Chapitre 13: Selon lui

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Je dois vite changer de conversation pour qu'elle redevienne sérieuse, une enquête ne peut pas attendre. Les plaisanteries sont donc finies.

— Revenons-en à nos moutons mon cher Arthur. Vous avez bien enquêté sur les victimes avant mon arrivée n'est-ce pas ?

— Oui bien sûr. Vous pourrez trouver les dossiers sur la banquette arrière.

Je dois alors me tortiller dans la petite voiture pour récupérer deux pochettes cartonnées qui contiennent de précieuses informations.

— Et avez-vous des preuves matérielles ? Lui demandais-je alors.

— Aucune, pas même un cheveu. L'assassin n'est pas un amateur, il n'y a aucun doute là-dessus.

Je me dirige tout de suite vers les pages traitant des dernières journées des victimes et je les lis à voix haute pour les partager avec mon coéquipier.

— Bernard Rocher a emmené, à 14h, sa mère à l'hôpital pour son rendez-vous avec le médecin qu'elle voit une fois par semaine. Il a ensuite rencontré son conseiller Pôle emploi à 14h30 et leur entretien s'est terminé quarante-cinq minutes plus tard, soit à 15h15. Il devait retourner à l'hôpital à 15h30 mais personne n'est venu. Sa mère a été ramenée par une ambulance et c'est là qu'ils ont découvert le corps. À 16h30.

— C'est exact.

— Si les alibis de Delph et de Léandre sont confirmés, ils ne peuvent pas être responsables de ce meurtre. Léandre était chez lui entre 15h et 16h et habite à cinquante minutes du domicile de Monsieur Bernard Rocher. Et quant à Delph, avec un rendez-vous à 16h à Paris elle devait donc être dans le train. C'est une chance d'avoir une journée si précise, cela peut innocenter complètement nos deux suspects. Est-ce aussi documenté pour Monsieur Orso Moretti ?

Nous sommes déjà arrivés face à mon hôtel, Arthur se saisit alors, avec sérieux, du dossier de la victime et prend le relais pour la lecture.

— Un peu moins. Monsieur Orso Moretti a quitté son travail à 16h30 et sa petite amie l'a retrouvé sans vie à 18h. Ce qui ne peut donc pas écarter Léandre. Mais ce qui rend très peu probable une implication de Delph. Imaginons que son rendez-vous ait duré 1h, ce qui me semble convenable entre le temps de l'entretien et l'attente, nous sommes ici à 1h de train de la gare Saint Lazare ce qui l'a fait rentrer à 18h. Et les habitations de nos victimes sont à quarante minutes et cinquante minutes en voiture de la gare. C'était donc impossible pour elle d'y être à temps.

— Les victimes habitent-elles dans le même secteur ?

— Elles ne sont pas voisines mais sont à vingt minutes en voiture et sans embouteillage.

— Il est donc possible qu'un seul tueur ait eu le temps de tuer nos deux victimes. Donc innocenter Léandre pour le meurtre de Bernard Rocher peut revenir à l'innocenter pour celui d'Orso Moretti.

Cette idée semble déplaire à Arthur. Je sens bien qu'il aimerait innocenter Delph et accuser son, si étrange, petit ami. Ce que je peux comprendre, Léandre n'inspire pas la confiance, nous avons inconsciemment envie de faire de lui le coupable idéal. Alors que la douce et délicate Delph est certes une coupable idéale, mais il est plus difficile de l'imaginer tuer avec brutalité deux hommes.

— Enfin, si son alibi est confirmé. Il peut avoir reçu son colis à n'importe quel moment. Enchéris Arthur.

— Oui, tout comme Delph qui ne nous a étrangement pas parlé de ce rendez-vous qui pourrait la sauver de la prison à vie.

— Elle a peut-être oublié ?

Arthur lui cherche des excuses, mais cela me semble assez improbable. Qui pourrait oublier un tel rendez-vous ? Je me dois donc de ramener Arthur à la raison.

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