Chapitre 27 : 21 ans plus tôt - 5

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Plusieurs semaines plus tard, Thierry était revenu au logement de la famille du Moulins un jour où il savait pertinemment qu'il y trouverait Isabel seule. Une nouvelle fois, il frappa à la porte avec un énorme bouquet dans les bras. Le bouquet du pardon, espérait-il.

Isabel ouvrit la porte puis se figea de surprise et de stupeur en se retrouvant nez-à-nez avec Thierry. Elle ne l'avait pas recroisé depuis l'incident de septembre dernier, et cela lui convenait très bien.

« —Bonjour très chère Isabel, commença l'homme sur un ton mielleux.

—Bonjour, répondit froidement Isabel.

—Je viens te présenter mes excuses les plus sincères. »

Thierry lui tendit son bouquet qu'elle ne saisit pas. Il replia alors son bras, le sourire toujours aux lèvres, et s'autorisa lui-même à entrer dans la maison.

« —Je me suis conduit comme un goujat, poursuivit-il sur un ton faussement plaintif. Je traversais une période difficile et j'ai très mal réagit à ton refus de devenir mienne. Maintenant que je vais mieux, je suis venu te demander pardon. Ne me repousse pas s'il te plaît. »

Isabel ne lui répondit rien. Thierry continua son chemin pour s'installer confortablement dans l'un des fauteuils du salon, le bouquet sur ses genoux.

« —Elle vont faner si tu ne les mets pas dans l'eau, dit-il en désignant les fleurs.

—Tous les vases sont pris, lui répondit-elle toujours aussi froidement.

—Isabel, ne soit pas si dure avec moi, je t'en supplie. J'ai très mal agit la dernière fois, mais je le regrette. Chaque jour je ressasse encore et toujours ce qu'il s'est passé entre nous. Et chaque jour sans te demander pardon me ronge un peu plus de l'intérieur. J'ai besoin que tu m'accordes ce pardon. Je pense que, toi aussi, tu serais apaisée si tu me l'accordais.

—Non, j'étais bien mieux sans vous voir.

—Ce que tu peux être désagréable ma tendre Isabel. Mais j'aime les femmes de caractère. Ainsi, tu n'es que plus désirable encore à mes yeux. »

Lorsqu'il utilisait des adjectifs mielleux avant son prénom pour parler d'elle, il agissait comme Felipe. Et pour ça, elle le détestait encore plus. Aucun homme sur cette Terre n'arrivait à la cheville de Felipe. Oh comme il lui manquait... Isabel retint ses larmes de justesse. Elle ne voulait pas montrer de faiblesse à son ennemi.

« —Je te sens fébrile, poursuivit Thierry. Je sens que j'ai touché une corde sensible. Tu as besoin de me pardonner n'est-ce pas ?

—Absolument pas, vous vous trompez complètement.

—Voyons Isabel, tu ne sais plus ce que tu dis. Je te trouble sûrement. Je fais souvent cet effet aux femmes. »

Thierry devait sans doute être très attirant pour les femmes de son âge. Mais il écœurait Isabel au plus haut point. Et il lui faisait peur, très peur.

« —La différence d'âge ne me fait pas peur, reprit-il sur un ton pensif. Il est temps que les mentalités changent avec ce nouveau millénaire. Je pense que tu n'oses pas car je pourrais être ton père. Dis-toi que, justement, je m'entendrai très bien avec lui car nous sommes de la même génération. »

S'il savait que tu agissais comme ça avec moi, vieux porc, il te tuerait, songea Isabel qui sentait la moutarde lui monter au nez. Elle n'osait pas parler de tout cela avec lui, justement parce qu'elle craignait sa réaction. Personne ne touchait à sa petite fille. Il avait déjà été difficile de lui faire accepter le chaste Felipe, une relation de ce type avec un vieil homme qui respirait la luxure l'aurait fait sortir de ses gonds.

Thierry se leva de son fauteuil, ce qui sortit Isabel de ses pensées. Il posa son bouquet sur la table basse, et s'approcha de la jeune femme en la fixant dans les yeux. Elle recula autant qu'elle le pouvait, mais elle fut vite prise au piège par le mur qui se trouvait derrière elle. Elle était terrorisée.

« —Laisse-toi tenter, chuchota Thierry qui était presque collé à elle.

—Non ! enragea Isabel qui se dégagea de l'homme.

—Ne fait pas la sainte, je sais que tu en as envie.

—Certainement pas avec un vieux pervers comme vous. Vous êtes un déchet, un suppôt de Satan. Le Tout Puissant vous punira pour ce que vous faites. »

Et elle lui cracha au visage.

Grosse erreur.

Thierry la saisit par le bras et la bloqua à nouveau contre le mur dont elle venait d'échapper. Il était appuyé contre elle, le visage à quelques centimètres du sien.

« —Crois-moi que tu vas céder. Si tu ne le fais pas, je vous dénonce aux flics et vous serez expulsés de France sans même avoir eu le temps de faire vos bagages. »

Et l'homme vola un baiser à la jeune espagnole qui commença par résister un moment avant de se résigner, en larmes. Alors que les mains de Thierry commençaient à explorer le corps vierge d'Isabel, quelqu'un frappa à la porte.

Thierry se dégagea aussitôt en lissant ses vêtements, remettant ses cheveux en place, et retrouvant difficilement sa respiration. Il écumait de rage.

« —T'as de la chance, mais t'en auras pas autant la prochaine fois. Crois-moi. »

Isabel s'était laissée glisser le long du mur. Elle pleurait, secouée de gros sanglots.

Thierry avait quitté la maison, saluant au passage son neveu qui venait aussi rendre visite à Isabel. Sans avoir reçu aucune autorisation, mise à part celle illégitime de Thierry, Sébastien entra dans la maison et se dirigea vers les bruits de pleurs.

Lorsqu'il vit Isabel, recroquevillée sur elle-même, les épaules secouées par ses sanglots, il se précipita auprès d'elle.

« —Oh ma pauvre Isabel ! lâcha-t-il avec empathie. Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Mon oncle Thierry t'a fait du mal ? Dis-moi tout ! Je ne l'ai jamais senti ce pauvre type. Si jamais il t'a fait quoi que ce soit, crois-moi que... Que... Je vais lui casser la gueule ! »

Isabel posa sa tête sur l'épaule rassurante de Sébastien. Il était gauche, et cela l'amusait autant qu'il la réconfortait. Elle lui raconta sa mésaventure en minimisant grandement les détails. Elle savait pertinemment que Sébastien n'irait pas lui faire de mal. Il était trop lâche pour ça. Mais elle l'appréciait beaucoup. C'était une personne sur qui elle pouvait compter, elle le savait.

L'héritageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant