Je ne peux pas vraiment expliquer ce qu'il m'a pris, quand j'ai décidé de la retrouver, lui parler, puis lui voler ce baiser insensé qui n'était pas prévu. Du tout. Mais qui est loin de m'avoir déplu, au final. Et cette petite balade en voiture pour empiéter sur quelques minutes de son temps... Elles m'ont fait plaisir, et elle n'a pas dit non.
— Arelio, tu rêves ?
La petite peste de Lénaïc court partout, me secoue pour me tirer de mes rêveries, avant de se sauver en courant jusqu'à sa chambre. Elle me fait sourire alors que sa mère lui crie de se calmer, tout en occupant les fourneaux de la petite maison de ville où j'ai atterri. J'y attends ma cousine, Maxine, qui n'est visiblement pas encore rentré. Alors on m'a proposé de rester manger, et même si j'ai bien tenté de décliner, les regards que tous ces colocataires ont pesé sur moi m'ont convaincu de rester, et même de mettre la table en ajoutant un couvert en plus.
— Arelio, tu veux venir jouer à la console avec moi ?
Le jumeau de Lénaïc, Sawan, tire sur le bord e mon t-shirt pour me traîner vers le salon, et je m'installe à côté de moi après qu'il ait allumé la télé et attrapé deux manettes. Il m'en tend une en me suppliant de jouer à mario kart et j'accepte en le prévenant qu'il va perdre. Ce qu'il s'est évidemment passé parce que je refuse de faire exprès de le laisser gagner.
De longues minutes plus tard, le score en est toujours au même, mais je suis content de voir que Sawan ne s'énerve pas en perdant, il a bien grandi. Il est bientôt l'heure de manger, mais c'est également l'heure à laquelle ma cousine débarque dans la coloc. En secouant sa masse de cheveux verte — ce mois-ci seulement, elle traverse rapidement la pièce en saluant tout le monde, avant de monter rapidement à l'étage pour déposer ses affaires sans même m'avoir vu.
Je lui emboite le pas pour pouvoir lui parler loin des oreilles indiscrètes, mais m'arrête à temps pour ne pas tomber sur une scène que je me refuse à voir : Maxine sautant sur sa petite copine Lana, et l'embrasser à l'étouffer. Je préfère attendre ici qu'elles soient prêtes à sortir en public, ce qui n'arrive pas même cinq minutes plus tard. Je poireaute dans le couloir encore de longues secondes en grommelant, avant de frapper à la porte de leur chambre et ne pas les surprendre en ouvrant la porte rapidement.
Elles finissent par l'ouvrir d'elles-mêmes, en marmonnant qu'elles n'avaient pas terminé de se dire bonjour. Et moi je grimace en levant les yeux au ciel.
— Vous aurez tout le temps de faire ça ce soir à deux, en attendant je suis là pour parler à Maxine.
— Qu'est-ce qu'il se passe ? me demande-t-elle, alors qu'elle s'est plantée devant le miroir pour se rebrosser les cheveux qui devaient sûrement partir dans tous les sens.
— Juste une question pour la réunion de famille...
Elle soupire en se tournant vers moi, absolument pas décidée à faire acte de présence là-bas. Pourtant, même si la situation familiale est compliquée, je sais à quel point sa mère serait heureuse de la voir, ne serait-ce que pour un court de temps.
— C'est pas mon truc Arelio, personne ne m'aime là-bas et je ne les porte pas dans mon cœur non plus... Ils ne m'ont jamais acceptée comme je suis, je ne vois pas pourquoi je devrais subir ça...
— Pour ta mère... On ne resterait que le temps du repas, tu restes avec moi tout le temps et on dormira dans une chambre d'hôtel pour ne pas être embêté. Je ne te lâcherai pas d'une semelle, et s'il y a la moindre remarque, on s'en va immédiatement.
Elle lève les yeux au ciel en se mordant la lèvre, je sais à quel point ce sujet est sensible même si elle montre que non.
Je sais qu'elle va finir par dire oui, je la connais. Je sais aussi qu'elle s'empêche d'aller là-bas car elle a trop peur des remarques et s'en veut que Lana ne puisse venir, mais il est important pour elle de voir sa mère une ou deux fois par an, la seule qui ne la descend pas plus bas que terre.
— Vas-y Maxine, lui dit Lana. Je vais bien, je vais rester ici tant que vous serez parti. Ça sera l'occasion d'aller voir quelques amis et de bosser en heures sup' pour gagner plus d'argent.
