Chapitre 16

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Le vendredi matin, je me réveille d'humeur maussade. Après avoir repoussé le réveil trois fois, je me traîne hors du lit avec peine. Lorsque je m'installe avec mon café, je renverse la tasse. La journée commence bien ! Je nettoie en vitesse mais je n'ai plus le temps de m'en faire un autre. Si seulement je n'avais pas traîné autant avant de me lever. Sans ma dose de caféine, je suis perdue. La preuve, au moment de partir je ne trouve plus mes clés. Pourtant je ne suis pas le genre de femme qui passe son temps à chercher ses clés. Après avoir retourné toutes les pièces, je finis par les trouver à leur place ! J'avais juste posé mon courrier par dessus. Je ne suis vraiment pas en avance. Heureusement que ma première cliente, une jeune femme qui vient de racheter une épicerie de quartier, est plutôt sympathique.

Lorsque j'arrive devant l'épicerie, évidemment, je ne trouve pas de place pour me garer. C'est la loi des séries. Je me gare plusieurs rues plus loin et file le plus vite possible. J'arrive chez elle complètement essoufflée. Je n'ai pas couru, il ne manquerait plus que je me casse une jambe ! J'ai déjà donné et je ne compte absolument pas recommencer l'expérience. Je me suis cantonnée à une belle marche rapide et avec ma grosse sacoche à trimballer, c'était sportif. Et ridicule aussi, j'ai bien vu du coin de l'œil quelques passants rire en me regardant. La patronne est en train de servir des clients. Lorsqu'elle m'aperçoit, elle me sourit et m'invite à patienter. Le rendez-vous se passe bien et j'enchaîne la journée comme je peux. Certains de mes plus anciens clients s'aperçoivent bien que je suis à côté de la plaque. Heureusement qu'ils sont patients, je crois que j'ai fait des erreurs dans toutes les commandes de la journée. Tous sans exception ont dû les corriger. La journée touche à sa fin et je file chez moi pour me changer. Ce soir, je sors avec Noémie. J'espère que ça m'évitera de penser en boucle à Gabriel et Mélanie.


Noémie me raconte sa fin de semaine en audit pour le rachat de l'entreprise. C'est très éprouvant pour elle. Elle connaît la position de Spaghetto et elle réfléchit à deux fois avant de répondre à la moindre de leurs questions. Les journées sont interminables pour elle et la pression est difficile à gérer. L'équipe d'audit est composée d'une femme et d'un homme. Selon la description de Noémie, tous deux ont une petite trentaine et une ambition qui suinte par tous les pores. Malgré cela, leur comportement est irréprochable, à aucun moment ils ne la pressent ou essaient de lui tirer les vers du nez. Elle n'en est que plus méfiante :

— Ceux qui sont aimables sont les plus sournois. Par devant, on ne trouve rien à leur reprocher mais ils analysent tout. Le moindre comportement leur donne des indices et ils savent bien sur quel terrain il faut s'orienter. En tout cas, je suis épuisée. Bien que n'ayant rien à cacher, je fais tout pour démontrer que le Cochon fonctionne bien avec son organisation actuelle. J'espère leur faire entendre raison même si je n'y crois pas trop. Les bureaucrates ne voient que des chiffres sur des papiers, pas des êtres humains. En tout cas, je croise les doigts pour qu'ils me lâchent un peu la semaine prochaine. Monsieur Berger m'a demandé de les prendre en charge et de les garder avec moi le plus possible mais je suis à bout. Ces trois journées ont été les plus longues de ma vie. Elles ont été même plus longues que mon premier accouchement ! Et ce n'est pas peu dire. Je serai désolée pour celui ou celle sur qui ça va tomber mais je crois que le soulagement l'emportera sur ma conscience.

Un silence s'installe et Noémie m'interpelle :

— Qu'est ce que tu as ? Tu es vraiment ailleurs aujourd'hui. Je viens de parler pendant une bonne demi-heure et c'est à peine si tu as décroché quelques mots.

— Juste une journée difficile.

— C'était le jour du client pervers ?

— Même pas ! réponds-je en riant.

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