33. Téha.

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Aliah a un je ne sais quoi de fascinant dans la douceur qu'elle m'offre. Elle saisit mon bras, le serre légèrement et m'enjoint à la suivre. Je jette un regard à Ray. Il est fâché et cela me blesse plus que je ne l'imaginais. Le départ de Queen aussi, mais lui, je l'ai bien cherché. Je sais qu'il ment, qu'il a peur d'Eytiri. Son aura laisse toujours une légère ombre de bleu dans ses nuances. Quelles qu'elles soient ! Je les vois et rien ne peut être caché.

Mon hôte m'entraîne dans le couloir et me souffle à l'oreille :

— Ta chambre est à l'autre bout du couloir. Mais... je crois que tu as besoin de prendre un peu l'air, avant de te coucher. La nuit est claire, profite pour observer les étoiles. Elles sont belles et regorgent de messages à l'attention de tous.

Je la dévisage pas sûre de comprendre son propre message.

— Quels messages ?

Elle m'offre un sourire mutin et tapote légèrement ma tempe du bout du doigt.

— Ceux cachés dans nos souvenirs, notre corps, notre ADN.

— Je n'ai pas le pouvoir de fouiller ainsi en moi.

— Les étoiles sont l'adresse. Regarde-les.

Elle m'abandonne avec ses devinettes d'enchanteresse au beau milieu du couloir. Je soupire et lorgne sur le salon, dont la baie ouverte laisse passer une petite bise chaude et un parfum qui m'est familier. Je jette un œil autour de moi, quitte ma place et rejoins la terrasse. Cette odeur me parle et je déploie un peu de patience pour renifler profondément l'air. Je ferme les yeux et soupire. C'est celle du cinglé !

Je ne sais pas pourquoi elle m'est parvenue, alors que cette maison est remplie d'inconnus dont les odeurs toutes nouvelles devraient me submerger. Je baisse les yeux sur mes mains et me rends à l'évidence que je suis comme Queen. Nous avons en commun un ADN métamorphe et rien que ça, ça joue sur mes instincts que je ne maîtrise pas. Ce qui veut dire que ma part animale reconnaîtra toujours l'odeur d'un congénère.

Bon, je n'ai plus qu'à partir à la recherche du cinglé. Nous devons parler, lui et moi. Il est mon chaperon, donc il doit connaître certaines choses à mon sujet. Il est assez vieux pour m'avoir déjà vu avant ces derniers jours. Mais comment suivre son odeur dans la bonne direction ? Je ne suis pas au fait de la façon dont il faut procéder. Enfin, c'est pas comme si je ne connaissais pas ses relents. J'ai passé plus de temps avec lui ces derniers jours, qu'avec Ray.

Si je suis, moi aussi une métamorphe, je dois avoir mes sens plus développés. Sauf que jusqu'ici il n'y a eu rien de très probant à ce niveau ! La concentration est une règle assez simple et pas trop difficile à observer. Je m'applique donc à saisir les nuances parfumées du puma psychopathe, en fermant les yeux. Une sorte de mélange de terre, de bois, de musc et d'un peu de sueur. Je prends une grande inspiration et repère une concentration plus forte qui percute mes narines. J'ouvre les paupières et ma vue fait une mise au point. Je perçois alors une fumée brillante, un filet de vapeur qui flotte devant moi. Il s'échappe de la terrasse et s'enfonce dans le jardin sombre. C'est stupéfiant et intriguant à la fois.

Je fais un pas en direction des ombres sauvages et descends de la terrasse illuminée. Quand mes pieds touchent le sol herbeux, je m'immobilise. Est-ce une bonne idée de rejoindre le cinglé dans le noir ? Après tout, il est en colère contre moi, si je me retrouve coincée dans les jardins avec un psychopathe qui pourrait m'arracher la gorge d'un coup de croc, il n'est même pas pensable que j'en réchappe.

Pourtant je me sens terriblement coupable de l'attaque d'Eytiri. Et il faut que nous en parlions. Dans la voiture, sur la route du trajet, avec sa musique de merde nous n'avons pas eu l'occasion de soulever le sujet. Il est sur la réserve, froid et sa moquerie me manque, quoi que j'en dise.

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