Mission 68 : faire pression

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Lorsqu'elle approche de la porte de son appartement, une odeur alléchante embaume le couloir. Une fois rentrée, elle avance timidement et le parfum d'un bon repas lui masse presque le cerveau. Un beau rouquin de 2 mètres est en train de cuisiner. Dans le coin repas, des origamis de lapins de toutes tailles et couleurs décorent une table joliment dressée. Même Dowdo a droit à un petit plat dans sa gamelle.

Cathy est émerveillée.  Al s'est plié en quatre, en a trop fait, mais elle le trouve beaucoup trop adorable.

Pendant qu'il fait sauter des légumes, des bras hésitant s'enroulent autour de sa taille. Il sourit et coupe le feu avant de se retourner.

— Ça s'est bien passé ? demande-t-il en lui caressant la joue.

C'est bien réel : ils ne sont plus amis, et il déborde d'affection. Elle va mettre du temps à s'y faire, se dit-elle. Il lui répond avec un hochement de tête.

— Je... me suis occupé, dit-il un peu gêné. Je t'ai fait de la glace maison pour ton Kdrama de ce soir.

Il ne va pas lui raconter son aventure au supermarché du coin pour acheter les ingrédients : le gérant du magasin avait commencé à le draguer, puis Al lui a proposé de faire juste une photo avec lui. Il a accepté sans hésitation et, trop heureux, ne l'a pas fait payer.

— C'est... adorable ! elle lui époussette la chemise. Mais tu es couvert de farine, observe-t-elle amusée.

— J'ai aussi fait des biscuits, Dowdo a voulu participer.

Cet homme beaucoup trop attachant, ici dans son salon, c'est son compagnon. Ça la traverse, lui donnant envie de se blottir dans ses bras. Passer de l'amie à l'amante est si soudain... trop même. Elle ignore tant de choses encore sur lui. Al est tel un prestigieux vase de porcelaine, recollé mais dont on voit encore les fissures, prêts à se briser si il tombe. 

"Qu'est-ce qu'il aime ? Est-il capable de me dire non si ça ne va pas ? Et moi ? Qu'est-ce que j'aime au fond ? Et si je repense à Ethan ? Et si ..."

Réfléchir à tout ça a finalement raison de son envie naissante. Tout est à faire entre eux. 

Al penche la tête sur le côté en la voyant aussi pensive et caresse ses cheveux avec doux sourire. Après tout : pourquoi se presser ? se dit-elle. Ils ne sont pas obligés de se jeter l'un sur l'autre comme des affamés et prendre le risque de brûler des étapes.

Les deux amants s'embrassent tendrement, puis se lovent ensemble devant la télévision après un excellent dîner. C'est enfin leur marathon Disney, rien qu'entre eux. Cathy se sent extraordinairement bien.

Al n'a jamais vraiment pris de vacances depuis que Corporate existe. Savourant ce qu'est un simple repos, à réellement ne rien faire, dans les bras de celle qu'il aime, il ne s'est jamais senti aussi heureux de toute sa vie.

₍⑅ᐢ..ᐢ₎

Carl n'a pas quitté la tour de la nuit, ni son bureau : préférant cette fois bien prendre au sérieux les rumeurs sur le couvre-feu. Pas plus tard qu'hier, il a viré Hafsa sur un coup de colère. La situation était chaotique avec des lapins qui couraient dans tous les sens et mangeaient les câbles, des agrafeuses qui poursuivaient ses directeurs et directrices, d'autres qui sont restés coincés dans une boucle de burrito, des fournitures récalcitrantes, des ascenseurs devenus fous... Et il en passe. Le sommeil n'est pas venu à lui, et il a passé la nuit à ruminer.

Mais il n'est pas au bout de ses peines : à 14h précise, il reçoit une démission tous les quarts d'heure de ses sous-fifres "je me tire de cet endroit infernal !", "je me suis fait agresser par une imprimante !", "on en a gros !", "une agrafeuse est rentrée dans mon slip !", "hier c'était l'apocalypse, mais aujourd'hui c'est pire ! Payez-moi le triple !" etc.

Bienvenue à Corporate [Romance paranormale]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant