Wattoscopies

Wattoscopie : « Daddy Cool » de @drotjulien

La wattoscopie, c'est la petite escapade sur Wattpad, un moment privilégié où l'on se fait plaisir avec des nouveautés.

Comme je l'ai précisé à la fin de ma dernière wattoscopie, je comptais vous parler de Vampires sous eighties de drotjulien. L'ouvrage m'a été signalé par une jeune entrepreneuse qui se reconnaîtra. Mais l'auteur, entre-temps, a dépublié son livre (qui, dans mon souvenir, totalisait déjà sept chapitres). Mon analyse est donc reportée sine die, — en attendant que le roman soit de nouveau proposé à la lecture ! Le but de ces wattoscopies est d'abord et avant tout d'attirer l'attention sur certains écrits, cela ne sert à rien s'ils disparaissent.

À défaut, je me pencherai aujourd'hui sur « Daddy Cool », une nouvelle du même auteur issue d'un recueil intitulé Romances insolites. J'espère qu'elle ne s'évaporera pas elle aussi dans l'intervalle !

Je serai moins disert sur cette nouvelle que je ne l'aurais été sur Vampires sous eighties. Je m'aperçois également qu'il m'est difficile d'en offrir une analyse sans la spoiler. Je propose donc à mes lecteurs d'aller d'abord la lire (cela ne leur prendra que quelques minutes) et de revenir ensuite à cette wattoscopie (si cela leur dit). Vous ne perdrez pas votre temps, l'histoire est très réussie.

Un quinquagénaire heureux en ménage s'est laissé convaincre par sa fille de 23 ans de partir en vacances à quatre sur une île paradisiaque. La personne en plus : le petit ami de sa fille. Il s'appelle Hugh et sa beauté bouleverse le quinqua. Contre toute attente, ce dernier est assailli par des fantasmes homosexuels... Au lieu de chercher à les juguler, il choisit de les laisser prendre possession de lui tout entier...

Dans une histoire ordinaire, ces fantasmes seraient vécus douloureusement : un homme sur le déclin qui désire un garçon aux biceps huileux est voué à d'atroces souffrances. C'est ce que raconte Thomas Mann dans la Mort à Venise, dont l'adaptation au cinéma par Luchino Visconti (1971) a marqué plusieurs générations de cinéphiles (je précise tout de même que Tadzio, devenu après ce film une icône de la culture homosexuelle, n'a pas de biceps huileux). Le narrateur de @drotjulien souffre lui aussi, mais les clichés doloristes sont remisés au placard.

Une variante banale consisterait à faire de ce mâle vieillissant un misérable pervers attendant son heure, — mais là encore, l'auteur prend une autre direction.

Cette rencontre fournit en effet au quinqua l'occasion de découvrir son attirance insoupçonnée pour les garçons. Révélation bénéfique dans la mesure où il cesse de vivre le poids des ans comme une dégradation et s'accepte mieux tel qu'il est devenu, — c'est-à-dire plus flasque, moins sexy, moins élancé. L'auteur choisit de ne pas s'attarder sur le lien de cause à conséquence entre la découverte et le mieux-être : tout, ici, est formulé à demi-mots. Il laisse entendre davantage qu'il ne montre.

Libre au lecteur de laisser vagabonder son imagination, soit en imaginant une suite à cette histoire suspendue (la fin est ouverte), soit en tentant de comprendre comment cet homme, en se découvrant homosexuel, est parvenu à mieux vivre les atteintes de l'âge...

J'ignore quelle sera la prochaine wattoscopie, peut-être vous parlerai-je de JenyfaireChaChaCha. À très bientôt !