Manakiel & Sowl (mxm)

Chapitre 10 : Manakiel

— Je peux savoir ce qu'on fait là ?

A plat ventre aux côtés de ses acolytes Pierre et Tarkin, Manakiel tourna la tête vers Sowl qui semblait encore contrarié d'avoir été réveillé au beau milieu de la nuit. Loin d'en tenir compte, il lui tendit sa paire de jumelles pour qu'il observe à son tour le chantier situé en contrebas.

Les quatre hommes étaient postés sur une petite colline qui surplombait la zone industrielle de la Municipalité, non loin de l'Extraordinarium. Des poutrelles de métal se dressaient comme des géants endormis sous l'aube, tandis que des ombres dansaient encore parmi les carcasses d'un nouveau bâtiment en construction. Il faisait un froid polaire, alors ils disposaient encore de quelques heures avant que les ouvriers n'arrivent.

— Je n'en ai pas besoin, je vois très bien ce que c'est, rétorqua sèchement Sowl. Alors ?

— Eh bien, tu m'as dit que tu avais besoin de matériau, non ?

— Vous comptez commettre un vol ? s'étrangla le démon.

Tarkin et Pierre étouffèrent un rire à côté d'eux. Manakiel, qui ne voulait pas le contrarier davantage, fit appel à toute sa volonté pour rester sérieux devant ses sourcils froncés. ressemblait encore plus à un mime triste.

— Nous sommes ruinés, rappela le fae. Et puis ce n'est pas la mer à boire, c'est l'affaire de quelques planches et deux ou trois poutres.

— Et comment allons-nous transporter cela jusqu'à l'Extraordinarium ?

— Viktor nous attendra dans un carrum. Il ne devrait plus trop tarder, d'ailleurs.

— Comment a-t-il dégotté un aussi grand véhicule ?

— L'un de ses oncles tient une compagnie de livraison de marchandises, ça aide, n'est-ce pas ? rit Tarkin.

— Quand on parle du loup ! fit Manakiel en pointant du doigt les phares éclairant le chantier.

Il se leva prestement pour descendre le versant sur lequel ils surveillaient les environs. Les autres l'imitèrent, Sowl en bout de cortège. Le fae leur donna des ordres, puis leur tourna le dos. Il leva les mains pour déployer un large spectre autour d'eux afin de masquer leurs méfaits.

Ils devaient faire vite, si la milice du Voxxum leur tombait dessus, ils auraient de plus gros ennuis qu'une simple amende de cent mille pièces d'or sur le dos.

— Dépêchez-vous ! les héla Manakiel.

— Vous pourriez au moins nous donner un coup de main au lieu de jouer au petit chef.

Le démon déposa rageusement plusieurs planches dans la remorque du véhicule.

— Mais je suis votre chef, rétorqua Manakiel avec un sourire narquois.

— C'est bon, patron !

— Voilà, ça c'est de l'efficacité ! jubila le fae en narguant Sowl. Allez, on décolle.

Pierre grimpa avec le chargement et les trois autres hommes s'installèrent sur la banquette à l'avant du large véhicule. Contrairement aux navettes magiques, les carrum devaient être conduits manuellement. Des trois frères Edström, il n'y avait que Viktor, le plus âgé et le plus discret de la fratrie, qui était en mesure de manœuvrer le véhicule. Tarkin, Viktor et Sowl se serrèrent pour laisser de la place au fae et ils démarrèrent sur les chapeaux de roue.

Les routes de la Municipalité Est étaient encore désertes à cette heure-ci où seules quelques livraisons de marchandises ponctuaient le calme précédant le lever du jour. Alors que le carrum approchait d'un carrefour non loin du quartier forain, Viktor poussa un juron étouffé