La voiture renferme une chaleur apaisante. Le ciel est dégagé et laisse les étoiles bercer d'une douce ombre blanche l'asphalte et nous, nous nous murons dans un silence tranquille, piquée d'un peu de gène due à notre proximité. Je ne me sens pas à l'aise, j'ai besoin qu'il soit là et pourtant je donnerai tout pour ne pas avoir à supporter son regard brulant sur ma peau. Je tends les doigts vers le magnéto de la vieille coccinelle de mes parents, le son est saturé et parasité, une vieille chanson de Led Zepplin fait taper Nate des doigts sur le volant, et l'odeur de cuire mélangé à la lumière aveuglante des éclairages intérieurs me rappel les balades que nous faisions quand j'étais encore petite. C'est vieux et neuf en même temps, c'est étrange. Mais bientôt, cette béatitude dans laquelle je m'étais plongée est coupée par le bruit du moteur qui crachote en discontinue, la fumée blanche qui sort du capot et le silence et le noir qui nous tombent dessus. La coccinelle ralentit jusqu'à s'arrêter au bord de la route. Un frisson monte le long de mon épiderme. Merde ! Il ne pouvait m'arriver rien de pire que ça : être coincée au beau milieu de nul part, sans réseau pour pouvoir appeler qui que ce soit parce qu'évidement, le cliché voulait qu'il n'y en ait pas, avec mon ex petit ami qui n'est pas vraiment mon ex petit ami, dans une vieille bagnole qui appartient à mes parents, parents qui vont m'arracher la tête une fois qu'ils auront compris qu'ils auront à payer le dépanneur.
-Bon... On fait quoi maintenant ? Murmure Nate.
-J'en sait foutrement rien. On va être obligé de dormir ici, il est hors de question que je sorte chercher le premier hôtel venu à quatre heure du mat'.
Il hoche la tête et ouvre la portière, sortant dans la nuit chaude pour aller ouvrir le coffre et en rapporter la couverture de laine. Je comprends. Je ne prends pas la peine de sortir et passe directement entre les sièges pour m'asseoir sur la banquette arrière de cuire blanc. J'enlève mes DocMartens couverte de sable et de boue, et me laisse recouvrir de la matière bleu par le brun qui passe derrière moi et je me retourne pour être face à lui, allongés. Ses doigts tracent des dessins invisibles sur mon échine et j'observe les tatouages mystiques qui s'étirent le long de sa peau blanche. J'attrape mon téléphone et l'allume sur l'ipod, la lumière bleue contraste avec la couleur de ses yeux bruns. Ça les rend plus mystérieux, plus authentiques et rares : comme une aurore boréale. C'est une reprise d'Earned it, une gamine anglaise à la voix d'ange que j'admire. Une voix claire, cristalline et douce comme la soie, avec un soupçon d'innocence. Une chanson d'amour, bien-sur, comme-ci la situation n'était pas assez gênante comme ça. Mais je me laisse transporter par l'intensité du moment, et je porte ma main à ses boucles qui ne sont maintenant plus que des mèches rebelles et duveteuses pour y jouer. Il glisse son nez contre le miens et je sais que je devrai le repousser, mais je n'en fait rien. Parce que c'est bien plus simple, bien plus agréable de céder à la tentation. D'être faible. Et il continue sa descente contre ma pommette, puis ma joue, l'os de ma mâchoire, avant de se bloquer dans mon cou. Ce manège est lent, bien trop lent, et j'ai presque envie de le gifler ou de le supplier de l'arrêter, d'accélérer et de s'éloigner à la fois. Je me sens bien. Je n'ai pas cette sensation d'oppression dans le corps, ni celle de devoir partager mes pensées avec une autre moi. Je ne ressens pas le besoin des médicament, ni la fatigue, ni l'envie de vomir. J'ai seulement l'impression d'être dans une bulle qui me coupe du monde, comme la nuit dernière. Il dépose ses lèvres contre la peau de ma carotide et y reste un long moment : trois dizaines de secondes. Et il recommence : huit secondes. Encore une fois : trois secondes. Il s'arrête, il remonte doucement, mais plus précipitamment qu'avant. Il me regarde droit dans les yeux, il me fixe de ses yeux charbonneux et je n'arrive pas à m'en détacher bien que je le veuille. Alors j'accentue mes caresses dans ses cheveux, et ses yeux se closent dans un soupir confortable. Et par je ne sais quelle force, surement celle de l'abruti devant moi, mes lèvres se retrouvent scellées aux siennes dans un mouvement lent. Nos langues s'enroulent, se cherchent et se battent. Ses mains attrapent les miennes d'une poigne de fer pour m'empêcher de le repousser, et j'aime ça. J'aime pouvoir sentir sa peau chaude m'électriser alors que je le refuse. Il enroule discrètement une jambe sur les miennes, et bientôt, je me retrouve coincée sous lui. Mais c'est doux, léger et l'une de ses mains remonte lentement vers mon visage pour rouler entre ses doigts une mèche des mes cheveux. Son odeur embaume l'habitacle de romarin, l'odeur de térébenthine fidèle à ma famille a disparue et je discerne son souffle frapper l'arrête de mon nez. Je ne sais pas ce que je souhaite, je ne sais pas quoi faire mais je suis bien sur d'une chose : je ne me dégagerai pas. C'est bien trop plaisant, bien trop jouissif comme sensation pour la laisser s'échapper comme un soupire maintenant. Je ne veux pas partir, je le déteste. Je le déteste de me faire ce qu'il me fait. C'est une irrésistible attirance, un désir brulant qui prend aux tripes et des sentiments tous plus confus et puissants les uns que les autres. Je l'aime. Je le déteste. Je l'aime. Je l'aime lorsque je m'agrippe à son t-shirt couleur émeraude, je l'aime quand nos lèvres se mordent dans des baisers confus et fous, je l'aime quand je suis avec et loin de lui. Parce que je n'arrive pas à réellement le détester et que je suis prête à lui pardonner. Peut être. Surement. Je vole au dessus de lui et mon épaule s'écrase contre le cuire. Je suis entre ses jambes et nous ne sommes que deux gamins amoureux qui s'expriment.
-Tu m'as manqué.
Son souffle tremblant explose et recouvre le vieux morceau de Pink Floyd qui résonne depuis mon téléphone et je sais qu'il a compris. Nous n'avons pas besoin de nous expliquer les choses, une chance pour les deux idiots que nous sommes.
-Parce que c'est ainsi que notre histoire est écrite et pas autrement.
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A Passport Story
FanfictionNate n'était en Australie que pour une semaine. Il était venu avec ses trois meilleurs amis pour pouvoir profiter de l'été, des filles et des fêtes australiennes. Il n'était qu'un adolescent qui n'avait pour but dans la vie rien d'autre que de s'amu...