Mission 59 : essayer un truc

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C'est probablement son cinquième café, insipide, qu'il boit depuis ce matin. Être Directeur d'un établissement psychiatrique n'est pas de tout repos. Ces derniers jours sont très particuliers et épuisants : du matériel disparaît pour réapparaitre dans des endroits improbables, des bouteilles d'eau neuves qui contiennent finalement du Rhum blanc, de plus en plus d'animaux viennent dans le jardin, du personnel se plaint de faire des cauchemars quand ils font une sieste dans les vestiaires, l'imprimante qui devient capricieuse, et d'autres bizarreries qui s'accumulent à un quotidien déjà difficile.

Tout ça depuis l'arrivé de cet étrange Mr Farer.

Il grince des dents : est-ce qu'il n'a pas été trop gourmand en acceptant ce chèque ? Il se le demande depuis qu'il a vu qui était le principal concerné, et aimerait savoir si le juge trempe dans la même sauce que lui. La sauce "Farer guacamole", il sourit à sa propre blague : Carl est avocat, avocat, vous l'avez ?

"D'où lui vient cette haine pour son frangin ?" pense-t-il avant  de se dire que Carl est plus intéressant à psychanalyser que son grand benêt de demi-frère. Ce dernier a l'air surtout d'un pauvre simplet qui se croit capable de parler aux écureuils.

 "Et il est PDG d'une aussi grande entreprise ?" se moque-t-il en portant le café à ses lèvres.

Il grimace au goût sur sa langue : de l'huile de moteur, encore un phénomène bizarre. Quelqu'un le tire de ses pensées, ultras importantes pour un directeur de centre psychiatrique :

— Monsieur ! crie une infirmière à la voix virile.

Le directeur lève un regard des plus blasés.

— Quoi ? Mme Ginette a encore dessinée un service 3 pièces sur le front de Mr Martin pendant sa sieste, et vous n'arrivez pas à l'effacer ? 

— Non ! C'est ...

— Laissez-moi deviner, coupe le directeur, Marc et Charlie fument encore de la beuh dans les toilettes ?

— ... la guerre dans la salle créative !

— Pardon ? Vous auriez pu me le dire plus vite !

₍⑅ᐢ..ᐢ₎

Il y a comme un malaise depuis que Mika s'est assis à côté du Happiness Manager, tel un docile petit toutou. Il doit faire quoi au juste ? Ses mains se triturent entre elles et n'osent pas attraper les cookies sur la table.

— Comment vis-tu les événements ? commence doucement Daniel.

— Je reste focus sur mon équipe, il louche sur le tas de cookies devant lui, donc ça va : j'ai du recul. Al n'est pas mon pote, donc je suis beaucoup moins affecté que Cathy ou toi. En tout cas je n'ai pas envie de casser des trucs, même si sur le coup j'aurais bien refait le portrait de ce Carl là.

Daniel échappe un petit rire.

— Je te trouve vraiment calme face à tout ça, c'est une belle avancée.

— Grâce à qui ? dit-il en risquant un regard à son voisin.

— Je n'ai fait que t'offrir un élastique et un bracelet. C'est ton cerveau qui a décidé de leur attribuer le don de te calmer.

Mika fronce les sourcils :

— Tu minimises ton impact sur moi ?

Daniel hoche la tête, attrape un cookie pour le mordre en fixant le manager.

— Mika, tu es le seul à pouvoir améliorer ta gestion des émotions, je ne suis qu'une sorte de ... déclencheur. Et il vaut mieux que tu t'en sortes comme un grand, que de devoir dépendre de quelqu'un.

Bienvenue à Corporate [Romance paranormale]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant