Chapitre 10 - Mauvaise place [2/2]

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Ce n'était pas Aaron qui avait besoin de pardon, cependant, Gabriel se sentait impardonnable. Si il voulait avoir un jour la chance de connaître le pardon, il devait travailler à l'obtenir, le mériter. Pour ce faire, il lui semblait que le meilleur moyen était de réparer les torts qu'il avait causé.
Pour Aaron, les choses étaient déjà engagées mais il préférait lui dire verbalement qu'il ne lui tenait nullement rigueur pour tout cela et lui présenter ses excuses.
Pour Chrissy, l'ampleur des dégâts devait certainement être plus importante. Pour commencer, il allait falloir qu'elle accepte qu'il l'approche, ensuite, il devrait la consoler – la connaissant, elle était probablement en larmes – puis lui expliquer la situation dans les détails en justifications de la colère qu'il avait manifesté envers Aaron et, enfin, se mettre à genoux pour espérer qu'elle le pardonne.
Pour terminer, il devait régler la pire des séquelles de son inconséquence, l'arrestation d'Eléanora. Cependant, s'en charger semblait compromis pour ne pas dire totalement impossible. Pourtant, Gabriel refusait de l'accepter et de se résigner à ne rien pouvoir y faire. Il avait déjà grandement souffert de son impuissance la veille alors il était hors de question qu'elle le paralyse de nouveau, et encore plus qu'Eléanora en paye les conséquences. C'était de sa faute si elle avait été découverte par l'inquisition alors c'était à lui de remédier à cette situation, quoi qu'il lui en coûte.
Il tenait à affronter ses responsabilités et à agir comme quelqu'un protégeant les autres, non comme quelqu'un qui les poussait vers le fond par son inconscience. Il devait absolument tout tenter, bien que, pour l'instant, il ignorait de quelles possibilités il disposait exactement puisque tout ceci méritait réflexions et que la prise de conscience de sa culpabilité, le secouant, ne lui avait pas encore laissé le temps de réfléchir.
De toute manière, pour le moment, il allait d'abord s'occuper de ce qu'il était de l'ordre de l'aisément et possiblement réalisable, en plus facilité par la proximité. En effet, un étage, la distance était facilement comblée.
Fort de cette résolution, motivé par cette idée d'une rédemption active, Gabriel essuya ses larmes, qui s'étaient mises à couler sans qu'il ne s'en aperçoive, en prenant une profonde inspiration, s'efforçant de se reprendre, puis il se releva, s'étant laissé glissé au sol dans sa détresse, et gravit les escaliers jusqu'à la chambre de Chrissy.
Se montrant attentionné, surtout après le comportement honteux qu'il avait tenu dans la salle à manger, il frappa quelques coups contre la porte sous laquelle filtraient des pleurs, augmentant encore sa culpabilité qui favorisa le retour de sa nausée. Chrissy ne répondit pas mais Gabriel se permit néanmoins d'entrer, ne pouvant la laisser sangloter seule, surtout alors qu'il était celui qui avait causé ces larmes.
Il découvrit une forme recroquevillée sous les draps qui tremblait à cause des sanglots. Gabriel serait bien redescendu pour recevoir cette gifle qu'Aaron lui avait épargné en se contenant, plus qu'amplement méritée, ou alors il se la serait bien administrée lui-même.
A la place, il s'assit sur le bord du matelas, à côté de cette boule qui pleurait, et posa une main douce sur ce qu'il imaginait être sa tête en l'appelant doucement, mais elle ne réagit pas, se repliant encore davantage en resserrant les draps autour d'elle. Visiblement, elle comptait l'ignorer ou, en tous cas, elle n'avait pas l'intention de lui adresser la parole, une réaction logique après qu'il l'ait blessé de la sorte.
Cherchant tout de même un moyen de nouer le dialogue – il devait lui présenter ses excuses – il réfléchit à la façon de l'apaiser, comme le grand frère qu'il était pour la jeune fille. Pour commencer, il tenta de soulever les draps, mais sans succès comme Chrissy s'y accrochait fermement pour les garder rabattus sur elle. Même si il doutait de l'efficacité de la technique, Gabriel insista en l'appelant de nouveau, la suppliant, toujours sans succès.
Finalement, il se jeta sur la jeune fille, l'attrapant pour la couvrir de chatouilles, ce à quoi elle ne put résister, éclatant de rire en se débattant. Satisfait de lui avoir arracher une réaction autre que des larmes, Gabriel cessa puis l'aida à se redresser, l'extirpant des draps. Elle rit encore quelques secondes puis l'éclat amusé dans ses yeux, violets comme bien souvent, mourut et elle se mordit les lèvres, retenant un nouveau sanglot.
Gabriel la prit dans ses bras en lui frottant le dos pour la réconforter, d'abord physiquement puis verbalement en déclarant :

Les Yeux du Pouvoir - Tome 6 : Couleurs passé [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant