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Airelle

Je ne cesse de penser à la discussion, si on peut appeler ça comme ça, que j'ai eu avec ma mère quelques heures auparavant.

Je ne lui avais jamais parlé de cette façon, mais je ne regrette absolument pas. J'ai comme l'impression d'avoir retiré un poids qui me gênait plus qu'il ne l'aurait dû.

Je pleure toutes les larmes de mon corps même si je sais que si c'était à refaire, je le referais. Mais une part de moi aurait voulu que ma mère soit plus présente et qu'elle ne soit pas là que pour me donner des ordres comme elle a l'habitude de le faire. Dans la multitude de livres que j'ai pu lire, la protagoniste s'entend toujours hyper bien avec sa mère, elles ont une complicité d'enfer. Je les envie tellement. J'aurais tellement aimé que ma mère...m'aime.

Je sèche mes larmes du revers de la main, mais celles-ci retombent de plus belles sur mes joues et je me mets à hurler dans ma chambre comme une sauvageonne. Plus rien ne compte autour de moi. Je n'entends que mes hurlements de haine, mais surtout de douleur face à la sensation de ne pas être aimée par ma propre mère.

Je hurle à m'en déchirer la voix, mais je m'en fiche. Je veux me faire mal pour que toute cette douleur parte.

Puis, quand je n'arrive plus à hurler, je retire d'un geste brusque mon Sweat que j'ai enfilé un peu avant. Je me regarde dans le miroir qui me fait face et prend la mauvaise décision d'aller jusqu'au bout de ce que je comptais faire. D'un coup, je plante mes dents dans ma chair et me mords jusqu'à ce que le sang s'invite à la fête. Je recommence plusieurs fois jusqu'à ce que je ne ressente rien d'autre que la douleur que je m'inflige moi-même.

Je me regarde une nouvelle fois dans le miroir, mais tout ce que je vois, c'est ma ressemblance avec celle qui m'a infligé cette douleur. Je reprends de plus belle, mais cette fois-ci, j'attrape un trombone, avant de le déplier. J'enfonce le côté pointu dans ma chair, mais toujours rien. Je ne vois qu'elle dans ma tête et je continue. Je ressors et le replante.Tu sais très bien que tu ne gagneras pas à ce petit jeu avec moi, Airelle ! Je ressors et le replante. Un souvenir tellement loin me revient d'un coup et même si mon corps est toujours dans ma chambre, mon esprit lui est à des années lumières.

***

Mon corps est allongé dans un lit d'hôpital. Je ne peux pas bouger, ni même parler, c'est comme-ci mon corps était paralysé. J'ai peur, je ne me souviens de rien, et personne n'est auprès de moi.

Plus le temps passe et plus je me dis que personne ne viendra pour moi. Aucun médecin, ni infirmières n'est venu me voir. Aucune personne à qui je tiens n'est venue me rendre visite, pas même ma mère.

D'un coup, la porte s'ouvre avec fracas. Ma mère déboule dans la pièce avec tellement de haine que j'en tremble. Sa tenue impeccable comme toujours, mais son regard est noir.

- COMMENT AS-TU PU ÊTRE AUSSI INSOUCIANTE ? J'AI TELLEMENT HONTE DE TOI ! JE N'AI JAMAIS VU QUELQU'UN D'AUSSI CONNE ! JE N'EN PEUX PLUS DE TOI ! SI SEULEMENT JE NE T' AVAIS PAS EUE, TOUT AURAIT ÉTÉ BEAUCOUP PLUS SIMPLE ET JE N'AURAIS PAS EU UN BOULET POUR FILLE ! me hurle ma mère.

Les larmes dévalent mes joues face à ses dures paroles. Je ne sais toujours pas ce qu'il se passe, mais je sens sa main se lever et deux secondes plus tard, elle claque contre ma joue que je sens désormais.

Mon cœur loupe un battement, et mes larmes redoublent.

- TU AS TUÉ UNE FILLE ! TU TE RENDS COMPTE ? MON BOULET EST UNE MEURTRIÈRE ! J'ESPÈRE QUE TU LE REGRETTERAS TOUTE TA VIE, CAR TU VIENS DE PERDRE LA SEULE CHOSE QUI SOIT DISANT, COMPTAIT POUR TOI ! ET JE NE PARLE PAS DE MOI, BIEN SÛR, MAIS DE CETTE PETITE PESTE QUE TU CONSIDÉRAIS COMME TA MEILLEURE AMIE ! ELLE EST MORTE À CAUSE DE TOI !

***

Je m'effondre sur le sol et me mets à hurler de plus belles. D'un geste irréfléchi, j'attrape tout ce qu'il y a à ma portée et les lance à travers ma chambre. Le chagrin que je ressentais face à ma mère n'était rien comparé au déchirement que j'avais connu lors de ce jour qui m'était réapparu d'un coup.

Je n'arrive plus à me contrôler et décide de monter sur le toit de ma maison. Le vent de la nuit me fouette, mais je n'en ai rien à faire, je ne reculerai pas. J'ai assez retardé ce moment, j'aurais dû le faire cette nuit-là quand j'ai appris qu'elle m'avait quittée.

Mes pieds martèlent le toit en pente de la maison que j'ai toujours connue. Cette maison qui m'a vue au plus haut, comme au plus bas. Je venais souvent m'asseoir ici avec Léane pour contempler le soleil se coucher et se lever. Je n'y étais jamais vraiment revenue depuis. Mais, aujourd'hui j'y viens pour la dernière fois de ma vie.

Je me penche pour voir le sol en béton quelques étages plus bas.

- J'suis désolée Léane.. tout est de ma faute ! J'suis désolée maman d'avoir gâché ta vie comme tu as précipité la mienne vers sa fin...

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