Chapitre 53. Queen.

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Ray a débarqué comme si finalement lui seul comptait face à l'horreur de la situation. Téha est là, inanimée dans mes bras et aucune musique ne compose son être. Son cœur ne bat plus, son sang ne circule plus et ses yeux sont éteints. Je sais qu'elle n'est pas morte. Le fragment brille autour de son cou. Je sais qu'elle est coincée quelque part dans le Néant, Ray ne m'apprend rien. Mais comment aller la chercher ? Eytiri ne répond même pas.

— Il faut aller la chercher. Il faut qu'elle soit près d'une faille, dit Ray en lâchant le fragment palpitant.

— On ne peut pas retourner à Milton. On a plus le temps, Ray ! je grogne devant son manque de cohérence.

— Abriel va devoir venir l'extraire.

Joseph s'approche de nous, le visage furieux. Je resserre ma prise autour du corps de Téha quand Gabrielle apparaît. Elle fait face à Joseph et son regard assassin en dit long sur le plan parfait qu'il avait monté avec Aïko.

— Tout est sous contrôle hein ? Tu as beau être un Premier, Joseph, te prévaloir supérieur en force et en nombre de tes alliés, tu n'avais aucune idée de ce qui nous attendait. Comment comptes-tu me ramener ma fille ?

Il est rare d'entendre Gabrielle nommé Téha comme sa fille. Sa carapace se fissure enfin après tant d'années à ériger un mur aussi épais que sa haine pour les Quatre.

— Tout s'est parfaitement bien passé, Gabrielle. Abriel devrait arriver dans moins d'une heure. Ta fille sera ramenée saine et sauve.

Quoi ? Qu'est-ce que c'est que ce merdier ?

— Quoi ?

Gabrielle se plante face à Joseph et de hargne et de colère le fusille de toute sa fureur. Elle attend des explications et moi aussi.

— Tout a été parfaitement organisé. La taupe qui sévit au sein de la Hiérarchie est plus proche de toi que tu le penses. Nous devions déjouer leur avance.

— Tu te trompes !

— Je ne te demande pas de me convaincre du contraire. C'est un fait avéré, point. Maintenant si tu veux bien, j'ai beaucoup à faire. La Hiérarchie ne va pas se déplacer pour nettoyer mon territoire de tous ces cadavres. Allez donc faire vos valises, votre départ est imminent.

Il se détourne d'elle et fait un signe à ses loups pour entamer le ménage. Un silence de mort plane sur le champ de bataille. Des loups ramènent un tracteur avec une énorme remorque dans laquelle ils jettent les corps et leurs membres séparés. Je suis fasciné par toute cette folie meurtrière qui règne autour de nous. Ma bête trépigne, elle est partagée entre l'envie de retourner chasser l'ennemi et garder Téha avec elle.

— Queen.

La voix de la panthère me sort de ma contemplation morbide. Je pose mes yeux sur lui. Il est inquiet.

— Rentrons dans la maison. Je... Laisse-moi t'aider.

Il tend les bras pour me prendre Téha. Mais je refuse et la serre plus fort contre moi. Mon puma se coule si vite que je n'ai même pas le temps de grogner sous la douleur qui traverse ma colonne vertébrale.

— Elle n'est pas à toi, panthère.

— Je ne veux pas te la prendre mon ami. Tu es blessé et incapable de la porter avec un seul bras valide.

Mon puma le fixe impassible et l'info le percute enfin. Il me laisse un peu de manœuvre et ensemble nous tournons la tête vers mon bras gauche inerte qui pend le long de mon corps.

— Fait chier !

Voilà la seule chose que je trouve à dire avant que la douleur me submerge comme un raz-de-marée. Ray est doué pour anticiper des tas de choses et celle de rattraper Téha avant qu'elle ne glisse, n'y déroge pas. Gabrielle prend la place de la panthère et se penche sur moi.

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