Merde, comment osait il l'appeler ainsi ?
Mon amour.
Deux des mots les plus précieux qu'elle puisse recevoir. Echappés des lèvres d'un homme qui sous-estimait leur importance. Elevés par le silence assourdissant de l'habitacle, que Sinatra avait déserté. Sculptés par cette voix. Ses tonalités graves. Les mêmes qui avaient éventré son cœur une semaine auparavant.
"Je veux bien comprendre les choses Charlie, mais je dois aussi m'occuper de moi, de mes affaires, de mes problèmes. C'est vraiment compliqué en ce moment.".
Elle secoua la tête pour échapper au souvenir cru. Elle se maudit du changement de la nature de ses sanglots étouffés dont seul Alexis aurait du être la muse, pas lui. De sa main tremblante, elle lissa sa jupe comme dernier recours pour reprendre le contrôle sur ses émotions.
"Charlie, j'aimerais que l'on se voit pour parler.".
L'éclipse du souvenir des derniers heures de leur relation l'étrangla. Les paupières closes, elle se pencha en avant pour dissimuler, aux yeux d'Eduardo, ce que d'aucun appellerait un chagrin d'amour. Elle se concentra pour atténuer les rasoirs de sa gorge. En vain. Même la goulée d'air qu'elle s'était efforcée à inspirer, détala immédiatement de ses poumons comprimés.
"Sache que je n'ai jamais eu l'intention de te faire souffrir, je m'y suis clairement mal pris.".
Se faire violence, elle devait se faire violence.
Son estomac se cabra en une nausée houleuse et indomptable que, seule sa volonté de ne pas vomir dans la voiture lui permit d'enrayer. Brièvement du moins. Son corps belliqueux revenait déjà doublement à la charge.
- Je vais vomir. articula-t-elle sans hésitation, avant de plaquer la paume de sa main sur ses lèvres scellées.
A l'effet que ses doigts firent sur ses lèvres, elle eut envie de crier. La sensation incendia ses pensées des souvenirs huileux de la veille. De l'attaque. Du meurtre de son meilleur ami. La main d'Alexis avait été plus grande que la sienne et ses doigts plus calleux mais son cœur meurtri se serra de la même façon.
"Retiens ta respiration, Charlie. Il arrive.".
Ca n'avait été qu'un chuchotement. Pourtant, il avait perforé ses tympans et l'avait assourdi pour le reste de sa vie.
- Mademoiselle ? S'enquit Eduardo d'une voix prévenante.
Entre les larmes qui lui montèrent aux yeux, que les uppercuts de son estomac hargneux envenimaient, elle entrevit le froncement de sourcils concerné du chauffeur dans le rétroviseur. Son nez plié. Ses bras raidis, prêt à intervenir en cas de besoin. Désorienté, il baissa le son comme si cela suffisait pour les soustraire à l'oreille indiscrète de Tommaso, ou pour le préserver de l'acte théâtral qu'elle jouait sur la banquette arrière.
"Quoi qu'il se passe, ne bouge pas Charlie. N'interviens pas. Ne respire pas.".
Inspiration.
"Je ne sais pas trop par ou commencer mais si tu veux bien que l'on se voit pour discuter."
Expiration.
"Souviens toi que je t'aime Charlie.".
Compression.
- Arrêtez-vous.
Une supplique plus qu'un ordre. Un pleurnichement de détresse même. Rauque. Eraflé. Pathétique. Le genre de désespoir qu'on gardait pour soi, recroquevillé sous les couvertures de son lit.
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τρία - Nouvelle version
RomanceComment réagiriez-vous si vous appreniez, à l'aube de vos vingt-cinq ans, que vous ne faites pas partie du genre humain ? Que jusqu'ici votre vie n'a été qu'un mensonge éhonté dissimulant la vérité sur votre véritable identité ? Qu'une vaste série d...