Cette nuit a été mouvementée. Je me suis réveillée plusieurs fois, en nage. Pablo m'a aidé à me rendormir mais le dernier cauchemar était celui de trop, il est 05 heures du matin et je n'ai plus sommeil. En passant devant la chambre d'amis, que mes parents ont installée pour les Verdura, je remarque que de la lumière se glisse sous la porte. J'entre discrètement, Savannah dort profondément alors que Stan se démène pour gagner sa partie de jeux vidéo.
- T'as pas sommeil non plus ? Demande-je en chuchotant
- Tu m'as fait peur ! Chuchote-t-il, une main sur le coeur
- Désolé... M'excuse-je en me rendant compte de l'impact qu'a eu mon geste, parfois il m'arrive d'oublier qu'ils étaient là...
- C'est rien... me rassure-t-il
- C'est comme ça que t'occupes tes nuits ? Ricane-je
- Faut bien faire quelque chose, sinon... soupire-t-ilIl n'a pas besoin de finir sa phrase, je comprends ce qu'il veut dire. Les pensées sombres s'installent dans les esprits lorsqu'ils sont vides. C'est pourquoi, il faut toujours s'occuper.
Stan m'adresse un sourire avant de remettre son casque et reprendre sa partie. Un bruit me fait soudainement sursauter et la tête de mon père apparaît dans l'entrebâillement de la porte.
- On t'a réveillé ? Demande-je, inquiet
- Non... vous n'arrivez pas à dormir ? Sourit-il
- Non... du coup, je vais jouer avec Stan en faisant attention de ne pas réveiller Savannah, si elle, elle peut dormir je suis content... souris-jeIl hoche la tête et m'adresse un clin d'œil avant de sortir de la pièce.
Stan et moi sommes restés éveillés plusieurs heures à jouer, lire et parler. On se demande comment se passera la reprise des cours, la reprise d'une vie en société, de notre vie tout court. Ça nous fait peur... Pablo m'a réveillé en début d'après-midi, j'ai mon rendez-vous hebdomadaire chez la psy. Après quelques câlins et bisous, il est parti travailler et je me suis enfin décidé à me lever.
[Chez la psy]
- Comment vas-tu aujourd'hui Willow ? Demande-t-elle accompagnée de son éternelle sourire chaleureux
- Pas très bien... j'ai mal dormi cette nuit...
- Des cauchemars ?
- Oui... c'est toujours les mêmes images qui me reviennent... j'ai l'impression de ne pas avancer... de faire du sur place... mais je me suis souvenu de quelque chose ! M'exclame-je ensuite
- Oui ? S'interroge-t-elle en attrapant son bloc notes
- Je suis sorti du bâtiment, je sais pas comment, ma vision est floue, tout ce que je peux dire c'est que je sens l'air sur mon visage. Enonce-je
- Qu'est-ce que tu ressens ? Quelqu'un est avec toi ?
- Je crois pas... c'est bizarre... j'ai pas l'impression de marcher, ni d'être porté non plus d'ailleurs, c'est bizarre... je sais pas... je... je sais pas comment je suis arrivé là...Elle a noté cette information puis nous avons passé les dix dernières minutes à parler de la relation avec mes parents, à quel point elle s'est améliorée mais comment ils peuvent être aussi traumatisés que moi. C'est dur pour eux et je les comprends.
- Après que ça se soit passé, je m'attendais à ce que mon père m'interdit de fréquenter Pablo à nouveau... avoue-je. Mais, finalement non... souris-je
- Je pense que tes parents sont les mieux placés pour savoir que, dans ce monde, l'improviste tient le rôle principal... et qu'il est dur de tout contrôler...
- Oui... la preuve, ils ont essayé de me protéger pendant 17 ans et pourtant on a quand même fini par les retrouver...
- Est-ce que tu leur en veux de ne pas t'avoir mis au courant ? De ne pas t'avoir inculqué... l'auto-défense ?
- Je sais pas... soupire-je. Quelque part, je me dis que, de cette façon, ils m'ont permis d'avoir une enfance... que c'est en partie grâce à mon ignorance que je peux, aujourd'hui, discerner le bien et le mal... Ma mère m'a confié récemment que pendant longtemps elle n'arrivait plus à faire la distinction entre les deux... et que ça lui avait fait mal de voir quelle personne elle était devenue... alors je crois que je leur ai pardonné ce mensonge... c'était un MAL pour un "BIEN"... dis-je en formant des guillemets avec mes doigts pour le dernier mot."Bien" est un gros mot pour décrire ma situation actuelle, si on prend en compte mes rendez-vous chez la psy toutes les semaines, mes cauchemars et mon besoin inconditionnel d'être entouré. C'est la première fois que je le remarque d'ailleurs.
