Chapitre XXII : Le chercheur qui détestait tout le monde

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(Artiste : Enissaceb, Twitter)

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(Artiste : Enissaceb, Twitter)



Pour sa thèse finale, Tighnari devait se rendre à la frontière entre le désert et la forêt tropicale, afin d'étudier la composition du Mur de Samiel, érigé il y a des millénaires par l'Archon Dendro elle-même. Ce vaste regroupement de falaises sombres qui délimitait les deux régions principales de Sumeru était époustouflant vu de près, les pics abruptes qui s'érigeaient vers ses extrémités donnaient des frissons rien qu'à l'idée de les frôler. Même les fongus, qui en temps normal s'adaptaient très facilement à tout type d'environnement, ne venaient s'établir contre ces parois de bois brun et ferme. L'endroit était certainement le plus désertique de tout l'océan de sable de la zone au soleil carnassier, le fennec pouvait encore s'estimer heureux que les effets de la chaleur se fassent moins ressentir dans le périmètre où il devait étudier. Armé d'une cape légère mais suffisante pour recouvrir la plus grande superficie de son corps, y compris ses longues oreilles qu'il dut rabattre contre l'arrière de son crâne, les rayons ne l'angoissaient presque plus, il prônait fièrement sur l'un des tas de grains jaunes, observant de son promontoire le reste du paysage qui s'étendait à perte de vue. L'horizon vibrait comme la corde d'une cithare, témoin de la fièvre ambiante du pays, observer les roches dangereuses se dresser au loin et le ciel d'un azur profond se brouiller dans les crevasses donnait le mal de mer à l'hybride. Il avait beau apprécier ce spectacle, il avait toujours son expérience datant de son enfance au travers de la gorge, il avait fini par s'évanouir après tout, tout ça à cause d'un pelage trop foncé pour supporter une température aussi élevée. Ce problème n'était cependant plus d'actualité, l'entièreté de sa fourrure était déjà abritée par le tissu spécialement conçu pour lutter contre les intempéries de la savane. Il n'avait plus qu'à se focaliser sur ses recherches, après avoir digéré le fait de remettre les pieds dans un endroit aussi sinistre. Parfois, lorsqu'il apercevait les dunes au loin ou les ruines d'anciens temples sacrés par les Dieux, il repensait à Cyno et à leur court temps passé ensemble. Il était originaire du désert après tout, sa peau portait même l'odeur du soleil qu'il traînait toujours dans son passage, même si cela faisait plusieurs années depuis leur dernière rencontre, Tighnari gardait toujours précieusement les souvenirs qu'il avait pu fabriquer aux côtés du jeune matra intrépide. Il l'avait cherché partout dès que l'occasion s'était présentée à lui, déterminé à trouver une personne aussi brillante, paisible et aimante que l'adolescent aux cheveux argentés. En vain, il n'avait su déceler dans les sourires des gens autour de lui, ni dans leurs blagues, ni dans leur façon de lire leurs livres, une once de ce que représentait son ancien meilleur ami à ses yeux. Il avait l'impression d'avoir été séparé de l'autre moitié de son âme, comme un explorateur fou, il fouillait dorénavant chaque recoin de ce monde pour y dénicher l'entièreté de son être, quelqu'un pour le combler de nouveau. Peut-être que leur amitié avait été trop parfaite pour qu'il puisse aspirer à en construire une nouvelle, tout aussi jouissive et enrichissante, car jamais ses attentes n'avaient été comblées par ses pairs, bien que nombreux d'entre eux aient tenté de l'approcher et de créer un lien plus fort avec lui. L'épiderme de Cyno avait la même couleur que les nuées de sable qui s'élevaient dans les airs, remuant la poussière et les débris d'anciens vestiges divins sur leur sillon, chaque parcelle de son environnement semblait vouloir le ramener un peu plus à l'époque de ses quatorze ans, quand il n'avait pas encore conscience de la cruauté qu'est l'amour, sous toutes ses formes. Encore à cet instant précis il n'était parvenu à deviner l'immense affection anormale qui grandissait en lui depuis le début, les premiers instants de leur relation, rejetant la faute sur une connection trop spontanée, un coup de chance rare qui n'arrive qu'à peu de personnes et nous permet d'évoluer aux côtés d'un individu idéal pour nous. Il n'avait jamais envisagé l'habitant du désert de manière non platonique, il était donc effectivement compliqué de se rendre compte de ses sentiments naissants. Il soupira en scrutant une dernière fois la ligne entre la terre et la voûte, puis se mit à gratter un morceau d'écorce qu'il récolta dans un tube à essai. Le but était de récupérer le plus de copeaux possibles, et ce dans un panel d'endroits différents, cette tâche prendrait des jours à lui tout seul, donc il se devait de travailler en groupe avec d'autres étudiants de l'Amurta.

Le commandant qui m'aimait - [CYNONARI]Where stories live. Discover now