares étaient les personnes à les avoir vu dans des situations où ils montraient véritablement leurs émotions. « Le... Commissariat va nous laisser partir à la fin du mois. On va recevoir des indemnités de départ, mais je ne pense pas que l'on sera en mesure de tenir bien longtemps. »
Le garçon avait du mal à imaginer la situation. Ses pensées alternaient rapidement entre le positif et le négatif, au point qu'il ne savait pas s'il devait sourire, pleurer ou hurler. La seule pensée claire qui lui traversa l'esprit fut : au moins personne n'est mort...
Longtemps il hésita entre dire quelque chose ou se taire. Leo savait que la moindre phrase mal placée blesserait profondément son père et il ne souhaitait pas aggraver la situation. Il attendit que quelqu'un dise quelque chose, mais la minute qui suivit fut la plus inconfortable qui soit. Hugh regardait le plafond d'un regard vide, Elsa continuait de pleurer en silence et Leo ne put qu'observer la scène, impuissant.
Le silence fut enfin interrompu lorsque Hugh se mit à rire nerveusement. Il lança un regard malicieux à son fils, puis dit « J'espère que tu n'as pas peur des sacrifices et des pâtes. On risque d'en bouffer ! »
Leo ne sut comment réagir. Il imaginait que son père essayait de trouver une façon de voir les choses du bon côté, mais il voyait bien que le désespoir s'était emparé de lui. À 47 ans, Hugh était encore un homme d'action ; voir son rêve s'envoler du jour au lendemain était un coup dur. Et au vu de son âge assez avancé, il savait qu'il aurait beaucoup de mal à trouver un nouveau travail. Subvenir aux besoins de sa famille pendant encore quelques années avec de simples indemnités de chômage allait être une épreuve pour tout le monde.
Leo ne put que faire un sourire gêné. Hugh le remarqua, et comprit ce que ressentait son fils. « Boh, c'est pas grave ! On survivra, ne t'inquiètes pas. C'est sûr que ce serait mieux si on pouvait gagner de quoi sortir plus régulièrement, mais bon, on fera sans. » Puis, pour essayer de changer de sujet, il demanda maladroitement « Sinon, ta sortie s'est bien passée ? »
Leo ne pouvait plus rester silencieux, il devait parler, et si possible essayer d'égayer la maison. « Heu, oui, ça s'est bien passé. J'ai euh... Vu des trucs et c'était sympa. » Ce n'est pas suffisant, il faut faire diversion ! « Oh, et sinon on m'a montré une vidéo sur le net d'un truc adorable ! Faudrait que je vous la montre tout à l'heure ! »
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Les Chroniques de Loutre-Monde Remastered - Tome 1 : Bienvenue à Dyisia !
FantasíaDéconseillé aux moins de 10 ans. Un jour d'hiver à Bordeaux. Un jeune homme se réveille couvert de sang au beau milieu de la rue Sainte-Catherine et constate qu'il a été victime d'un accident de la circulation. Pourtant, il n'est pas blessé. ...