Kaliora, la dernière terrienne, Tome 2

Chapitre 3

La carte de Kaliora les guidait jusqu'à Ural. Au moins, pendant ce temps, elle n'était pas entre de mauvaises mains. Lüka n'avait pas eu de nouvelles de Gring Igitt depuis leur passage à Atlanta. Le pirate avait juré de le retrouver, mais sans l'aide de Lupus qui les traquait, il était presque impossible de les trouver. Il se surprit à se demander ce que pouvait bien devenir ce vieux crouton. Mais en même temps, il espérait ne pas avoir à recroiser sa route un jour.

Il faisait un froid de canard dans le vaisseau. Pour une raison qui leur était inconnue, le chauffage refusait de démarrer et il devait faire autour de dix degrés dans la pièce. Lüka avait revêtu son long manteau blanc et Lyuri s'était emmitouflée dans la couette qui sentait la poussière et la gardait sur le dos. Le stock de nourriture et d'eau était assez conséquent pour ne pas avoir à faire d'arrêt avant leur destination finale et les heures se faisaient longues. Leurs jambes commençaient à s'engourdir.

Lüka essayait de comprendre ce qui avait bien pu se passer lorsqu'il s'était engouffré dans le trou noir. Il était conscient que le temps s'écoulait de manière différente sur chaque planète ou presque, mais comment les trois jours passés chez lui et son voyages d'une semaine à peine avaient-ils pu se transformer en plus d'une année pour Lyuri ? Il était certain d'avoir été rapide. Alors que c'était-il passé lorsqu'il était dans le trou noir ? Avait-il vécu quelque chose qu'il avait fini par oublier ? Il avait beau chercher dans sa mémoire, rien ne lui venait à l'esprit, pas même un fragment de souvenir.

Son regard se posa sur la carte.

— Je suis sûr que tu vas aimé ma planète, dit-il pour se sortir de ses pensées. Il fait beau et chaud pour le moment et des fleurs sauvages poussent partout autour de ma maison. Tu vas adorer !

Lyuri sortit un peu plus son nez de la couette.

— J'ai hâte de voir ça, répondit-elle en souriant.

Au bout de quelques heures supplémentaires, Ural apparut enfin au loin. Lyuri resta bouche bée lorsqu'elle découvrit la titanesque planète au bas fracturé en une centaine de fragments plus ou moins gros. Une force invisible les maintenait presque en forme de sphère. Des tubes reliaient certains fragments entre eux, permettant de circuler sans emprunter de vaisseau.

Lüka dirigea le vaisseau vers le fragment A-127, le plus proche de chez lui à posséder une base spatiale. Il demanda l'autorisation d'atterrir qui lui fut rapidement donnée comme il était parti de cette même station quelques jours plus tôt. Une fois sortis, Lüka demanda que le vaisseau soit garé sur l'immense parking couvert de la station et il offrit en échange une petite bourse brune d'argent à l'homme derrière le guichet.

Les murs de la station étaient hauts et blancs et formaient une soucoupe volante. Les deux aventuriers entrèrent dans le bâtiment et Lyuri du présenter sa carte d'identité à une machine qui la scanna et analysa son visage avant de la lui rendre. Même si elle s'en doutait, elle fut étonnée par les oreilles pointues des habitants qui allaient et venaient entre les rangs, les machines et les guichets.

Lüka la guida jusqu'à un espace un peu plus reculé de la station où trois portiques s'offrirent à eux. Les deux premiers, menant aux tuyaux des fragment A-36 et A-101, possédaient une file d'attente de plusieurs minutes. Mais le troisième, menant au fragment A‑153, n'avait personne. Ils prirent chacun un ticket qu'ils scannèrent pour pouvoir passer le portique et un homme blond aux oreilles pointues portant un costume leur souhaita un bon voyage.

Ils pénétrèrent l'immense entrée et atterrirent aussitôt dans un tube de verre, traversé par une fine bande blanche leur permettant de marcher. Le tube était transparent, légèrement bleui, mais laissait le ciel se dessiner. Lyuri s'arrêta pour contempler les étoiles. Une sensation de malaise l'envahit en même temps que l'excitation. Elle marchait en plein milieu de l'Univers, seulement séparée par une couche de verre, si vulnérable. Son corps était partagé entre l'envie de courir pour arriver rapidement à la sortie du tunnel, se contenir pour ne pas briser la seule chose qui la maintenait encore en vie ou s'arrêter pour admirer les fragments d'Ural qui flottaient tout autour d'eux. Lüka se rapprocha d'elle.