Les bruits de fond à la cantine les empêchaient de bien s'entendre entre eux.
— T'as dit quoi ? demanda Sasha une fois de plus, luttant pour entendre la réponse d'Adrian au milieu du brouhaha.
Adrian, amusé, répéta sa phrase, lançant un regard complice à Sasha. Il rit en observant la scène se répéter. Cette fois-ci, Sasha hocha la tête plusieurs fois, signe qu'il avait finalement compris. Ils prirent leur temps pour savourer chaque bouchée de leur repas tout en continuant leur conversation, veillant à articuler suffisamment pour se comprendre malgré le tumulte ambiant. Après quelques minutes d'échanges, ils se levèrent alors qu'Eryn et Roseanne faisaient leur entrée. Les deux jeunes filles s'installèrent aux côtés des garçons, Roseanne à côté d'Adrian et Eryn à côté de Sasha, renforçant ainsi la dynamique du groupe.
— Vous comptiez partir avant qu'on arrive, commença Eryn en s'asseyant. C'est pas cool ça.
Sasha se mordit la lèvre nerveusement en écoutant Eryn puis s'excusa pendant qu'il rigolait. La discussion reprit de son plein, il parlait de tout et de rien comme de vieux amis qui ne s'étaient pas vu depuis des années. Eryn s'amusait à taquiner Sasha, son ami d'enfance, et Roseanne se plaignait de leur attitude auprès d'Adrian. La scène était plutôt drôle à voir. Petit à petit, la cantine
se vidait et à la fin, il ne resta plus que les 4 amis attendant quelqu'un ou quelque chose.
— Alors avec Felix ? demanda finalement Sasha en voyant la cantine se vider.
Roseanne regarda Sasha comme si elle n'avait pas entendu la question et commença à prendre des couleurs. Elle rigola nerveusement et fixa ailleurs en se mordant la lèvre inférieure, pensant à son bien aimé.
— Je sais pas trop. finit-t-elle par répondre.
Le rire joyeux de Sasha résonna dans la cantine, faisant écho à la situation. Il plaisanta sur le fait que cela faisait dix ans que leur histoire n'avançait pas beaucoup et qu'elle n'avait jamais songé à lui dire. Roseanne, toujours en proie à la gêne, rit en déviant son regard. Pour dissiper le malaise, elle se gratta l'arrière de la nuque.
— Tout va bien aller ! Je suis sûr qu'il t'aime ! dit Adrian à son amie.
Roseanne esquissa un sourire reconnaissant envers Adrian avant de reprendre son repas. Cependant, au fil des bouchées, elle commença à montrer des signes d'inconfort croissant. Son appétit semblait s'estomper, et son visage trahissait une lutte intérieure. Elle se battait avec des démons personnels liés à son image corporelle. Les complexes avaient engendré divers troubles, et malgré les efforts de ses amis pour l'aider, elle se débattait avec cette bataille intime. Finalement, elle déclara qu'elle n'avait plus faim, et cela provoqua un regard attristé d'Eryn, qui percevait la douleur
dissimulée derrière le sourire de Roseanne. Roseanne était l'une de ces personnes qui dissimulait soigneusement ses formes, s'enveloppant constamment dans des vêtements amples. Elle évitait les miroirs autant que possible, détestant l'image qu'ils lui renvoyaient. L'idée de montrer son corps aux autres la terrifiait. Pourtant, malgré ses luttes, Felix ne l'avait jamais jugée. Ce simple acte de compréhension et d'acceptation avait peut-être contribué à faire naître des sentiments amoureux chez elle.
Soudain, du coin du regard, les deux filles remarquèrent la même chose. Il était arrivé et seul pour une fois, Damien et Arthur venaient de le quitter. Le brun arriva et déposa son plateau sur la largeur de la tableau de sorte à être au milieu du regard de tout le monde. Il recula sa chaise et s'assit dessus. Ses cheveux avaient poussés entre temps, tout comme ceux d'Adrian, leur octroyant assez de cheveux pour faire une queue de cheval. Il était arrivé avec une de ces prestance que seul les nobles avaient. Il fixa tout le monde dans les yeux et chacun leur tour, ils baissèrent leur regard, ne voulant pas se mélanger avec son regard froid et vide de toute vie.
Roseanne était la seul qui avait baisé son regard pour une différente raison. Felix l'avait regardé avec ce regard, ce regard qui lui disait qu'il ne méritait pas de l'aimer et ce regard l'avait légèrement mis mal à l'aise. Elle ressentit un léger pincement au cœur et se colla un peu plus à Adrian. Felix releva le regard et s'appuya sur le dossier de la chaise. Il souffla.
— Vous avez quelque chose à me dire pour me regarder comme ça ? demanda-t-il.
Ses taches de rousseurs lui donnait toujours cet aspect innocent. Personne n'osait parler...Adrian finit par lever le regard et répondit à Felix.
— Non non, tout va bien. Tout va bien...
Eryn ressentit la tension grandissante chez Sasha alors qu'elle prenait doucement sa main. Les doigts de Sasha crispés trahissaient son anxiété. Une secousse régulière agitait sa jambe, une vieille habitude qui persistait lorsque l'inconfort prenait le dessus sur lui. La nervosité de Sasha était palpable, comme une prémonition silencieuse de quelque chose d'indésirable sur le point de se dérouler.Felix, de son côté, laissa échapper un soupir audiblement résigné. Un signe de contrariété qu'il exprimait rarement. Se redressant pour être plus à l'aise, il montrait ainsi que la situation à venir nécessitait son attention. La scène dépeignait un climat tendu, les deux amis réagissant chacun à leur manière face à l'imminence d'un événement défavorable.
— Je pars. dit-il d'un ton monotone.
Les gestes et la respiration de chacun se coupèrent. Felix venait de prononcer les mots redoutés par tous. Sasha serra la main d'Eryn afin de ne pas se mettre à pleurer. Roseanne, quant à elle, avait gardé les yeux écarquillés car elle ne croyait pas ce qu'elle venait d'entendre. Elle connaissait cette envie que Felix avait de vouloir partir. Mais elle ne savait pas où, elle pensait que ce voyage n'était qu'une passade et qu'il allait finalement s'annuler. Le son d'un reniflement parvint aux oreilles de tout le monde et tout le petit groupe se tourna tous vers Roseanne.
— Tu pars où ? demanda Roseanne en sanglotant.
Felix se leva et tourna le dos à ses amis. Soudain, Roseanne se leva et serra les poings.
— Felix !
Ce dernier s'arrêta.
— Tu pourrais pour une fois faire comme si tu t'intéressais à nous ? J'ai... Juste besoin que tu agisses comme si tu t'inquiétais pour moi pendant une seconde.
Les sanglots de Roseanne résonnaient dans la pièce, révélant la détresse qu'elle tentait de retenir depuis trop longtemps. Sa voix, brisée, tentait de capter l'attention de Felix, mais celui-ci, impassible, restait de marbre. Un mélange d'impuissance et de frustration s'exprimait à travers les poings serrés de Roseanne, cherchant désespérément une réponse dans le regard insensible de Felix.
Les yeux du brun se tournèrent enfin vers Roseanne, mais aucune émotion ne s'y reflétait. Son visage restait imperturbable, comme si les supplications de son amie n'avaient aucune prise sur lui. La distance émotionnelle entre les deux amis semblait insurmontable. En quête de réconfort, Roseanne se tourna vers Adrian, dont les bras enveloppants tentaient d'apaiser sa peine. Son étreinte chaleureuse offrait un soutien qui contrastait avec l'indifférence de Felix. Les larmes de Roseanne trempaient le tissu de la veste d'Adrian alors qu'elle essayait de faire face à la réalité de la situation.
La scène fut triste à voir pour tout le groupe. Derrière la porte de la cantine, se cachait en réalité deux personnes : Damien et Arthur. Il écoutait la conversation depuis le début.
— Est-ce que ça à été pareil pour toi ? demanda Damien.
— Oui, répondit Arthur. Je ne pensais pas que une simple décision pouvait provoquer tant de tristesse chez les gens.
Roseanne essuya ses larmes. Felix recula de quelques pas pour bien voir ses amis une dernière fois. La nuit commençait à tomber. Le campus devenait silencieux mais seul le petit groupe restait éveillé. Felix se tourna et ouvrit les portes du réfectoire.
— Ne vous attendez pas à me revoir de sitôt.
De dos, il fit un dernier signe de main à ses amis avant de s'engouffrer dans l'obscurité du couloir. Damien et Arthur se levèrent, les sacs sur leur dos et ils suivirent Felix, prêt pour le voyage le plus éprouvant de leur vie. Tout cela, se passa sous les regards dépités des quatre autres jeunes adolescents.
— Tu ne leur dit même pas au revoir ? demanda Damien.
— Ils sont assez grands maintenant, ils n'ont plus 9 ans.
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Crépuscule d'un Ange Déchu [TERMINÉ]
Paranormal"ㅡ L'amour est une émotion d'une cruauté sans égale, surpassant la tristesse et la colère. D'abord magnifique, il devient soudainement cruel, manipulateur, épuisant, blessant et aveuglant... Même si tu vis une longue vie heureuse avec quelqu'un qui...