— Mais toi...
— Je sais à quel point ta famille est compliquée Max', t'en fais pas pour moi.
— Mais... hésite-t-elle, en se tournant vers moi, indécise. Ils vont clamser en me voyant arriver avec mes cheveux verts, mes bracelets et colliers et... Tout simplement en me voyant arriver !
— Ça nous débarrasserait d'un sacré paquet, rigolé-je, alors qu'un mince sourire étire ses lèvres. Tu viens ou non ?
— Ouais...
Elle ne dit plus rien alors je décide de les laisser entre eux pour en parler et sûrement se réconforter, en les prévenant en criant presque de l'heure à laquelle je démarre en voiture d'ici. Quitte à aller là-bas, je préfère être libre de mes mouvements et aller et venir comme bon me semble. Moi non plus, je ne suis jamais totalement à l'aise avec ces réunions de famille. Grâce à mon indépendance, elles ne m'angoissent plus comme avant, mais il est vrai que j'ai dû affirmer mon caractère pour empêcher les autres de m'enfoncer avec leurs remarques.
Je rejoins la tablée déjà assise pour manger, et me régale de leur nourriture parfaitement travaillée. Le groupe est hétéroclite, mais je m'y sens chez moi, alors qu'il m'accueille en souriant dès que je passe le pas de la porte et ramène, comme aujourd'hui, le dessert préféré des jumeaux, à savoir une tarte citron meringué. Et je crois que tout le monde est d'accord pour que je continue de leur faire plaisir, au vu des gourmands qui ont rapidement tendu leur assiette au moment de l'annonce du dessert.
Maxine semble heureusement avoir retrouvé le sourire, et Lana la distrait en racontant des anecdotes du boulot, qui je n'écoute pas puisque je suis occupé à faire tampon entre Lénaïc et Sawan, qui râlent en affirmant en avoir moins que l'autre.
Et je me dis que finalement, je suis très bien célibataire. Non mais c'est vrai quoi, qui serait d'accord pour signer un contrat à plein temps pendant dix-huit ans, avec des terreurs pareils ? On ne m'y prendra pas !
La mère des jumeaux rit en voyant ma tête désemparée — ou en lisant dans mes pensées, et je souris en ébouriffant les cheveux des deux petits.
— Je vais rentrer moi, j'ai du boulot qui m'attend !
— T'as pas envie de jouer au baby-sitter ? ricane Lana en haussant les sourcils.
— Sans façon !
Alors j'attrape ma veste, salue tout le monde d'un grand signe de main, puis m'en vais en claquant la porte derrière moi, pour rentrer dans ce que je considère comme mon chez-moi, alors que ma place est presque autant ici que là-bas.
Voilà de quoi est composée une famille. Des gens qui se taquinent, qui se comprennent, qui s'aiment et n'en demandent pas trop aux autres. Comme dans cette coloc', que j'ai moi-même formée, alors que son anniversaire de naissance approche, comme le dit si bien Sawan.
En comparaison de ma famille, ces gens ont fait plus pour moi d'un point de vue bien-être que toutes les années où j'ai été enfant, et qu'on s'amusait de n'ouvrir la bouche face à moi seulement pour piquer, se moquer, appuyer là où ça fait mal. Chez des gens qui songe seulement à l'argent sans voir tout le mal qu'il nous cause, à Maxine et moi.
Ces gens-là, c'est moi qui les ai choisis le premier jour, sans vraiment savoir pourquoi, comment, j'ai pris ceux qui étaient paumés, qui avaient besoin d'un toit, d'une sécurité. Cette maison, c'est la mienne mais j'ai décidé d'y faire cohabiter ceux qui en avait plus besoin que moi, alors que mon compte en banque a largement eu de quoi m'acheter une deuxième maison, plus petite et plus loin du centre-ville. Ils sont sept, d'âge, de sexe et de passions différentes, mais ensemble, ils forment une maisonnée pleine de vie qui s'entraident et se redonnent confiance en eux ! Et j'espère qu'aucune ombre ne les séparera, alors que la galère les côtoyait déjà auparavant. Je suis heureux de les voir s'épanouir ensemble aujourd'hui, car chacun d'eux le mérite.
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A contre-corps [Terminé]
RomansaViolaine n'a qu'un amour dans sa vie : son adorable fille pour qui elle donnerait tout, et pour qui elle a tant sacrifié par le passé, sans regrets. Mais quand ses parents déménagent, elle ne peut le supporter, quitte à devoir trouver un autre logem...