Le vent a recommencé à souffler. Le B.G. me jetait de petits coups d'œil. À l'évidence, il avait envie de s'extraire de ce guêpier.
Sandra était revenue auprès de Lily. Leurs traits s'étaient détendus. Toujours aussi câline, Sandra a mis son bras autour de la taille de sa copine et lui a décoché un petit bisou dans le cou. J'ai eu un pincement au cœur. Était-il possible que... ?
Entre filles, on surnommait Lily la cocue magnifique parce que c'était l'officielle de Quentin. Malgré tout, elle bénéficiait d'un grand prestige.
Les mecs AVAIENT PAS INTÉRÊT à l'approcher de trop près. L'année dernière, Maël lui avait volé un baiser. Le soir même, il avait été attaqué par des cagoulés. Ils l'avaient ligoté et laissé dans un fossé après l'avoir déculotté et lui avoir enduit la quéquette avec du cirage. La police avait fait chou blanc. Tout le monde savait qui avait commis cette exaction, tout le monde s'était tu.
Quant aux meufs, elles se montraient obséquieuses. Elles manquaient jamais de lui dire bonjour, de s'informer de sa santé, de lui proposer leurs services, très chère Lily par-ci, très chère Lily par là.
En effet, Lily la Thugesse jouissait d'un droit de veto.
En 6e, Jade, une fille qui avait l'insulte facile et m'avait plusieurs fois prise pour cible, avait cherché à harceler Lily. Elle avait échoué et avait fini par s'excuser.
Mais Lily n'était pas du genre à pardonner. Elle avait attendu son heure et tout le monde était au courant qu'elle avait interdit à Quentin d'adouber Jade. Cela revenait à faire de celle-ci une intouchable. Il ne m'avait pas échappé que Jade, depuis la rentrée, affichait une mine d'enterrement : plus personne ne lui adressait la parole.
Vous aurez compris que le Jeu de la défloration qualifiante n'est pas ma grande passion. Mais il me faut faire une parenthèse afin que vous compreniez bien la différence de statut entre les filles. Il règne une violence extrême dans ce collège de m...
Il y a les intouchables, les intangibles, les adoubables et les adoubées.
Les intouchables (ou looseuses) sont les filles qui ont été blacklistées. Elles sont frappées, humiliées, rackettées. Chacun est libre de leur cracher à la figure en toute impunité, de leur couper des mèches de cheveux (ou même de les raser), de leur voler leurs affaires, de leur arracher leurs vêtements. L'adoubement est exclu mais il ne fait pas bon pour elles de traîner toutes seules. Le terme d'intouchable masque une réalité sordide : les mecs sont autorisés à en faire ce qu'ils veulent. Ce sont en quelque sorte des sous-humaines. Les kilos qu'avait pris Herménégilde depuis la 6e avaient sans doute pour origine la terreur d'être agressée. L'année précédente, plusieurs mecs avaient uriné sur une fille après avoir abusé d'elle. Le bruit courait qu'Adrian, Basile et Dylan Perdieu avaient participé à l'opération. Certains prétendaient que cette fille, une grande Noire, était une cousine de Remarquable.
Les intangibles n'existaient pas pour le moment : ce statut était une revendication des Lolitas gothiques. Personne n'avait le droit de les toucher sans leur consentement. Opaline souhaitait même aller plus loin et obtenir la protection de Quentin. Je n'en revenais pas qu'elle fût aussi naïve : c'était aussi stupide que de confier un gynécée à un prédateur sexuel.
Personnellement, je faisais partie des adoubables. En gros, cela veut dire baisable. J'avais la garantie qu'aucun mec m'agresserait tant que Quentin me considérerait comme relevant de cette catégorie. Mais il pouvait me blacklister à n'importe quel moment.
Bien sûr, le B.G. n'était nullement conscient de tous ces enjeux. Je sentais qu'il avait simplement envie de prolonger notre conversation. Pour lui, Lily n'était qu'une intrigante sans intérêt : il comprenait pas à quel point elle était puissante. Et pourtant ! D'un simple claquement de doigts, elle pouvait décider de transformer ma vie en enfer.
VOUS LISEZ
Le Quoicoubeh monumental
Fiksi RemajaRentrée scolaire de 1re. Un lycée tout pourri. Tout le monde fume des pétards. Quand t'as pas de petit ami, t'es traitée de sac à patates. Les profs pleurent en cours. À part M. Tistic, ils se font tout le temps couper la parole par des QUOICOUBEEEE...