- Vous croyez que mon traumatisme a pu déclencher une peur de l'abandon et une dépendance affective, je sais pas comment vous appelez ça...
- Tu te sens souvent obligé d'être entouré pour te sentir mieux ?
- Oui... tout le temps, il m'arrive même de demander à Pablo d'attendre derrière la porte des toilettes et de me parler... avoue-je, tête baissée
- C'est complètement normal Willow, il n'y pas de quoi avoir honte, tu peux me croire ! Dis-moi comment tu te sens intérieurement dans ces moments-là ?
- Je me sens seul... J'ai l'impression d'avoir perdu toutes les personnes sur qui je pouvais compter... en qui j'avais confiance... chuchote-je avant de racler ma gorge pour étouffer mes larmes. Et pourtant c'est ridicule parce que je suis entouré des mêmes personnes qu'avant ! Ricane-je, des larmes coulant le long de mes joues
- Tu sais Willow... Parfois quand le cerveau ne veut pas l'admettre et que la bouche refuse de le dire, le cœur tente par tous les moyens de faire comprendre son mal être... parfois ce sont par des douleurs physiques ou alors émotionnelles...
- Mon cœur essaie de me parler ?... Demande-je, à deux doigts de ricaner
- On peur voir ça comme ça... il essaie de faire remonter à la surface ce que tu as, malheureusement, enfouies profondément en toi... et qui te bouffe de l'intérieur...Le bip du chronomètre sonne et ça marque la fin de la séance. Mon père, qui normalement, m'attend dans la voiture, est assis dans la salle d'attente. Il me tend les clés de voiture en me demandant de l'attendre à l'ascenseur et de descendre si jamais il est trop long, il doit parler avec Madame West. On l'appelle tellement "la psy" que j'en ai oublié que son vrai nom. Curieux de nature, je ne peux m'empêcher, après avoir appuyé sur le bouton, d'écouter, de l'autre côté de la porte, ce qu'ils se disent.
- Est-ce que vous pensez qu'il est prêt ? Demande mon père
- Il souffre beaucoup intérieurement... je crains que son coeur ait pris le dessus...
- Qu'est-ce que ça veut dire ?! S'impatiente-t-il
- Ça veut dire que tout ce dont il se rappelle est ce que son coeur a jugé bon de lui donner...
- Quoi ?! Comment un coeur peut décider cela ?! S'agace mon père maintenant
- Monsieur Carrington... l'organisme, que protège d'une enveloppe notre corps, a une force bien souvent sous-estimée... l'hippocampe, la partie du cerveau qui joue un rôle central dans notre mémoire, fait également partie, avec d'autres structures, de la zone qui contribue à la gestion de nos émotions... on l'appelle le système limbique... de ce fait, en cas d'émotions trop intenses, tel que le stress, la peur, la douleur... le cerveau peut alors se retrouver submergé, complètement incapable de contenir ce qu'il a subit et peut rompre toute connexion entre les structures du système limbique... c'est ce qui provoque l'amnésie dissociative... Le cœur et le cerveau de votre fils, si on peut dire ça comme ça, se battent l'un contre l'autre pour savoir lequel des deux est le plus apte à protéger Willow... si son cœur tente de découvrir la vérité, de faire sortir tout ce qui a été enfouis auparavant... le cerveau essaie, quant à lui, par tous les moyens de le préserver... Explique-t-elle calmement
- Et combien de temps ça peut durer cette histoire ?
- Deux semaines comme deux ans... on ne sait pas malheureusement...
- Je ne tiendrai pas aussi longtemps... il faut qu'il se souvienne... je ne peux plus le voir comme ça... Vous comprenez ? C'est mon garçon... Répond-t-il, la voix tremblante
- Je comprends... mais lui faire affronter la vérité brutalement pourrait lui faire plus de mal...
- Vous croyez ? Vous savez ce qui s'est passé, vous, vous pensez réellement qu'il en sortira moins affecté dans deux ans ?!
- Je...
- A la prochaine séance, je veux que vous fassiez ce dont vous m'aviez parlé... C'est mon fils et tant qu'il ne sera pas capable de faire des choix sensés, je déciderai à sa place... faites-le la semaine prochaine ! Un point c'est tout...
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Bratva : TOME 2 : Mon pire cauchemar [BoyXBoy]
RomantizmUn appartement, 3 colocataires, il n'aurait jamais parié sur cette vie et pourtant, il est heureux. Willow a réussi à changer Pablo. Mais comme dit le dicton : « après le calme vient la tempête », ou plutôt une tornade... ils n'étaient pas préparés...