Julia — mercredi 22 septembre 2021
Je me faufile derrière le comptoir de l'unité 1 pour voir dans quelle chambre se trouve le patient que je dois examiner. M. Jérôme Martin, 34 ans, chambre 32. Je jette un coup d'œil de chaque côté du couloir. La voie est libre, il n'y a que des externes et peut-être un interne, dans le fond, qui feuillète un dossier. Je me glisse dans la chambre du patient avec soulagement. Je ne sais pas pourquoi je mets tant d'énergie à éviter Ethan... Il n'est pas méchant et je suis sûre que je pourrais apprendre à l'apprécier, avec le temps. Mais sa façon de fanfaronner en permanence a le don de m'horripiler !
Est-ce seulement ça ? Où est-ce le fait que je ne puisse pas m'empêcher de penser à lui ?
Non !
Je musèle ma conscience avec toute la volonté dont je suis capable. Ethan Chevallier n'est définitivement pas un homme pour moi.
Je m'approche doucement de M. Martin, qui dort à poings fermés. Je tente de le réveiller, mais il est encore trop sédaté par les médicaments pour pouvoir émerger. Après plusieurs essais infructueux, je me résous à quitter la chambre. À peine la porte s'est-elle fermée que je tombe nez à nez avec Ethan.
— Julia ! s'exclame-t-il, aussi guilleret qu'à son habitude.
Merde !
— Ethan...
Il m'adresse son sourire éclatant et je peine à dissimuler mon trouble.
— Je ne savais pas que tu devais passer, poursuit-il sur sa lancée. Tu es venue pour Monsieur Martin, à la 32 ?
— Oui, c'est ça...
Ethan fronce les sourcils et parait perplexe. Il attrape le dossier qui se trouve devant la chambre et le parcourt rapidement.
— C'est une IMV au Zopiclone... 12 comprimés de 7,5 mg à 22 heures. Je ne t'ai pas appelé pour ça, dit-il en relevant les yeux vers moi. D'ailleurs, ça m'étonne qu'il soit évaluable...
— Il ne l'est pas.
Pour une fois, Ethan redevient sérieux. Il referme le dossier avec brusquerie.
— J'en dirai un mot à mon interne. Je te promets que ça ne se reproduira plus.
Sa réaction me surprend. À vrai dire, je suis étonnée qu'il prenne ma défense face à son interne... Et je dois dire que ce respect pour mon travail me touche, d'une certaine façon.
— Ce n'est pas grave, je repasserai demain, dis-je en m'adoucissant un peu.
J'esquisse un sourire et Ethan parait se détendre à son tour. Il réajuste son stéthoscope autour de son cou et pour la première fois, je remarque à quel point il est grand et de belle carrure. Malgré sa tenue de bloc, je ne peux m'empêcher de remarquer ses larges épaules...
Hmpf ! Difficile de ne pas se laisser distraire !
— Viens avec moi, repend-il en m'arrachant à ma contemplation. Je voudrais te montrer quelque chose !
Sans me laisser le temps de protester, il se dirige vers les portes battantes du service et je lui emboite le pas. Nous arpentons les couloirs en passant devant plusieurs bureaux. Il s'arrête devant une porte avec une plaque à son nom et pénètre à l'intérieur. La pièce est vaste, sobrement décorée, avec des armoires croulant sous les dossiers, comme souvent dans les hôpitaux. Ethan fait quelques pas et récupère sur une étagère une pile de documents.
— C'est pour toi ! s'exclame-t-il en me la donnant.
Puis il se plante devant moi en attendant ma réaction. Je parcours rapidement les feuilles des yeux. Ce sont des PCL-5 parfaitement remplies. Il y en a au moins une vingtaine ! J'ai du mal à réprimer mon sourire.
— Tu as commencé les inclusions ?
Je relève les yeux et rencontre son regard brûlant posé sur moi. Il hoche la tête en continuant de me scruter. Aussitôt, mon sourire s'évanouit et je sens ma gorge s'assécher.
— Ça te fait plaisir ? fait-il, plein d'espoir.
— Oui, ça me... Oui.
— Bien...
Son regard sur moi et si intense que je suis troublée, malgré tous mes efforts pour lutter contre l'effet qu'il a sur moi. Le silence se fait entre nous dans le bureau. Je ne peux m'empêcher de remarquer qu'Ethan est cerné. Une barbe naissante ombre sa mâchoire. Avec ses cheveux dorés légèrement en bataille, il est tellement beau qu'on le croirait sorti d'un magazine.
— Julia, souffle-t-il en s'approchant, j'étais sérieux la dernière fois. Ce projet me tient à cœur et je voudrais vraiment qu'on prenne le temps d'en parler.
Nous sommes tout proches à présent, et même juchée sur mes talons aiguilles, je dois relever la tête pour soutenir son regard. Je raffermis mon étreinte sur mes échelles, comme pour me protéger de sa présence magnétique.
Bon sang ! Pourquoi faut-il qu'il soit si... intense !
Je secoue la tête mais le cœur n'y est pas. En face de moi, Ethan se décompose.
— Pourquoi ? fait-il, dépité.
— Ethan, je ne peux pas, soupiré-je. Je te remercie pour les échelles, ça me fait plaisir que tu t'investisses comme ça... Et ne te méprends pas, ce travail compte beaucoup pour moi, mais...
Je laisse ma phrase en suspens sans savoir quoi ajouter.
— Mais quoi ? demande-t-il doucement.
Mais tu n'as aucune limite en ce qui concerne les femmes ?
Mais je sais que je ne représente pour toi qu'un morceau de chair fraîche à chasser ?
Mais j'ai un secret qui m'empêche de te dire oui, et que je ne pourrais jamais t'avouer ?
Je détourne le regard, embarrassée.
— Accepte de diner avec moi, insiste-t-il. Pour parler de l'étude.
Je lève à nouveau les yeux vers lui et croise son regard suppliant. Il a l'air tellement sincère que j'ai un pincement au cœur en m'écartant.
— Merci pour les échelles, dis-je avant de tourner les talons.
— Mais...
Je sors du bureau en trombe, sans le laisser terminer. S'il réitère sa demande, s'il continue de me fixer comme il le fait, je risque de ne pas pouvoir lui résister. Alors je m'éloigne dans le couloir sans me retourner, de peur de devoir à nouveau affronter son regard mordoré.
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Code Bleu [Sous contrat d'édition]
RomanceEthan est un médecin réanimateur arrogant et sûr de lui. À l'hôpital, son charme fait des ravages, et il enchaîne les aventures éphémères. Alors quand Julia, une psychiatre aussi belle que brillante, débarque dans son service, il n'y résiste pas. Ga...