Chapitre 30

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Jules

— Ce n'est vraiment pas prudent de partir, murmure Blanche alors que son regard s'attarde sur la voiture en marche.

Nous sommes tous les quatre sur le perron de la porte. Louis et Roméo discutent près du coffre de la voiture mais Blanche reste près de la porte, les bras croisés sur sa poitrine.

— Tu peux avoir confiance Blanche, vous allez partir quelques jours dans une grande ville. Nous y sommes allés des centaines de fois depuis que nous sommes là. Vous ne risquez rien et nous non plus, je tente de la rassurer. C'est votre voyage de noces !

Mais elle ne me répond pas. Elle laisse son regard divaguer sur le jardin et les bois alentours. Nous sommes bercés par les bruissements d'ailes des oiseaux nocturnes.

— Jules, promet moi de faire attention, si tu sens le moindre danger, prends mon fils avec toi et pars loin. Arrête de te sacrifier pour nous.

— Oula madame vous allez bien vite là ! Qui a parlé de sacrifie ? Vous allez partir quatre jours. Quand vous serez de retour, la neige sera toujours aussi robuste au sol, ton frère toujours aussi chiant et moi toujours aussi beau et drôle.

J'arrive à lui tirer un petit rire. Elle dépose un baiser sur ma joue et m'enlace.

— Je te promets que tout est bientôt terminé Jules, chuchote-t-elle à mon oreille. Tu vas retrouver Charline. Roméo et moi allons fonder notre foyer. Et j'ai hâte d'être heureuse avec vous tous.

— Tu le seras, je lui dis mes yeux ancrés dans les siens. Tu le seras.

Le bruit des pas des deux autres garçons nous coupe dans notre discussion.

— Prête ? demande Roméo à sa douce et jolie femme.

— Toujours pour toi, dit-elle.

J'attrape la main de Blanche et la fourre dans celle de mon frère.

— Maintenant partez nous faire des p'tits frères pour Victor et vous empiffrer de pates. Et nous on va enfin pouvoir dormir sans... grabuge.

Les jeunes mariés échangent un regard complice mais j'ai quand même le droit à une tape plutôt franche dans le dos. Blanche étreint son frère, puis moi une dernière fois. Elle fait ensuite le tour de la voiture avant de monter dedans. Je prends Roméo dans mes bras.

— Fais attention à elle,  je lui demande avant qu'il ne se retire.

— Je suis né pour veiller sur elle.

Il se recule et m'accorde un signe de tête. Il monte à l'avant de la voiture. Je porte ma main à ma tempe et le salut une dernière fois. Louis se tient droit comme un piquet à mes côtés.

— Quelle journée ! je lance. 

— C'est triste qu'ils n'aient pas eu leur grande fête de mariage. Je pensais que Blanche aurait voulu ça. C'est comme ça que j'imaginais mes soeurs quand la rage me consumait. Des princesses pourries gâtées. 

— Tu sais, ces deux-là ont toujours été très surprenant. Un jour ils se barrent à l'autre bout de l'Europe sans prévenir personne. Ils sont soudés. Alors si Blanche s'était mariée avec ce tocard de Martin elle aurait peut-être eu un château, des invités et des lancés de colombes. Mais elle n'aurait pas eu un mari. Ni l'amour que Roméo peut lui donner. Il vit pour elle. Littéralement.

Il ne me répond pas tout de suite. Je sens qu'il se tourne vers moi mais mes yeux restent concentrés sur la route enneigée et les sillons qu'ont formés les pneus dans la neige.

Les maux dits IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant