Allongé sur un carré de verdure, il somnolait devant l'astre majestueux qui posait son regard incandescent sur les mortels. Symbole d'éternité pour le monde des Hommes, il demeurait inconnu de celui des Anges. Les Anges sont la véritable éternité, songea-t-il, les étoiles, elles, sont déjà mortes. Ses lèvres s'étirèrent. Quel Ange dormait pour le reste de son éternité au creux du Soleil ? Il devait être puissant pour reposer si près de la Terre. Une créature invincible que seule la Mort put abattre. Des taches blanches encombraient sa vision, il ne distinguait plus rien, pourtant il ne se détourna pas de ce qui brûlait ses rétines. Samaël seul pouvait prétendre à ce trône hors du commun, décida-t-il. L'Archange déchu au règne millénaire qui sombra dans le vice, loin du parcours angélique infaillible.
Il ferma enfin les yeux. Parmi les aplats de lumière qui obstruaient sa vue, le portrait de son ancêtre se fraya un passage. En tous points opposé au brun Gabriel, il revêtait une chevelure enflammée et une peau mate. Et ses yeux, prunelles au bleu nocturne d'où émanaient les relents de la fierté, déversaient leur rage. Eden ne l'avait pas rencontré, il le connaissait mieux que lui-même. Au Paradis, son nom se murmurait dans les recoins, lourd secret répété et amplifié qu'on échangeait au détour d'un chemin parfaitement divin. Samaël, créateur du Baiser de la mort, malfaisante créature, impie pire encore que le Diable dans ses chaudes Enfers. Samaël, le numéro 4, redouté et haï, adulé et interdit. Samaël, l'Ange devenu Homme. Samaël, dans les pas duquel il s'engouffrait tête baissée. Il se précipitait, tel son ancêtre jadis, vers la Mort qui lui tendait les bras.
Il serait mieux encore que le Soleil, lorsqu'il la rejoindrait.
Il se leva et retourna vers le terrain de basket, où la première manche de la compétition devait être achevée. Au silence serein fit place un brouhaha inaudible. Des cris et des exclamations, fourmillement de voix excitées, d'autres déçues, crachant insultes et félicitations. Il soupira en rabattant les pans de son long manteau sur sa poitrine, comme si cela avait pu suffire à le séparer pour de bon de la foule grouillante. Malgré les bousculades, il parvint au banc où il avait aperçu Noa un peu plus tôt. La jeune femme s'y trouvait, entourée cette fois de l'équipe au complet et sautant de joie, avec des cris si hauts perchés qu'ils auraient rendu sourd n'importe quel être sensé.
Mais les Hommes, c'était connu, n'étaient nullement des créatures sensées.
« Eden ! dit la voix débordante d'énergie de Noa en s'approchant de lui tel un oiseau de proie. On a gagné ! T'y crois, toi ? On a gagné !
— C'est bien, dit-il tandis qu'elle le secouait par les épaules. M'as-tu pris pour un sac de pommes de terre ? »
Elle le lâcha et retourna à ses sauts autour des sportifs — s'était-elle muée en lapin ? Il chercha Jay du regard et tomba sur Elias qui le dévisageait. Il fronça le nez, décidé à lui faire payer son comportement arrogant dans les toilettes. Il n'était pas né, celui qui pourrait insulter Eden impunément. Il ne naîtrait jamais. Il le dévisagea de la tête au pied avec tout le dédain dont il était capable, s'attarda sur la clavicule dévoilée par le col de son haut — il avait toujours eu un faible pour les clavicules —, puis il se détourna avec son habituelle expression indifférente, la lèvre retroussée.
Il dénicha enfin Jay, dressé parmi les membres de son équipe et le rejoignit en quelques enjambées.
« Vous avez eu de la chance, disait-il, je vous assure que ce n'était que de la chance. Votre technique était déplorable, c'est à se demander à quoi servent les entraînements.
— Jay a raison, on a mal joué, dit Yan en vidant sa bouteille d'eau. On a gagné à la deuxième mi-temps uniquement grâce aux fautes de nos adversaires.
![](https://img.wattpad.com/cover/292089354-288-k397729.jpg)
VOUS LISEZ
Eden - Le Temps ne s'arrêtera pas
Paranormal𝐸𝑑𝑒𝑛 𝑡𝑜𝑚𝑏𝑎. 𝐸𝑡 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑠𝑎 𝑐ℎ𝑢𝑡𝑒, 𝑠𝑎 𝑔𝑙𝑜𝑖𝑟𝑒 𝑖𝑙 𝑒𝑚𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎. Eden est un Archange déchu, descendant des plus prestigieux représentants du Ciel. Eden est noble, fier, beau. 𝑃𝑎𝑟𝑓𝑎𝑖𝑡. Eden, pourtant, se perd et s'enf...