Chapitre 9 (2/3) - Adrian

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[Début de partie 2/3]

Roos gratifia son bandage d'une chiquenaude. 

- En parlant de pain et de table, c'est mon anniversaire vendredi soir, avoua-t-elle à demi-mots. Oui : trente et un ans déjà.

Sa voix oscilla sur cette dernière révélation. Elle leva les yeux au ciel en réponse à l'air faussement choqué d'Adrian et porta les deux mains en l'air. 

- Mon dieu, les bourreaux se font de plus en plus jeunes de nos jours.

Un rire franc se déploya de la gorge de Roos. Cette soudaine hilarité dérida Adrian.

Quand la jeune femme rouvrit ses yeux larmoyants, ses pupilles accrochèrent le sourire qui trancha son visage. D'ordinaire insondable, son regard qu'il connaissait si bien se colora. Adrian savait que ses dents n'étaient pas parfaitement droites et que leur désordre suscitait parfois le regard d'indiscrets mais la curiosité qui alluma le regard de la jeune femme était d'une autre nature. De la convoitise.

Il ferma ses lèvres, soudain à l'étroit, offrant sans le vouloir l'opportunité à ses iris onyx de s'égarer autre part. Il les regarda couler le long de sa jugulaire jusqu'au col ouvert de sa chemise en lin marron. Roos l'avait souvent complimenté sur cette chemise, sur ô combien il avait fait une affaire en l'achetant. A cet instant, il aurait pu croire que c'était elle qui avait fait une affaire, non lui. Ses yeux le complimentaient de la même façon, s'attardant sur les zones que le vêtement épousait avec dédication. Une œillade à ses épaules, leurs trapèzes. Un coup d'œil jeté à son torse et plus timidement à son abdomen. Adrian en avait conscience : les conséquences de son entrainement intensif avec Ziad était plus que visuelles, à peine masquées. Bien que sa garde robe eut déjà été adaptée à sa carrure deux fois cette année.

Ce regard contemplateur, échappé peu de fois jusqu'ici, était aujourd'hui volontaire et audacieux. Roos releva finalement les yeux au niveau des siens. Ils se plièrent sous l'effet de son amusement.

- Arrête tes blagues et laisse moi finir. 

- Okay, je t'en prie.

- C'est mon anniversaire et je me disais, si ça te tente : on pourrait aller manger un morceau tous les deux au quartier des affreux.

- Au quartier des affreux, cet endroit de malheur ?

- Depuis quand le quartier des affreux est-il un endroit de malheur ?

- C'est bourré de mauvaises adresses. Tu sais ce bar qu'on fréquente pas mal, juste dans le coin au croisement de ...

- Le Tagay Tayo oui. Ou tu veux en venir ?

Adrian se figea imperceptiblement au souvenir de sa dernière soirée passée dans ce quartier. Ce soir-là, il avait été aussi téméraire que Roos aujourd'hui, au point que Ziad n'avait eu d'autre choix que de le porter à bras le corps jusqu'à la banquette arrière de sa voiture.

- Nul part. 

- Je vois... Si tu parles de vendredi dernier, je comprends que le sujet puisse être vertigineux. La voiture de Ziad s'en souvient encore à ce qu'on m'a dit.

Elle lui fit un clin d'œil. 

- Un de mes plus beaux faits d'armes je dois dire. 

-  Pour ce qui est de ma proposition de diner, ça peut être autre part. En terrasse. Sous un rayon de soleil. Qu'en dis-tu ? 

L'évocation de son bar favori et de cette soirée mémorable aurait pu continuer à le faire sourire si son amie ne l'avait pas fixé en attente d'une réponse à son invitation. Une invitation à plus, bien plus qu'il ne pouvait lui offrir.

τρία - Nouvelle versionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant