Crépuscule d'un Ange Déchu [TERMINÉ]

Chapitre XVII

 — Mais... Est-ce que tu l'aimes vraiment ? demanda sa meilleure amie en rangeant les barrettes de ses cheveux, ornées des mêmes pierres étincelantes que son collier, mais d'une subtilité étourdissante.

Eryn, posée sur son lit, hocha vigoureusement la tête. Elle sentit l'air passer à travers son léger chemisier presque transparent.

— Tu les as pris ? demanda Roseanne pendant qu'elle peaufinait son maquillage.

— De quoi ?

— Tes cachets... Pour ton mal de tête. Tu m'as fait un carnage hier soir.

Un fou rire éclata lorsque les filles se remémorèrent les événements de la veille. Plus tard, alors que les rires s'étaient éteints et que seuls les bruits des étudiants dans les couloirs résonnaient, Eryn contempla son reflet tandis que sa meilleure amie continuait à se maquiller.

— Est-ce que je l'aime vraiment ? se demanda-t-elle.Tout s'était passé relativement vite. Elle avait ressenti une connexion et avait décidé de dire qu'elle était tombée amoureuse de lui. Après avoir réfléchi quelques secondes à sa propre interrogation, elle se rendit compte qu'il y avait bien plus que cela. Elle était

amoureuse de lui depuis assez longtemps pour affirmer qu'elle l'aimait vraiment. Il y avait certes une connexion, mais il y avait aussi son caractère. Son air un peu niais la rendait complètement folle. Ses goûts atypiques pour l'art, ses tics, son style, sa façon de communiquer, ses petits gestes du quotidien... Tout cela, et bien plus encore, la rendait follement éprise de lui, de Sasha.

— Tu comptes le lui dire quand ? demanda Roseanne en terminant son maquillage.

— Franchement, je ne sais pas du tout... J'aimerais beaucoup lui dire avant que Felix ne revienne. répondit Eryn.

— Felix...

Roseanne secoua la tête pour chasser de mauvais souvenirs, car elle essayait tant bien que mal de les oublier, sans succès. Son visage, sa voix... Elle ne pouvait vraiment pas l'effacer de sa mémoire. Eryn se leva et secoua les cheveux de Roseanne.

— Arrête d'y penser ! Je te vois, Rose ! dit-elle en secouant la tête de son amie.

— Hum....

Eryn ne prit pas la peine de sophistiquer sa tenue. Elle sortit avec Roseanne de leur chambre et se dirigèrent vers celle de Sasha. Elles toquèrent toutes deux en rythme, mais personne ne répondit. Roseanne ouvrit la porte et se rendit compte qu'il n'y avait personne.

— Bah tiens, il est passé où ? demanda Eryn.

— C'est dingue ça, il n'est jamais là quand on a besoin de lui.

— Qu'est-ce qu'on fait ? On ne va pas le chercher dans toute l'université ?

— Non, je pense que l'on devrait faire autre chose. On le croisera bien un jour ou l'autre.

Les filles s'occupèrent chacune à leur manière. Sasha et Adrian étaient plongés dans une partie acharnée d'un jeu de cartes dans la chambre d'Adrian. Les victoires étaient partagées, Sasha remportant trois manches contre deux pour Adrian. Ils entamaient la dernière partie de leur série. Chaque carte posée par Sasha était suivie d'une riposte d'Adrian, créant une tension palpable dans l'air.

— Héhé, t'es mort ! J'ai gagné ! dit Adrian en levant la main, prêt à poser sa dernière carte.

— Tu gagnes toujours, c'est pas juste.

Au même moment, la porte s'ouvrit, et Eryn, qui venait chercher Adrian, aperçut Sasha assis à côté de ce dernier. Elle s'approcha de lui avec de grands pas avant de le gronder en lui reprochant de ne pas avoir été dans sa chambre.

— Tu me fatigues à jamais être là où on t'attends.

— Hé ! Mais j'y peux rien. On est dimanche, j'allais pas passer toutes ma journée dans ma chambre.

— Sors de nul part encore une fois et je vais raser ton

afro. Tu vas voir.

Sasha esquissa un sourire moqueur.

— Parce qu'en plus tu te fous de moi. On va voir qui rigolera en dernier.

Sasha gloussa. Après l'avoir sermonné, Eryn s'assit à côté de son ami, et après plusieurs secondes de réflexion, elle se décida enfin à déposer sa tête sur l'épaule de Sasha. De là, elle parvenait à sentir l'agréable odeur qui émanait de ses cheveux. Elle avait aussi une vue dégagée sur les cartes en main de son ami, et quand ce fut à son tour de jouer, elle lui souffla à l'oreille :

— Joue celle de droite.

Sasha réfléchit un petit moment, puis se décida à jouer cette carte. Il la déposa, et quand Adrian vit la carte, il comprit vite que ce coup ne venait pas de Sasha car il ne jouait pas de cette façon. Il finit par sourir et avoua sa défaite : 4-2. Sasha avait gagné et remercia Eryn d'un petit sourire en retour. Au même moment, Roseanne entra dans la pièce, surprise de les retrouver tous ensemble. Elle s'incrusta parfaitement dans l'ambiance et s'assit à côté d'Adrian, son repère sans Felix, et Eryn.

En voyant la tête d'Eryn sur l'épaule de son amoureux, Roseanne sourit bêtement, contente pour son amie. Adrian, quant à lui, se rongeait le bout des doigts, frustré... Frustré de ne pas l'avoir, frustré de voir qu'elle commençait à aimer un autre, frustré de se rendre compte que ses sentiments n'étaient pas réciproques.

Roseanne tapota le genou de sa meilleure amie afin de l'inciter à lui prendre la main. Eryn fit d'abord non de la tête, puis en sentant la main de Sasha caresser sa tête, elle se dit que finalement, elle pouvait tenter sa chance. La tension entre les mains de Sasha et d'Eryn était palpable. Il était évident qu'ils voulaient se tenir la main, mais l'un était trop timide, et l'autre trop fière. Eryn ferma les yeux et rapprocha ses doigts de ceux de Sasha. Elle commença d'abord à toucher son index, puis elle fut surprise de réaliser que la personne qu'elle aimait accompagnait le mouvement. Leurs mains étaient désormais liées. Eryn ne parvenait pas à fixer Sasha.

Malheureusement, tout cela s'était déroulé sous les yeux d'Adrian. Ses yeux impassibles avaient observé toute la scène. Il finit par se lever.

— Tu vas où ? demanda Roseanne.

— Je reviens ! Je pars deux secondes me chercher un petit truc et je reviens, ne vous inquiétez pas. répondit Adrian. Je suis de retour dans quelques secondes

Oh si. Ils devaient s'inquiéter. Si seulement ils connaissaient ses intentions, si seulement ils n'avaient pas été là à observer, si seulement il n'était pas de nature si réservé, si seulement il n'était pas parti, si seulement il ne l'avait pas encouragée, si seulement elle n'existait pas, si seulement il était resté, si seulement il n'était pas mort... Peut-être que cette série d'événements malheureux aurait pu être évitée.