• 🌒 • Ensemble

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• Perdu dans les méandres d'un rêve plus qu'agreable, peuplé d'orbes abyssales et de lèvres au goût de bonheur, de petites chatouilles parsemant mon flanc m'arrachent de mon sommeil. Ouvrant un oeil, curieux, je découvre les petits lapereaux albinos qui s'amusent à rebondir sur mon ventre.

Lançant un grognement peu convainquant, ils me regardent des étincelles dans les yeux, avant de descendre de leur perchoir en un bond. Venant enfouir mon museau dans le pelage de Ciel de Sombra, j'essaye de me rendormir avant qu'un mélange d'odeurs ne vienne alerter mes sens. La patrouille de l'aube se dirige dans notre direction, Orión à sa tête.

Ne voulant pas éveiller la panique chez mon petit groupe atypique, je décide d'aller à leur rencontre. Espérant leur expliquer calmement le fait que j'ai volontairement désobéi à un ordre de mon alpha et que j'ai mis un des membres de ma meute ainsi que le secret de notre peuple en danger. Je sens la migraine déjà pointer le bout de son nez. Je suis dans la merde...

J'incite mon compagnon à rester avec le groupe, en pointant le direction de la patrouille comme seule explication avant de partir en cette direction. Arrivé à leur niveau, lorsque je les vois relever le museau en suivant ma hauteur, je reprends ma forme humaine et ils me suivent dans ce mouvement. Je tombe directement dans les yeux révoltés d'Orión.

- Ou étiez-vous passé Ciel de Sombra et toi ? Quels sont toute ces odeurs qui envahissent mes narines ? Ne me dit pas que tu m'as ouvertement désobéi ?

Sachant pertinemment que je vais me faire passer un savon, je ne fais pas dans la demi mesure et raconte notre expédition d'une traite.

- Avant que tu ne t'énerves, à juste titre, venez juste voir le résultat

Et je repars en direction du petit groupe. Je vois l'expression de mon alpha se décomposer au fur et à mesure qu'il découvre le tableau se dessinant devant lui, ouvrant de grands yeux comme le reste de la patrouille.

- Comment est-ce possible ? Une entente pareille entre espèce n'est pas concevable !

- La présence de Ciel de Luz a grandement aidé, intervient Ciel de Sombra, sa seule intervention les a tous calmé et permis de les diriger jusqu'ici

- Mais il reste tant de créatures encore emprisonnées, repris-je, et la plupart de celle que nous avons sauvé cette nuit ne savent pas comment rentrer chez eux, étant âgés d'à peine quelques lunes

- Et que proposez-vous ? Enchaine Nashira, que l'on se coltine toute la superficie de cette contrée pour retrouver les parents ? Et qu'on mette en danger d'autres loups de notre meute pour aller sauver ce qui nous servira de repas le lendemain ?

Je sens la colère monter face à ses propos. Si on prend en compte seulement le bien être de notre espèce, il a probablement raison. Mais comment peut il encore ne pas regarder plus loin que le bout de son museau ? Je m'emporte, quitte à faire preuve une fois de plus d'insubordination.

- Et lorsque ces braconniers auront capturé toute les créatures des environs, comment comptes- tu nourrir tes petits ? Et nos anciens ? Et toute notre meute ? Et toutes les autres meutes ? Cette situation va engendrer des conflits inimaginables entre nous mais aussi entre toutes les autres espèces, brisant l'équilibre, tuant l'écosystème de cette forêt. De notre maison. Il est encore tant d'intervenir, l'amplitude de la situation n'a pas encore dégénérée, on peut encore faire quelque chose !

Des yeux ronds me répondirent. Sachant pertinemment avoir outrepassé ma place avec mes propos, penaud, je cherche le regard de Ciel de Sombra qui me couvre avec une bienveillance extrême.

- Pour le moment, clame Orión, ces créatures ne doivent pas rester sur notre territoire trop longtemps, pour ne pas éveiller les soupçons des autres meutes. Débrouille-toi pour arranger tes bêtises. Je vais m'entretenir avec les autres et on en reparle avant la nouvelle lune !

- Je convaincrais les miens, promet la jeune louve de la rivière, je vous dois la vie à tous les deux, je veux que les autres qui sont prisonniers retrouvent aussi cette liberté

Elle s'incline en remerciement, et contre toute attente, devant nous, les animaux libérés font de même, créant en moi un mélange de joie et de fierté. Fierté que je vois briller dans les yeux de mon mentor quelques secondes avant qu'il ne s'éclipse rapidement vers le camps. La jeune louve s'enfuit dans les taillis suivie par plusieurs animaux retournant à leurs territoires. Ne reste en notre compagnie que les lapereaux blanc et le jeune renard.

Ciel de Sombra m'accompagnant, nous passons la journée à crapahuter à la recherche de leurs chez eux. Faisant des détours par les territoires neutres pour ne pas trop empiéter sur les frontières voisines, passant même par des terres inconnues, nous nous éloignons un peu plus de chez nous à chaque pas. Ma capacité extraordinaire pour analyser les environs nous a évité bien des kilomètres. Lorsque le soleil déjà descendant devient moins lumineux, le renardeau rejoint sa tanière sous les yeux attentifs de sa mère, sûrement perplexe face à la situation.

Nous retrouvons le chemin de la comble, notre mission achevée. Forme lycane prise, Ciel de Sombra sur mon dos, je dévore les kilomètres nous séparant de notre camp rapidement, espérant arriver avant la nuit. Sa voix brise le silence crépusculaire.

- Je pense que tu n'as même pas idée de ce que tu as accompli aujourd'hui. Un prémisse de quelque chose de grand est en train de se former et tu en es l'épicentre. Garde-la tête haute quoi qu'il se passe, tes convictions encrées dans tes choix. Je te suivrai où que tu ailles !

Ses mains agrippées au pelage surplombant mon crâne, je le sens les mouvoir doucement, me provoquant un léger frisson le long de la colonne. Ses paroles au creux de ma conscience, j'essaye tant bien que mal de faire le lien avec tout le reste, espérant enfin voir ce qu'il comprend plus facilement que moi. En vain. Mon cerveau embrumé par l'adrénaline et la fatigue accumulées depuis la veille. La paroi rocheuse se dessinant au loin, je ralentis le pas pour laisser descendre mon compagnon. Reprenant ma forme humaine, je viens me placer devant lui.

- Je ne sais pas ce que tu essayes de me faire passer comme message depuis plusieurs jours et j'ai bien capté que tu veux que je le comprenne de moi-même. Je voulais juste te remercier du soutien que tu me portes et m'excuser de t'entraîner dans cette embrouille, encore

- Arrête de t'excuser, je resterai à tes côtés quoi qu'il se passe, tu le sais

Plongeant au fond de ses iris, j'y trouve l'apaisement dont j'ai besoin, comme toujours. Je viens me blottir contre lui, mon nez dans son cou, inspirant son odeur pour m'en imprégner toujours plus. Là dans l'obscurité, où seul les crissements des ailes de grillons percent le silence, nous restons ainsi, plusieurs secondes ou minutes peut être, profitant de notre solitude.

Je me tente à un baiser au niveau de sa clavicule, goûtant sa peau à nouveau. Je le sens frissonner de contentement, venant glisser ses mains dans mes cheveux. J'espère de tout coeur que mes actions ne viendront jamais gâcher ce que nous avons ensemble. Car c'est tout ce que j'ai de plus cher aujourd'hui.

Avec un dernier regard en direction de la lune, nos mains se lient comme une promesse, celle de braver ensemble l'adversité et de se diriger vers la paix •

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• Embryon d'Alpha •Où les histoires vivent. Découvrez maintenant