35.

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 Mezzanine aspira une profonde bouffée de fumée. Il avait oublié à quel point les premières semaines qui suivaient la rentrée étaient éprouvantes. Il y avait toujours chez les petits nouveaux des âmes innocentes qui attiraient à eux les damnés sans même s'en rendre compte lorsqu'ils s'éveillaient à leurs spécificités. Mais eux ne les entendaient pas grogner et chuchoter jusqu'au fond de leur sommeil. Ils ne les entendaient pas pleurer et supplier.

Ponce aurait dû arriver il y a déjà un moment et il n'avait pas pour habitude d'être en retard. Il avait beau être volage, il savait honorer ses contrats... habituellement. Quelque chose avait dû le retenir. Nicotine hésitait depuis un moment à lui envoyer un message. Il n'avait pas envie de forcer, mais il n'avait pas non plus envie de rester seul.

Il entendit des petits coups tapés à la porte. Ça, c'était pas Ponce. Le botaniste avait plutôt tendance à ouvrir la porte à la volée sans penser une seconde que quelqu'un puisse se trouver de l'autre côté.

Mezzanine hésitait. Il n'avait pas envie d'être seul, mais il n'avait pas non plus envie d'une conversation gênante avec un petit nouveau. Il sentit une froideur dans sa main et prit aussitôt sa décision. Il savait que c'était un mort. Il avait appris à pouvoir les voir sur commande, mais il ne parvenait pas encore à verrouiller ses autres sens et si on avait décidé de le tourmenter, il préférait encore une discussion gênante aux caresses glaciales de la mort.

« Ah désolé, j'ai cru qu'il y avait personne ! »

Nicotine n'avait pas eu le temps d'arriver jusqu'à la porte. Étoiles avait pris l'initiative d'entrer. Mezzanine ne put s'empêcher de remarquer qu'il avait l'air dans un état encore plus déplorable que la dernière fois qu'il l'avait vu. Des cernes impressionnants, le teint pâle, les cheveux en bataille... Son cœur se serra, ce n'était jamais agréable de voir quelqu'un dépérir.

« T'inquiète, y a zéro souci. De toute façon je me suis fait lâcher par Ponce.

— Ah, Ponce est pas là ?

— Non... tu le cherchais ?

— Euh, pas particulièrement. »

Nicotine n'aurait su dire s'il était déçu ou soulagé de l'absence de son collègue. En tout cas, il fallait qu'il demande plus d'explications au sudiste quand il en aurait l'occasion. Est-ce qu'il était déjà parvenu à ses fins ? Ça expliquerait l'état désastreux dans lequel se trouvait le première année.

« Du coup, tu venais avec quelque chose en tête, ou t'as vu de la lumière et t'es entré ?

— Non, quand même pas, sourit Étoiles. J'avais juste un peu besoin de me changer les idées, et j'avais préparé une set list sur laquelle je voulais m'entraîner un peu...

— Ah, bah écoute, le matos est pas du tout en place donc si t'as la patience de me voir tout brancher, on peut faire ça.

— Ah déso. Je savais pas que c'était chiant à mettre en place. Non, mais laisse tomber, je viendrais en prévenant à l'avance, je veux pas te faire chier avec ça.

— Tu me fais pas chier, sinon, je te le dirais, crois-moi.

— T'es sûr ?

— Mais oui, t'inquiète. Si tu veux je peux même te montrer comment tout installer, comme ça tu pourras même t'entraîner quand je suis pas là.

— Ah ouais, trop bien ! »

L'exclamation manquait d'énergie, mais pas d'entrain. Elle arracha même un petit sourire fatigué à Étoiles. Mezzanine avait vraiment envie de le serrer contre lui et de lui offrir un peu de répit. Mais c'était sûrement le soulagement de ne plus entendre toutes ces voix dans sa tête qui parlait pour lui. Apparemment, l'aura de mage d'Étoiles avait définitivement la particularité d'intercepter les ondes de l'outre-monde.

Nos Étoiles MystèresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant