♤Chapitre 9 : Partie 1♤

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HARRIET CHO :

J'abandonne ces murs d'opale dont la blancheur vide délaisse le sentiment d'affliction qui y réside, avant de céder à cette même sensibilité qui naît lorsqu'on reste dans ce genre d'endroit trop longtemps. L'odeur dérangeante du désinfectant inonde les lieux dans une vague de sons provenant d'un peu partout, et l'aveuglement qui résulte de la couleur glacial de ces murs me pousse définitivement à désirer de ne jamais remettre les pieds dans cet endroit.

L'impression de mouvement autour de moi ne s'achève toujours pas lorsque mes pieds fuient les jolis parterres de fleurs devant le bâtiment.

Les étranges et sombres pensées qui secouent mon esprit tels un bâteau de papier navigant sur une rivière formée par la pluie jusqu'à la bouche d'égout la plus proche prennent finalement fin par l'arrivée désagréable de l'élan de rage qui vient se percuter à mon estomac.

Les mots refusent de s'aligner correctement dans mon esprit et la portière de ma voiture refuse de s'ouvrir, trop vieille et trop érodée pour bien fonctionner. Bientôt le craquement familier de la peinture qui s'écaille parvient à mes oreilles tandis que je force sur mes bras pour débloquer cette foutue porte, et je n'explique pas l'effervescence courroucée qui s'empare de moi lorsque je remarque qu'on m'observe non loin, plus haut dans la rue.

"Quelle idiote" se disent probablement ces gens.

Je hais la sensation d'être observée, je hais m'humilier en public, c'est au-dessus de mes forces. Mais malgré toute cette réticence, c'est encore ma faiblesse qui a la supériorité sur moi et je me hais tout autant que je hais ces gens de me scruter.

Je ne dois pas pleurer, je ne dois pas laisser ces conneries m'atteindre. Mais comment ?

Je hais pleurer pour une porte que je ne parviens pas à déverrouiller. Je suis fatiguée, telle serait mon excuse si je m'en cherchais une. Je suis fatiguée de tout ça, de devoir faire semblant et de devoir supporter cette merde.

Mais je ne dois pas laisser ces gouttes salées gâcher ma journée, il faut que j'arrête immédiatement mon espèce de crise de panique en pleine rue, je dois reprendre mon souffle et arrêter de m'étouffer avec cet oxygène qui ne semble pas être fait pour moi. Peut-être dans une autre vie, me dis-je avec amertume.

Je dois faire ci, je dois faire ça...

Pourquoi tu te donnes tant d'obligation si tu ne veux pas les suivre ? me demande la partie de moi qui voudrait que j'arrête de mentir, de cacher la vérité à tout le monde.

Mais je ne peux pas arrêter, je ne peux pas... Je dois arrêter d'arrêter, mais il faut que j'arrête de devoir... Tout ça n'a aucun sens.

Inébranlable.

Je dois prendre exemple sur Billy. Il ne laisse rien l'atteindre, son humour est toujours le premier à la course de toutes les émotions qui se battent en lui.

Persévérante.

Je dois prendre exemple sur Ann. Elle ne s'arrête jamais, même si elle se descend sans arrêt et ne croit pas suffisamment en elle à mon goût, elle n'abandonnera sous aucun prétexte ce combat qu'elle est obligé de mener contre elle-même et son passé, dont je ne connais pas les secrets.

Forte.

Je dois prendre exemple sur Olympe. Cette merveille du monde ne se plie pas, elle n'accepte pas le moindre manque de respect et reçoit des horreurs sans jamais flancher.

Sensible.

Je dois...

SILENCE !

Ne le suis-je déjà pas assez ?

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