20.

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Depuis le début de soirée, Will m’inonde de messages. Il s’excuse, m’implore de le rappeler. Je ne réponds à aucun texto et jette mon téléphone plus loin. Les mains sur le visage, j’essaye de me réveiller, mais c’est dur. J’ai une barre énorme dans la tête, comme si des petits bonhommes s’éclataient à faire des allées et venues dans ma tête. 

Je repense à Pauline. Alex et ses remarques débiles. Will et son silence. Édith. Bordel, ça me soûle. Genre vraiment. 

La sonnette sonne. Une, deux fois. Puis c’est au tour d’un poing de s’abattre sur notre porte.

Je me lève difficilement. Par l’entrebâillement de sa porte, j’aperçois ma mère, allongée dans son lit, son casque anti-bruits sur les oreilles.

C’est simple, quand elle est comme ça, il ne faut pas l’approcher. Elle refuse que je la voie dans cet état. Elle préfère rester seule. Surtout, ne pas la toucher. Je connais les règles depuis le temps. 

Je traîne ma grande carcasse à la porte d’entrée et ouvre en soupirant. 

— Bah c’est pas trop tôt.

Ma mâchoire manque de se décrocher. Je pourrais incarner l’un de ces personnages de dessin-animé hyper caricatural.

— Mais qu’est-ce que tu fiches ici ?!

— Bah je t’ai dit que j’allais revenir.

Je le regarde sans comprendre un traître mot de ce qu’il raconte.

— Bon tu m’ouvres ou tu vas me laisser crever de chaud ici ?

J’ouvre la porte en grand pour le laisser passer. Putain, c’est le cas de le dire : je me fais carotter. Et en beauté. Je suis faible, les gars. Tellement faible.

Oscar, c’est un gros con. Disons-le clairement. Il fait n’importe quoi, dégaine trente mensonges à la minute, et passe sa vie à fuir comme si ça allait résoudre quoi que ce soit. Il n’a pas de belles tresses comme Will, ni son corps élancé, ni sa gentillesse. En somme, il est chauve (il déteste qu’on dise ça, il préfère qu’on parle de « coupe en brosse »), il  a un corps sacrément balèze et un sale caractère. Pourtant c’est indéniable, c’est un putain de beau-gosse. Pardonnez-moi mes grossièretés, mais si vous vous trouviez devant lui comme moi, vous insulteriez la terre entière.

Vous voyez, il y a des sujets clivants, puis il y a Oscar. Oscar ne peut faire que l’unanimité. Et je ne dis pas ça parce que je suis sous une quelconque influence ou quoi. Enfin peut-être légèrement mais peu importe.

Tout ça pour dire que ma faiblesse peut s’expliquer d’une manière tout à fait raisonnable : Oscar est beau comme un dieu et on ne peut rien lui refuser. Je ne peux rien lui refuser. Et il le sait cet abruti. 

Je l’amène dans ma chambre en le priant de ne pas faire de bruits pour ma mère et ferme le plus délicatement la porte derrière lui.

— T’es vraiment débile, Oscar ! Ne me prend pas pour un con. Tu ne m’as jamais dit que tu allais revenir aujourd’hui et sonner chez moi comme un psychopathe.

Il se laisse tomber sur mon lit comme un bourrin et m’observe, pas du tout gêné pour un sou. Il se croit vraiment chez lui.

— Elle est où ta mère ? me demande-t-il soudainement.

Je soupire.

— Dans sa chambre. Mais ce n’est pas la question. Tu es vraiment un gros…

— Wow arrête de m’insulter. J’ai compris l’idée. Va pas me bourrer avec tes trucs-là. C’est bon, je suis là, t’es pas content de me voir ?

Confessions d'une tapetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant