Seulement seize heures avec toi - Suite

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Les trois films de Matrix seraient, je l'espère, suffisants pour recentrer mes pensées sur autre chose que les traits fins de Jérémy. Notre discussion m'avait exténué, m'ouvrir n'avait strictement rien changé à cette boule qui souffrait comme moi de cette trop grande distance entre nos deux corps.

≈^ᴗ^≈

Marmonnant, à moitié réveillé par une turbulence, je m'agitais sous la couverture. Après m'être tourné et retourné un nombre incalculable de fois, je m'installai sur le flanc face à mon ami. Il s'était roulé en boule, ses genoux serrés contre son ventre, sa tête baissée et ses mèches noires recouvraientp son visage. Enfin presque, mes prunelles se fixaient avec désir sur ses lèvres gonflées qui s'entrouvraient dans un rythme régulier pour laisser passer son souffle sucré. Sans m'en rendre compte, je me penchai vers lui, mon nez à quelques millimètres de ses cheveux. J'inspirai son odeur si particulière, ne pouvant empêcher un sourire niais de se former sur mon visage. Jérémy avait raison, en présence de la personne qu'on aime, il y a toujours ces réactions qui surgissent et qui peuvent nous trahir.

Je finis par me placer sur l'autre côté, face au hublot fermé. Je camouflai un bâillement d'une main et m'emmitouflai encore plus sous le drap fin. Râlant contre la climatisation excessive des avions, je tentai de retrouver le sommeil, partagé entre mon besoin de repos et celui de profiter des dernières heures qu'il me restait en compagnie du jeune homme. Les yeux clos, mon souffle s'apaisa me plongeant dans des rêves agréables, la saveur sucrée de Jérémy qui parvenait jusque dans mes songes.

Je grognai, énervé contre cette putin de turbulence qui me réveillait sans cesse. Je me redressai, stoppé par un poids. Je sentis le sang me monter au cerveau avec une vitesse foudroyante alors que la main de Jérémy se resserra sur ma couverture, son visage niché dans mon cou. Il gémit contre moi, dérangé par mes mouvements. Merde, merde. Un mot qui tournait en boucle dans mon cerveau saturé. Elle était vraiment placée très bas cette main, me dis-je le corps crispé sous la lame brûlant de désir qui remontait ma colonne vertébrale. Je te veux, pensai-je avec douleur en frôlant la peau de sa main.

Le jeune homme sursauta, se relevant précipitamment. Il me dévisagea, ses yeux collés par le sommeil, ses mèches ébènes toutes emmêlées. Je le désirais, cette soif n'avait jamais été aussi grande. Je le foudroyais involontairement, lui déversant dans un regard tout l'amour que je lui portais. J'enfouis une main moite dans mes cheveux et détournai mon visage de la mine figée de mon ami. Il se racla la gorge.

- Me suis endormi ? murmura-t-il pour ne pas déranger les autres occupants de l'appareil

- Oui Jérém'. On a eu du mal à finir le deuxième film, l'informai-je.

- Il nous reste combien de temps ? finit-il par dire après plusieurs minutes de silence.

Une impression bizarre que toutes nos répliques étaient séparées depuis le début du voyage par ce silence pesant.

- Six heures, soufflai-je.

- Seulement ? fit-il paniqué en se rasseyant en tailleur sur son siège.

J'acquiesçai surpris qu'il partage cette pensée. Il tritura l'accoudoir entre nous et fourra un nouveau disque dans l'appareil.

- Encore ? Tu ne veux pas dormir ? Tu es crevé Jérém'.

- Non, je veux être conscient, me répliqua-t-il fermement en replaçant son casque sur les oreilles.

Il avait vraiment un comportement bizarre. La boule en moi ronronna de plaisir lorsqu'il se blottit contre moi et posa sa tête sur mon épaule. Je mis à mon tour le casque sur mes oreilles, prêt à profiter de ces dernières heures éveillé avec lui. Il me tapota la main.

Recueil d'OS SkyrockOù les histoires vivent. Découvrez maintenant