Chapitre 8 -Véritable nature

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Se dirigeant aisément dans les couloirs de la riche demeure, qui, lorsqu'on ne la connaissait pas, ce qui était le cas des personnes qu'il guidait, pouvaient paraître assez labyrinthiques, Tanguy conduisit les invités les plus récemment arrivés pour la réception, une famille de trois personnes, jusqu'aux appartements des convives préparés pour l'occasion.
Habituellement jovial et loquace, échangeant sur tous les sujets dès que l'occasion se présentait en s'efforçant de respecter les convenances pour ne pas risquer d'outrepasser sa fonction de domestique – certains se plaignaient déjà qu'il ne savait pas tenir sa langue – l'adolescent ne se sentait actuellement guère à l'aise.
En effet, les invités dont on l'avait chargé étaient des étrangers ne maîtrisant le français que sommairement. Du moins, c'était ce que Tanguy en avait déduit à partir de leur accent fortement prononcé mais ils s'exprimaient bien mieux dans cette langue que ce que le garçon pensait. Cette déduction, bien que fausse, suffisait pour que Tanguy n'ose pas vraiment leur adresser la parole, craignant qu'ils ne saisissent pas ses propos et qu'il ne les dérange. Sans compter que cette famille paraissait inquiète.
Evidemment, Tanguy ne connaissait pas le moindre mot d'anglais mais leur préoccupation se devinait autrement qu'à travers la conversation qu'ils menaient entre eux, par leur attitude quelque peu anxieuse, leur regard soucieux et leur ton inquiet. Quelque chose avait dû se produire durant leur trajet du port jusqu'ici.
Même si cela n'était pas censé le concerner et qu'il savait qu'il aurait plutôt dû se comporter comme le domestique qu'il était à ne pas se mêler des affaires de ceux qu'il servait, Tanguy ne pouvait s'empêcher de se sentir intrigué et de se questionner à ce sujet. Ce n'était pas uniquement de la curiosité mais c'était également au cas où il aurait pu apporter son aide même si il ignorait ce qu'il aurait bien pu faire exactement.
Revenant se concentrer sur sa tâche, le jeune homme poussa la porte et s'efforça de présenter la pièce de façon simple pour que ces étrangers le comprennent, ce qui se révéla assez compliqué.
Au moins, ceux étant arrivés la veille parlaient parfaitement français, étant même originaires de la région, sauf la jeune fille venue d'Afrique à la peau ébène, surtout la blondinette à l'enthousiasme débordant avec qui il avait longuement échangé, ayant trouvé quelqu'un capable de prononcer les mots avec un débit supérieur au sien.
Ne se sentant donc guère à l'aise avec cette impression de ne pas parvenir à trouver les bons termes pour se faire comprendre de ses interlocuteurs, Tanguy fit une grimace désolée en se tordant les mains, mais, le rassurant, la femme lui adressa un sourire bienveillant en lui assurant, dans un français quelque peu maladroit, néanmoins pas autant que ce à quoi s'attendait Tanguy, que tout était parfait et elle l'en remercia.
Retrouvant sa bonne humeur à cette affirmation, Tanguy effectua une révérence courtoise, bien que simple, en les priant de ne pas hésiter à le faire savoir si ils avaient besoin de quoi que ce soit en précisant que tous les domestiques de la demeure se trouvaient à leur entière disposition. Satisfait que ce soit ce soit finalement déroulé plus simplement que ce qu'il craignait, Tanguy s'en fut en refermant la porte derrière lui et il se demanda comment s'occuper jusqu'à ce qu'on lui confie un autre travail dont s'occuper.
Peut-être que Martial accepterait de converser quelques minutes avec lui, selon le temps qu'il aurait de disponible.
Il admirait tellement le capitaine de la garde qu'il s'efforçait toujours de pouvoir passer un peu de temps en sa compagnie ou alors de lui rendre service, espérant seulement que l'ancien militaire apprécie ce qu'on aurait pu nommer sa dévotion et ne soit pas lassé de sa présence s'accrochant perpétuellement à lui.
Hésitant encore à aller le trouver, se demandant si il aurait quelques instants à lui accorder et si il ne s'agacerait pas de le voir encore venir s'agripper à lui, Tanguy commença à s'éloigner dans le couloir mais pas de beaucoup car on l'invectiva.
D'après l'accent clairement audible dans la voix, Tanguy devina qu'il s'agissait d'un des trois invités qu'il venait d'amener à leur quartier avant même de se retourner pour tomber face au fils du couple, un jeune homme un peu plus âgé que lui d'environ quatre ans qui était celui paraissant le plus préoccupé des trois.
Venant à la hauteur de Tanguy, il sembla chercher ses mots pour s'adresser à lui, devant préalablement traduire ses propos en français dans son esprit avant de s'exprimer, ce qu'il fit quelque peu malhabilement :

Les Yeux du Pouvoir - Tome 6 : Couleurs passé [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant