Chapitre 17

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Déjà lundi, j'attaque une nouvelle semaine de travail. L'audit prévu par Spaghetto a commencé la semaine dernière mais je n'ai pas été directement concernée puisqu'ils sont restés avec Noémie. Ce matin, j'ai un mauvais pressentiment. Le week-end n'a pas été top, c'est le moins que l'on puisse dire, et je sens que la semaine ne va pas être mieux. Je m'installe devant mon bureau et je n'ai même pas le temps d'allumer mon ordinateur que mon téléphone sonne. C'est Noémie, elle m'annonce que l'équipe d'audit veut me rencontrer. Mon premier réflexe serait de gagner du temps en prétextant des rendez-vous clientèle mais d'une part je sais que Noémie ne serait pas dupe et d'autre part, elle a bien besoin de souffler un peu et c'est mon amie. Je prends mon courage à deux main et lui signifie donc que je les attends dans mon bureau. Ils arrivent peu après et mon calvaire commence.

Ils restent toute la matinée avec moi, m'interrogeant sur les clients et l'organisation du service commercial. A un moment je me demande pourquoi ils ont choisi de m'auditer. Malgré mes quelques années de travail au Cochon Poitevin, je reste la plus jeune et surtout la dernière arrivée dans le service. Je n'ai pas vraiment le temps de creuser la question car ils n'arrêtent pas de m'interroger. Ils enchaînent les questions sans relâche. Je comprends l'épuisement de Noémie. Et dire qu'elle a subi ça pendant trois journées complètes ! Elle mérite une médaille, ce n'est pas juste une secrétaire de direction lambda, sous son tailleur, elle doit avoir son costume de super héroïne. Mon esprit divague, je l'imagine en train d'arracher son chemisier pour courir au secours de nous autres, pauvres employés en danger. Malheureusement mes bourreaux ne l'entendent pas de cette oreille et me rappellent à l'ordre chaque fois que je m'évade dans ma tête.

Soudain, mon estomac émet des gargouillements sonores, il doit bientôt être l'heure de la pause. Les auditeurs lèvent les yeux au ciel et poussent un soupir. La matinée a dû être longue pour eux aussi. Je n'ai peut-être pas été aussi coopérative qu'ils le souhaitaient. En même temps, ils étaient ennuyeux comme la pluie et je n'arrêtais pas de penser à autre chose. Comment j'allais pouvoir rattraper tout le travail prévu ce matin ? Comment allait se passer ma prochaine rencontre avec Gabriel ? Comment les auditeurs faisaient pour être aussi pénibles ? Comment était Gabriel sous son tee-shirt ? Comment me débarrasser de ces deux teignes ? Comment me rapprocher de Gabriel ? A un autre moment je me rappelais l'expression de Noémie sur leur ambition qui suintait par tous les pores et je me les imaginais couverts de sueur. J'espère qu'ils n'ont pas compris ce que cachait mon sourire mais je crains qu'ils en aient déduit que je me moquait d'eux. En même temps, c'était un peu vrai. Ils finissent par me remercier et déguerpissent de mon bureau avec un air soulagé. Si je n'ai pas réussi à défendre l'entreprise et son organisation, j'aurais au moins réussi à les agacer et c'est une petite victoire pour moi.

Je passe l'après-midi à courir de rendez-vous en rendez-vous tout en rattrapant une partie de mon travail de la matinée. Pour le coup, je ne vois pas passer l'après-midi. Je finis plus tard que ce que j'avais prévu et il me tarde de retrouver ma douche pour me détendre un peu. L'interrogatoire de ce matin et la course de cet après-midi ont rendu mes muscles tout crispés. Lorsque j'arrive dans la rue, je découvre que je peux être encore plus tendue : la DS est encore là ! J'essaie d'approcher discrètement pour enfin découvrir qui est au volant mais c'est peine perdue. Ma voiture n'est pas électrique et on l'entend venir de loin. Je suis encore à une bonne centaine de mètres lorsque la voiture déboîte et s'éloigne dans la rue. J'hésite à la suivre mais je suis trop épuisée ce soir. Chaque chose en son temps.

J'avais prévu d'aller voir mes voisins le week-end dernier mais finalement, j'avais le moral dans les chaussettes et je n'en avais pas eu le courage. Cette fois-ci, quoi qu'il se passe dans ma vie, je me promets d'enquêter ce week-end. Je ne remettrai pas à plus tard. Si j'attends encore, je vais finir égorgée dans ma baignoire par ce détraqué. Je suis trop jeune pour mourir.

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