Chapitre 5 (1/4) - Adrian

103 15 134
                                    

Adrian fit craquer sa nuque. 

Il s'était attendu d'une pelleteuse qu'elle atteigne le double en taille de celle qu'il fixait dorénavant. La silhouette métallique jaune safran les dissimulait à peine, lui et trois de ses hommes. Etienne leur avait pourtant juré que ce modèle pouvait en camoufler deux autres de plus.

Il resserra le bracelet de sa montre autour de son poignet avant de se tourner vers Andrea. 

 -Une chance qu'on puisse toujours compter sur tes plans de secours. Lui dit-il en désignant du menton le tractopelle derrière lequel elle se tenait debout, entourée de quinze combattants de son régiment.

Elle se l'était procurée seulement une heure plus tôt. D'une hauteur de quatre mètres et d'une longueur de six mètres, l'engin de chantier leur permettait de déguiser la majorité du commando aux yeux des chauffeurs du convoi. Pas moins d'une quinzaine d'hommes étaient, par conséquent, recroquevillés derrière ses flancs, en attente du signal de lancement de l'opération.

Utiliser des engins de chantier comme bouclier visuel, c'était son idée. 

Pour avoir fréquenté des routes de campagnes comme celle-ci durant toute sa jeunesse, il savait qu'un site de construction, et ses mastodontes de ferraille, se fondaient dans le paysage. Rien de tape à l'œil. Idéal pour cacher leur groupe d'intervention jusqu'à l'arrivée du convoi. Comment aurait-il pu cracher sur une cachette si ingénieuse qu'elle leur permettait de se placer incognito à moins de cent mètres du virage serré qu'ils avaient choisi pour mener leur attaque ?

Insensible aux louanges, Andrea hocha la tête en un remerciement silencieux puis navigua entre ses hommes pour sa traditionnelle vérification des équipements tandis que, sous les doigts crispés d'Adrian, la ligne grésilla pour introduire la voix bourrue d'Emmanuel.

- Walkie check ! 

Son rythme cardiaque monta au créneau. 

- Les spotters*sont en place. Prêt à transmettre les indications. Confirmez la transmission. 

Accroupi au bord de la route, Adrian s'appuya d'une main sur la pelleteuse pour se stabiliser et, les mâchoires serrées, résista à l'envie de passer sa main gantée sur son visage. Emmanuel s'apprêtait à lancer le coup d'envoi de leur opération, de quoi incendier ses tripes d'appréhension.

Il avança le talkie walkie à quelques centimètres de son visage et pressa le bouton "Push To Talk" avant de confirmer :

- Copy*.

- Target en Alpha. Confirmez la transmission.

Adrian visualisa mentalement la carte satellite du site, qu'il avait appris par cœur. Target en Alpha. Le convoi avait dépassé le point de passage A. Si comme envisagé, les chauffeurs respectaient la vitesse limite de 80 km/h,  la cible franchirait en moins d'une minute, les 1 500 mètres qui les séparaient de la zone d'action.

- Copy, renouvela-t-il, en estimant intérieurement la prochaine indication des spotters qui signalerait l'arrivée du convoi au point de passage B, située à 245 mètres du premier point.

Approximativement trois secondes plus tard, le talkie walkie crachota un "Target en Bêta" grésillant. 

Il confirma à nouveau la transmission alors qu'Andrea lui jetait un coup d'œil, empreint d'un sérieux inflexible. Quand il lui rendit son regard, elle se tourna vers Ambre, membre junior du commando, pour redresser le canon du fusil d'assaut qu'elle tenait vers le bas. Bien qu'il resta concentré sur les indications d'Emmanuel, il l'entendit expliquer à la jeune femme qu'elle s'y prenait à merveille si elle voulait se faire canarder dès les premières secondes. Puis après un claquement de doigts, elle la somma d'aller se placer derrière les plus expérimentés du groupe qui ouvriraient l'infiltration pédestre jusqu'aux voitures.

τρία - Nouvelle versionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant