Après-midi mouvementée - Irina

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Maria m'entraîne à travers les couloirs dans cet entrepôt. Je n'y suis venue qu'une seule fois et c'était pour monter dans les bureaux. Dans cette partie-là, nous rejoignons les pièces dans lesquelles les cargaisons sont entassées. L'endroit n'a rien de chaleureux ou de convivial. C'est un immense hangar dans lequel les murs sont d'un gris foncé et d'un sol en béton. Plusieurs étagères mesurant dix mètres de haut sont étalées dans de longues allées. Des chariots élévateurs sont requis pour faire descendre certaines palettes. Des tables en métal sont dans le centre de la pièce et des hommes sont attablés dessus à pianoter sur des claviers, face à des écrans d'ordinateur. Au moment où nous passons derrière l'un d'eux, je jette un rapide coup d'œil pour déceler ce que la personne fait, mais l'écriture apparaît en polonais. J'aurais dû m'y attendre, mais ma curiosité est bien plus forte que ma logique.

Maria ouvre une porte au fond d'une allée et je ne peux qu'écarquiller les yeux en découvrant le spectacle. Mes pieds se stoppent dans ma course et mon binôme ne semble pas s'apercevoir que je ne la suis plus. L'endroit est plus petit et plusieurs plans de travail sont éparpillés devant moi. Des hommes déchirent l'emballage des colis, d'autres pèsent de la poudre blanche puis la séparent, tandis que certains empaquettent déjà les prochains envois. Ils font dans le trafic de stupéfiants. Cependant, dans mon dos, là où nous étions juste avant, il n'y avait pas de drogue visible.

— Qu'est-ce que tu fais ? m'interroge Maria, en s'arrêtant de marcher. Viens.

Mes jambes m'obéissent de nouveau et je me dépêche de la rattraper. Elle m'emmène jusqu'à un escalier qui assène une vue sur une pièce aux immenses vitres. Nous les montons, puis entrons. C'est un simple bureau qui comporte une table de travail, un ordinateur, un siège, deux fauteuils pour les inviter et un canapé calé contre un mur. Le noir et le rouge font un mélange de contraste sur les parois. Le panorama donne sur les employés qui s'occupent de la cocaïne. Aucune vue sur l'extérieur cependant.

— Fais comme chez toi, me lance Maria. Je dois me préoccuper de la trésorerie et de la marchandise. D'après Aleksander, il y aurait des soucis de cargaisons.

Je l'écoute sans vraiment englober tout cela. Elle est la comptable de la société, ça, je l'ai bien compris.

— Vous faites dans la drogue, c'est ça ? demandé-je en marchant dans la pièce, pour contempler le peu de décoration qui égaye l'endroit.

— Les armes et la contrebande aussi, réagit-elle. Mais pour la contrebande, nous aimerions arrêter.

Je tourne la tête vers elle, intriguée par la fin de sa réponse.

— Notre père, commence-t-elle en mimant des guillemets sur le mot, touchait à tout. Il allait même jusqu'au trafic de femme, mais mes frères ne sont pas comme ça.

Elle marque un temps de pause et prend place sur son fauteuil. Elle lève ses yeux grisés sur moi, puis continue :

— Quand Aleksander a pris le pouvoir, il a libéré les filles et a gardé le restant. Nous gagnons bien assez avec la drogue et les armes. L'autre recel n'est qu'un bonus qu'il trouve inutile. On doit voir avec un allié pour lui donner le privilège dessus.

Alors que je regarde à nouveau les employés, ma fichue curiosité revient à la charge, comme un lion affamé face à sa proie.

— Tu mimes le mot père, est-ce que c'est parce que tu ne l'aimes pas ?

Le silence qui m'est renvoyé en réponse m'oblige à détourner les yeux et les reposer sur sa personne. Elle semble perdue dans ses pensées, un demi-sourire élargit ses lèvres fines.

— Je... Ce n'est pas notre vrai père. Je n'étais qu'un bébé lorsque le drame s'est déroulé et je n'ai jamais connu nos parents. Mes frères avaient six et cinq ans quand tout a basculé. J'ai chéri mon père malgré les mauvais choix qu'il pouvait prendre. Eux aussi l'aimaient, cependant, ils ont dû subir des choses pas très joyeuses.

Je veux vivre TOME I - Dark RomanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant