Le Nouveau Professeur (terraink)

19 - En Thérapie

🎧 Pour une meilleure compréhension de la psychologie de Damien, l'écoute de la musique associée au chapitre est fortement conseillée (sous-titres français disponibles).

Damien est assis face à sa psychiatre, vraisemblablement plus âgée que lui mais la gentillesse et l'empathie se lit sur son visage rempli de douceur. Le bureau se donne un style un peu vieillot, avec le bruit du parquet qui grince à chaque pas et les résonnances de la pièce qu'on peut entendre juste en respirant un peu fort. Il y a cet odeur ambiante de vieil objet, celle qu'on ne sent que lorsqu'on visite ses grands parents ou dans des cabinets médicaux privés, un peu comme celui-ci. Confortablement installé dans sa chaise rouge, rembourrée de velours et cloutée de toute part, sa première séance peut enfin commencer. Son interlocutrice enfile ses lunettes un peu rondes sur son nez, sort deux feuilles blanches et prépare son stylo.

- Alors dites moi qu'est ce qui vous amène ici.

- L'hôpital.

- Ah, oui, mais pourquoi exactement ? Répond-elle en riant.

- J'ai fait une overdose. En fait, je devais arrêter la fume pour aider mon petit ami alcoolique à rester sobre, être solidaire avec lui. Mais je sais pas, un soir j'ai rechuté et un peu trop fort.

- La rechute fait parti du processus de sevrage, ça fait combien de temps que vous fumez ?

- Ben... J'dirais que ça fait un peu plus de quinze ans... Mais j'avais pas une énorme consommation non plus ! Ca n'a jamais impacté mon travail.

- Et pourquoi vous avez commencé à fumer ?

Le technologue marque une pause en baissant la tête, avalant difficilement sa salive. Les yeux vitreux, il s'essuie rapidement les joues avant de répondre à sa question.

- Un tas de raisons... Mes parents refusaient de m'acheter des jeux vidéos, ou me payer des sorties, j'avais que des magazines pour m'occuper alors je m'ennuyais beaucoup. Tout ça parce que mes notes n'étaient pas assez bonnes et ils voulaient être sûrs que je n'avait rien d'autre à faire que réviser et faire mes devoirs. Mes sœurs avaient tout, des vrais pourries gâtées et je les enviaient d'une force... Et puis mon père me terrifiait, et me battait de temps en temps. Dès qu'il était frustré sur quelque chose il venait s'en prendre à moi comme si j'étais responsable de ses problèmes. En plus, je découvrait mon homosexualité alors que j'étais dans une famille qui ne l'accepterai jamais, et je ne savait pas comment vivre avec ça. Fumer, c'était mon seul échappatoire mais c'est devenu une récréation trop longue, j'en ai plus besoin maintenant. Le problème, c'est que j'déprime gravement au moins deux fois par an et ça me replonge là dedans...

- Et en ce moment, vous vous sentez déprimé ?

- Mmh je sais pas... En ce moment je peux me réveiller de bonne humeur, être au top de ma forme et d'un seul coup vouloir me jeter d'un pont ou tout plaquer pour vivre reclus au fond d'un sous sol. Et puis, le bon mood reviens comme si de rien n'était.

La psychiatre semblait très intéressée par ses dires, elle rédige un tas de mots sur son papier et le jeune professeur se demande s'il est un cas vraiment désespéré. Pendant trois quart d'heure, Damien se livre dans des confidences intimes qu'il n'a jamais exprimé à qui que ce soit d'autre auparavant (en dehors d'Elias quand il fumais trop), gardant toujours ses noirceurs à l'intérieur pour lui. Rapidement, la discussion se centre sur son enfance, plus précisément l'époque de la préadolescence, celle qu'il décrit comme la pire période de sa vie, et ce jusqu'à ses dix-sept ans. Le médecin affiche un regard empathique derrière ses lunettes, elle l'écoute attentivement en hochant la tête. Le technologue finit par lâcher des larmes, son cerveau part en dissociation dès qu'il tente de retrouver certains souvenirs.